entreprises
Question de :
M. Éric Alauzet
Doubs (2e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
M. Éric Alauzet attire l'attention de M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique sur le fait qu'il y a quelques mois un accord a été signé concernant le rachat d'Alstom branche énergie par l'entreprise General Electric. Cet accord contient un engagement de General Electric à créer 1 000 emplois sur le territoire français. Nous ne pouvons que nous en réjouir. Cependant la situation d'Alstom transport se dégrade depuis l'annonce de ce rachat. Ainsi Alstom a annoncé le licenciement de 320 salariés sur le site de Belfort sur un effectif de 590 personnes, soit 75 % des effectifs consacrés à l'industrialisation, au bureau d'étude et à l'ingénierie. Les perspectives pour l'entreprise ne sont pas toutes mauvaises puisqu'elle a remporté un contrat de deux milliards d'euros pour fabriquer les nouveaux métros parisiens. Ce contrat devrait ainsi permettre la création ou la pérennisation de 2 000 emplois en France, notamment à Ornans dans le Doubs. L'entreprise se développe également à l'internationale où l'entreprise Gibela détenu à 61 % par Alstom fabriquera 600 trains de banlieue d'ici à 2025 pour un montant de 3,8 milliards d'euros. 70 % de ces trains seront réalisés en Afrique du Sud et les premiers trains arriveront du Brésil où Alstom vient d'ouvrir une nouvelle chaîne de fabrication. Si nous nous réjouissons de la reconnaissance du savoir-faire français, nous devons constater que le rayonnement international ne permet pas la création d'emploi en France. Une commande publique concentrée sur l'entretien et la rénovation de l'existant, ainsi que le développement de transports collectifs urbains serait riche en emploi. Par exemple le scénario alternatif à un canal Seine-Nord à grand gabarit couterait environ 2,5 milliards, soit deux fois moins que les 4,5 milliards du projet actuel. Cela permettrai de dégager des fonds à répartir sur un ensemble d'infrastructures dont une bonne partie pourrait profiter au rail. Il lui demande donc quelles mesures le Gouvernement entend prendre afin de consolider l'emploi en France du champion du transport ferroviaire qu'est Alstom.
Réponse en séance, et publiée le 25 mars 2015
AVENIR D'ALSTOM TRANSPORT
M. le président. La parole est à M. Éric Alauzet, pour exposer sa question, n° 938, relative à l'avenir d'Alstom Transport.
M. Éric Alauzet. Madame la secrétaire d’État, il y a quelques mois un accord a été signé concernant le rachat de la branche Énergie d'Alstom par l'entreprise General Electric. Dans cet accord, General Electric s'engage à créer mille emplois sur le territoire français. Nous ne pouvons que nous en réjouir. Cependant, la situation d'Alstom Transport continue de se dégrader. Ainsi, l'entreprise a annoncé le licenciement de 320 salariés sur le site de Belfort sur un effectif de 590 personnes, soit 75 % des effectifs se consacrant à l'industrialisation, au bureau d'études et à l'ingénierie. Sans décision dans les six mois, 10 000 emplois sont menacés, et 2 500 chez les sous-traitants et les fournisseurs, à l'échéance 2017-2018.
Pourtant les perspectives pour l'entreprise ne sont pas toutes mauvaises puisqu'elle a remporté un contrat de 2 milliards d'euros pour fabriquer les nouveaux métros parisiens : 217 trains MP 14 et le prolongement de la ligne 14. Ce contrat devrait permettre la création ou la pérennisation de 2 000 emplois en France, notamment à Ornans, dans le Doubs, une ville qui m'est chère.
Le renforcement de l'entreprise dans les domaines de la signalisation, du fret, ainsi que l'offre complète qu'elle présente à l'étranger, augmentent le potentiel d'Alstom Transport. L'avenir serait à l'exportation. Certes, le groupe se développe à l'international, puisque l'entreprise Gibela, détenue à 61 % par Alstom, fabriquera 600 trains de banlieue d'ici à 2025 en Afrique du Sud, pour un montant de près de 4 milliards d'euros. Cependant, 70 % de ces trains seront réalisés sur place et les premiers arriveront du Brésil où Alstom vient d'ouvrir une nouvelle chaîne de fabrication. Si nous nous réjouissons de la reconnaissance du savoir-faire français, nous devons constater que le rayonnement international ne permet pas la création d'emplois en France : il y aura 70 000 emplois en Afrique du Sud et zéro en France, en dehors de l'ingénierie.
Aussi une commande publique française, centrée sur le développement, l'entretien et la rénovation des voies ferrées et du matériel existants, voire la création de nouvelles voies, ainsi que sur le développement des transports collectifs urbains, serait-elle riche en emplois pour notre pays.
