Question orale n° 972 :
CAP

14e Législature

Question de : M. Joël Giraud
Hautes-Alpes (2e circonscription) - Radical, républicain, démocrate et progressiste

M. Joël Giraud alerte Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur le projet de fermeture du CAP ébénisterie actuellement enseigné au lycée professionnel Alpes et Durance à Embrun dans les Hautes-Alpes. Il s'inquiète de la décision de fermer cette section dès la rentrée prochaine, mettant en péril la carrière des enseignants spécialisés de cette filière mais remettant surtout en question les perspectives professionnelles des étudiants de son département pour lesquels cette formation participe d'une offre complémentaire et diversifiée qui trouve toute sa place dans un département où la pluriactivité est indispensable au développement économique et à l'emploi local (80 % des salariés privés sont saisonniers dans les Hautes-Alpes). Il regrette que le critère principal ait été oublié, celui de répondre à la réalité du territoire et aux besoins de ses habitants dans un département fortement touristique où l'acquisition d'un savoir-faire en artisanat d'art est un atout supplémentaire pour des jeunes gens qui sont désireux de rester vivre et travailler « au pays ». Il note qu'au moment où les élus de la ville de Briançon envisagent de mettre en place un centre de formation dans la commune pour éviter l'exode des jeunes et leur offrir un avenir professionnel sur le territoire, le choix de supprimer cette filière manque de cohérence. Par ailleurs, il précise que de nombreux acteurs privés et publics sont fédérés au sein de structures qui travaillent pour le développement de la filière bois-énergie dans les Hautes-Alpes. Le développement de l'ébénisterie de montagne correspond au maintien d'une activité traditionnelle et ancestrale qui contribue à la construction de l'âme de ce département et de ses artisans. C'est pourquoi il lui demande un nouvel examen avec un éclairage différent, celui du territoire, et l'abandon de ce projet de fermeture.

Réponse en séance, et publiée le 27 mars 2015

PROJET DE FERMETURE DU CAP ÉBÉNISTERIE DU LYCÉE PROFESSIONNEL ALPES ET DURANCE D'EMBRUN DANS LES HAUTES-ALPES
Mme la présidente. La parole est à M. Joël Giraud, pour exposer sa question, n°  972, relative au projet de fermeture du CAP ébénisterie du lycée professionnel Alpes et Durance d'Embrun dans les Hautes-Alpes.

M. Joël Giraud. Monsieur le secrétaire d’État, ma question porte sur le projet de fermeture, à la rentrée prochaine, du certificat d'aptitude professionnelle ébénisterie, formation actuellement dispensée au sein du lycée professionnel d'Embrun dans les Hautes-Alpes.

Il y a plus de trente ans, ce même lycée a inventé les formations pluriactives. La nouvelle de cette fermeture est tombée comme un couperet. Pourtant, cette formation participe d'une offre complémentaire et diversifiée qui trouve toute sa place dans un département où la pluriactivité est indispensable au développement économique et à l'emploi local. Cette fermeture se fonde sur des critères purement mathématiques et totalement déconnectés de la réalité du territoire.

Cette réalité a été oubliée dans un département fortement touristique où l'acquisition d'un savoir-faire en artisanat d'art constitue un atout supplémentaire pour des jeunes gens désireux de rester vivre et travailler au pays. On leur demande désormais d'aller faire leur CAP à Marseille à 300 kilomètres, dans un lycée sans internat !

En réponse, le rectorat met en avant l'ouverture dans le même établissement d'un BTS « système constructif bois et habitat » mais les deux événements ne sont pas liés. S'ils s'avère opportun, en effet, d'offrir une nouvelle formation qualificative au rayonnement interacadémique, voire national, il n'est pas pour autant justifié d'en supprimer une autre qui permet de répondre à la volonté des acteurs du territoire de maintenir un savoir-faire traditionnel et toujours prisé, et de reprendre des entreprises artisanales et des équipements qui risquent, sans cela, de péricliter, suite à la cessation d'activité des artisans en âge de prendre leur retraite.

De nombreux acteurs privés et publics sont fédérés au sein de structures qui travaillent pour le développement des filières bois-énergie et bois-construction dans les Hautes-Alpes. Ces secteurs pèsent fortement dans le paysage économique tant par l'activité qu'ils génèrent que l'emploi qu'ils recouvrent. Pas moins de soixante-neuf entreprises se trouvent dans les Hautes-Alpes et vingt-neuf dans les Bouches-du-Rhône.

