accidents du travail et maladies professionnelles
Question de :
Mme Estelle Grelier
Seine-Maritime (9e circonscription) - Socialiste, républicain et citoyen
Mme Estelle Grelier attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes sur les mesures à prendre pour lutter contre la sous-déclaration des accidents du travail. Depuis 1996, en application de l'article L. 176-2 du code de la sécurité sociale, une commission est chargée d'établir pour 3 ans un bilan des problèmes posés par la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles (AT-MP), phénomène connu et reconnu par les pouvoirs publics. D'après la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, qui a eu connaissance du dernier rapport en juin 2014, le nombre d'accidents du travail (avec ou sans arrêt) non déclarés serait estimé à plus de 92 000 pour l'année 2014. Ce niveau élevé s'expliquerait notamment par le fait que certains employeurs exercent des pressions à l'encontre de leurs salariés afin de ne pas déclarer un accident du travail comme tel, tout sinistre d'origine professionnelle étant pris en compte dans le calcul du taux de cotisation de l'employeur pour les trois années suivant sa survenance. Elle souhaiterait donc connaître son point de vue sur l'évolution de ce problème et savoir quelles sont les mesures et les initiatives qu'elle entend prendre pour lutter contre ces pratiques frauduleuses abusives qui portent préjudice tant aux salariés concernés qu'aux entreprises vertueuses, lesquelles se voient imposer la mutualisation du coût (un milliard d'euros en 2015 pour l'ensemble des AT-MP) de la sous-déclaration entre l'ensemble des employeurs.
Réponse en séance, et publiée le 4 février 2015
LUTTE CONTRE LA SOUS-DÉCLARATION DES ACCIDENTS DU TRAVAIL
M. le président. La parole est à Mme Estelle Grelier, pour exposer sa question, n° 856, relative à la lutte contre la sous-déclaration des accidents du travail.
Mme Estelle Grelier. Madame la secrétaire d'État chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie, ma question est relative aux mesures à prendre pour lutter contre la sous-déclaration des accidents du travail. Depuis 1996, et en application de l'article L. 176-2 du code de la Sécurité sociale, une commission est chargée d'établir pour trois ans un bilan des problèmes posés par la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles, phénomène connu et reconnu par les pouvoirs publics. Cela a d'ailleurs conduit le législateur à prévoir le versement par la branche accidents du travail et maladies professionnelles d'une compensation à la branche maladie au titre des accidents et maladies non déclarés, financée par des cotisations à la charge des employeurs. En 2015, le montant de ce transfert s'élève à 1 milliard d'euros, en augmentation de plus de 25 %.
D'après la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, qui a eu connaissance du dernier rapport de cette commission, daté du mois de juin 2014 – je regrette d'ailleurs de ne pas avoir réussi à trouver trace de ce document sur les sites institutionnels, contrairement aux précédents rapports –, le nombre d'accidents du travail non déclarés, avec ou sans arrêt, serait estimé à plus de 92 000 pour l'année 2014. Ce niveau élevé s'expliquerait notamment par le fait que certains employeurs exercent des pressions à l'encontre de leurs salariés, afin de ne pas déclarer un accident du travail comme tel – tout sinistre d'origine professionnelle étant pris en compte dans le calcul du taux de cotisation de l'employeur pour les trois années suivant sa survenue.
Je souhaiterais donc connaître le point de vue du Gouvernement sur l'évolution de ce dossier et savoir quelles sont les mesures et les initiatives qu'il entend prendre pour lutter contre ces pratiques frauduleuses abusives. Ces dernières portent en effet préjudice tant aux salariés concernés qu'aux entreprises vertueuses, lesquelles se voient imposer la mutualisation du coût de la sous-déclaration. Une telle situation risque, à terme, de décourager les acteurs engagés dans des actions de prévention dont ils ne perçoivent pas les bénéfices, puisque elles sont sans effet sur le niveau de leur taux de cotisation.
Enfin, je souhaite vous faire part des difficultés à accéder aux services de la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail – CARSAT –, dont me font régulièrement part les administrés et les associations d'accidentés du travail de ma circonscription. Je veux m'assurer que le Gouvernement est conscient de ce problème et qu'il l'étudiera concrètement afin d'améliorer l'accès des usagers pour une meilleure prise en compte de leurs droits.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie.
Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie. Madame la députée, la commission de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles, dans son rapport de juin dernier, souligne effectivement que, d'après les organisations syndicales, certains employeurs ne déclareraient pas leurs accidents du travail. C'est surtout dans les petites entreprises que l'on noterait ce phénomène. La commission indique toutefois que les études manquent pour pouvoir être plus affirmatif et plus précis. Son évaluation du nombre d'accidents du travail sous-déclarés est, en outre, très inférieure au chiffre de 92 000. La commission considère en effet que ce sont 56 000 accidents du travail qui n'auraient pas été déclarés en 2012, mais je vous concède que ce chiffre est déjà élevé.
L'une des raisons de cette sous-déclaration pourrait résider dans la volonté de l'employeur d'éviter une hausse de ses cotisations. La commission juge à cet égard que la réforme de la tarification intervenue en 2010 a pu jouer un rôle en ce qu'elle permet aux entreprises d'appréhender désormais clairement le coût de leurs sinistres. Mais cet argument me semble devoir être tempéré, car les rapports rendus par la commission en 2008 et 2011 constataient déjà de telles pratiques. De tels agissements doivent, bien entendu, être sévèrement sanctionnés, et le défaut de déclaration d'un accident du travail est d'ailleurs pénalement sanctionnable.
Mais, au-delà de la sanction, la meilleure solution passe par l'information du salarié et l'accentuation de l'effort de prévention des accidents mené par les caisses. Tout d'abord, il faut informer le salarié qu'un accident du travail ouvre des prestations supérieures à celles perçues en cas de maladie et qu'il peut se substituer à son employeur pour déclarer son accident auprès de la Sécurité sociale, et ce jusqu'à l'expiration de la deuxième année qui suit l'événement.
Ensuite, il faut accentuer l'effort de prévention, car notre objectif est bien, avant tout, de protéger les salariés contre la survenue d'un accident du travail. C'est pourquoi la prévention est la priorité de la branche des accidents du travail dans la convention d'objectifs et de gestion conclue avec l'État en 2013. J'observe d'ailleurs que les conventions qui ont été signées avec certaines branches, comme celle des activités de l'ameublement ou les entreprises de travaux publics, afin d'accompagner les entreprises dans l'application des règles de prévention ont déjà permis d'améliorer la mise en œuvre de ces règles.
M. le président. La parole est à Mme Estelle Grelier.
Mme Estelle Grelier. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie pour ces éléments de réponse. Je suis d'accord avec vous sur la nécessité d'une meilleure information des citoyens et des salariés, qui passe par une amélioration de l'accès aux services des caisses qui ont la responsabilité de traiter ces sujets. J'insiste, assez lourdement, j'en conviens, sur ces difficultés en attendant une réponse et des mesures du Gouvernement relativement à ce sujet.
Auteur : Mme Estelle Grelier
Type de question : Question orale
Rubrique : Risques professionnels
Ministère interrogé : Affaires sociales, santé et droits des femmes
Ministère répondant : Affaires sociales, santé et droits des femmes
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 27 janvier 2015