Je souhaite donc savoir quelles mesures le Gouvernement entend prendre afin de consolider l'emploi en France du champion du transport ferroviaire qu'est Alstom.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire.
Mme Carole Delga, secrétaire d'État chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire. Monsieur le député Éric Alauzet, Emmanuel Macron, retenu au Sénat, vous demande de bien vouloir l'excuser et m'a chargée de vous répondre.
L’État est en effet intervenu dans les négociations entre Alstom et General Electric, et a pu peser sur les conditions de leur rapprochement. Comme vous l'avez indiqué, General Electric a pris l'engagement formel de créer 1000 emplois en France dans ses activités industrielles.
Parallèlement, Alstom a vocation à maintenir et à développer ses activités dans les transports. e rapprochement avec General Electric permettra à Alstom Transport d'avoir un endettement net nul et donc de disposer de ressources financières suffisantes pour financer son développement. À court terme, Alstom pourra racheter l'activité de signalisation ferroviaire de General Electric.
La filière ferroviaire est aujourd'hui confrontée à la baisse des carnets de commandes. Pendant les dix dernières années, le secteur a connu un niveau d'activité très élevé qui a conduit au renouvellement quasi intégral de l'offre de matériel roulant.
L'action de l'État se déploie sur plusieurs axes prioritaires, indépendamment du projet canal Seine-Nord à grand gabarit, qui se situe à un horizon beaucoup plus lointain.
En matière ferroviaire, l’État agit sur les commandes. Avec le projet d'aménagement du Nouveau Grand Paris, ce sont près de 32,5 milliards d'euros qui sont investis par l’État, la région Île-de-France et les collectivités. Il s'agit de construire les 200 kilomètres des nouvelles lignes du Grand Paris Express, mais aussi de moderniser et de prolonger les réseaux existants.
Plusieurs appels d'offres très importants sont en cours, ou en passe d'être lancés. Un marché de 2 milliards a été récemment attribué à Alstom pour la livraison de rames de métros sur pneus sur le réseau du Grand Paris. Concernant les TER et les TET, le secrétaire d’État aux transports a lancé le 19 novembre dernier la commission sur l'avenir des trains d'équilibre du territoire. Présidée par Philippe Duron, celle-ci a pour mission de préciser les besoins de renouvellement des matériels roulants. Sans attendre, ce sont déjà 34 rames Régiolis qui ont été commandées à Alstom pour un montant de 510 millions d'euros.
Le Gouvernement s'engage également en soutenant l'innovation, qui constitue l'un des atouts de cette filière et ouvre des perspectives. L’État accompagne ainsi l'institut de recherche Railenium à hauteur de 80 millions d'euros. Il soutient aussi le plan industriel « TGV du futur » qui permettra de fabriquer une nouvelle génération de trains à grande vitesse destinée à conquérir de nouveaux marchés à l'export. Ce plan mobilise Alstom, mais également un ensemble de PME et d'ETI. Les discussions sont en cours de finalisation pour que la production de ces trains soit en mesure de démarrer en 2018.
Enfin, le Gouvernement soutient la filière ferroviaire à l'exportation, à travers le financement des projets. Par exemple, la vente de quatorze rames à grande vitesse au Maroc a été soutenue par un prêt de 350 millions d'euros, ce qui a permis de donner 120 000 heures de travail au site de Belfort.
Vous le voyez, monsieur le député, le Gouvernement est mobilisé pour soutenir la filière ferroviaire française et encourager la création d'emplois sur le territoire national.
M. le président. La parole est à M. Éric Alauzet.
M. Éric Alauzet. Merci, madame la secrétaire d’État, pour votre réponse.
Vous avez parlé du canal Seine-Nord. Il faut vraiment que nous nous interrogions sur nos choix stratégiques, notamment dans le cadre des financements européens et du plan Juncker. Faisons-nous ce canal à grand gabarit, pour 4,5 milliards, ou bien pourrait-on, pour 2,5 milliards, c'est-à-dire moitié moins, réaliser l'électrification de la ligne Amiens-Châlons – ce qui donnerait du travail à Asltom Transport –, investir dans une autoroute ferroviaire jusqu'à Bayonne, créer une zone de fret au croisement ferroviaire de Longueau, améliorer la desserte ferroviaire et fluviale de la vallée de la Seine ? Il faut vraiment s'interroger sur ces projets.
Au niveau européen, on veut toujours faire grand, alors que nous avons sans doute intérêt, avec des fonds de fonds, à financer des projets alternatifs dans les régions. Je pourrais dire la même chose sur le projet de ligne ferroviaire Lyon-Turin.
Auteur : M. Éric Alauzet
Type de question : Question orale
Rubrique : Industrie
Ministère interrogé : Économie, industrie et numérique
Ministère répondant : Économie, industrie et numérique
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 17 mars 2015