Le développement de l'ébénisterie de montagne correspond au maintien d'une activité ancestrale qui contribue à la construction de l'âme des Hautes Alpes et de ses artisans. Elle diversifie de surcroît l'offre touristique en proposant aux visiteurs un séjour qui a du sens, en lien avec le territoire.

Aussi je vous demande, monsieur le secrétaire d’État, de procéder à un nouvel examen avec un éclairage différent, celui du territoire, et de poser un moratoire sur ce projet de fermeture pour relancer la dynamique de la filière bois que le rectorat d'Aix-Marseille, au contraire de celui de Grenoble, n'a jamais considérée comme une priorité.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la réforme de l'État et de la simplification.

M. Thierry Mandon, secrétaire d'État chargé de la réforme de l'État et de la simplification. Madame la présidente, monsieur le député Joël Giraud, la priorité donnée à la jeunesse par le Président de la République se traduit concrètement par l'attention que nous portons à son insertion professionnelle. En ce sens, le ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche agit pour valoriser davantage l'enseignement professionnel, levier important d'insertion rapide et qualitative dans le monde du travail pour des milliers de jeunes.

C'est dans ce cadre que l'académie d'Aix-Marseille et le conseil régional de Provence-Alpes-Côte-d'Azur ont choisi d'élever le niveau de qualification des élèves de l'ensemble du territoire académique. Cet objectif figure parmi ceux inscrits au contrat de plan régional de développement des formations professionnelles pour les années 2011 à 2015.

S'agissant plus particulièrement de la fermeture du certificat d'aptitude professionnel d'ébénisterie au lycée Alpes et Durance d'Embrun, je suis en mesure de vous apporter les précisions suivantes. Cette formation, disposant d'une capacité de quinze élèves, n'a accueilli en 2013 que huit élèves en première année et dix en deuxième année et en 2014, onze élèves en première année et six en deuxième année. Parallèlement, seuls seize élèves ont été admis lors des deux dernières sessions d'examens. Ces éléments ont donc conduit les services académiques à faire le choix de sa fermeture. Le conseil régional, saisi de cette situation, a d'ailleurs confirmé cette décision à l'unanimité, le 20 février dernier, en assemblée plénière.

Néanmoins, l'offre des formations de niveau V reste particulièrement développée dans le département des Hautes-Alpes, notamment par la voie de l'apprentissage.

Par ailleurs, M. le recteur de l'académie d'Aix-Marseille a la volonté d'accompagner le lycée Alpes et Durance dans le développement de sa spécificité sur les métiers du bois. Il a donc décidé qu'une formation au BTS « système constructif bois et habitat » serait désormais dispensée dans cet établissement.

Vous le voyez, monsieur le député, nous nous attachons à offrir aux élèves des parcours fluides et d'excellence du CAP au baccalauréat professionnel et d'élever le niveau de qualification en sortie, vers le BTS notamment. C'est ainsi que nous garantirons la meilleure intégration professionnelle pour les jeunes de notre pays.

Mme la présidente. La parole est à M. Joël Giraud.

M. Joël Giraud. Merci pour votre réponse, monsieur le secrétaire d’État. J'insisterai tout de même sur le fait que le rectorat d'Aix-Marseille doit changer d'attitude vis-à-vis des départements alpins. Nous avons déjà déploré un refus de dialogue concernant l'éducation prioritaire, au motif que ce sujet n'intéressait pas du tout les départements alpins. Aujourd'hui, quand je compare la publicité faite autour de CAP d'ébénisterie, par exemple par le rectorat de Grenoble, sur des sites comme Aubenas en Ardèche ou Bourgoin-Jallieu en Isère, qui ne sont pourtant pas au centre de l'agglomération de Grenoble, avec l'absence totale de promotion de la part du rectorat d'Aix-Marseille, j'en viens à espérer que le Gouvernement, grâce à cette question, incite le rectorat d'Aix-Marseille à mieux prendre en compte des départements qui, s'ils n'étaient pas dans son académie à l'origine, aimeraient bien y trouver leur place car ils existent réellement.

Données clés

Auteur : M. Joël Giraud

Type de question : Question orale

Rubrique : Enseignement technique et professionnel

Ministère interrogé : Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche

Ministère répondant : Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 17 mars 2015

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