Instauration mécanisme de "tiers payant" pour l'emploi à domicile
Question de :
Mme Gisèle Biémouret
Gers (2e circonscription) - Nouvelle Gauche
Mme Gisèle Biémouret interroge Mme la ministre des solidarités et de la santé sur le projet d'instauration d'un "tiers payant" dans les services à domicile. Quatre fédérations nationales de l'emploi à domicile représentant plusieurs centaines de milliers d'emplois (UNA, ADMR, Adessa Domicile et FNAAFP/CSF) adhèrent au principe d'une mesure basée sur un mécanisme de trésorerie s'inspirant du dispositif de l'affacturage et de la mobilisation de leurs créances par les entreprises. À présent, les délais de constatation et de remboursement du crédit d'impôt pour encourager les emplois à domicile dissuadent de nombreux ménages faute de pouvoir avancer la trésorerie nécessaire. Concrètement, la mesure permettrait aux employeurs particuliers de mobiliser auprès des banques une partie - a priori la moitié - de la créance que constitue le futur crédit d'impôt, afin de pouvoir recourir à des services à domicile. Au bout du délai habituel de 12 à 18 mois, l'État rembourserait le crédit d'impôt non pas au particulier employeur, mais à la banque. De ce fait, les particuliers n'auraient plus à avancer que la moitié du coût de l'emploi à domicile, la banque et l'État faisant office de "tiers payant", sans dépense budgétaire nouvelle. Bénéfique à plusieurs titres, ce mécanisme permettrait de redonner du pouvoir d'achat aux 4,5 millions de Français faisant appel chaque année aux services à la personne, relancerait l'activité du secteur confronté depuis plusieurs années à une crise persistante, participerait à la lutte contre le travail au noir et créerait environ 200.000 emplois supplémentaires. Cette mesure concernerait tous les modes d'intervention : particulier employeur, entreprise commerciale ou non lucrative et service public territorial. Elle souhaiterait savoir si le Gouvernement envisagerait la possibilité d'avancer une telle mesure dans le cadre d'un projet de loi permettant aux banques ou à un établissement public de mobiliser les créances fiscales d'un ménage dans le cadre du recours à un emploi à domicile.
Réponse publiée le 28 novembre 2017
Le secteur des services à la personne, qui représente 1,4 million de professionnels et 880 millions d'heures travaillées en 2015 est un secteur dynamique de l'économie française. Très attendu pour répondre aux besoins de nos concitoyens en termes d'accompagnement tout au long de la vie (garde d'enfants, accompagnement dans la vie quotidienne, assistance dans la dépendance), il bénéficie d'un potentiel d'emplois important pour les prochaines décennies. Au vu de son importance pour l'emploi et la conciliation de la vie familiale et professionnelle, ce secteur bénéficie d'un soutien considérable de la part des pouvoirs publics. Ce soutien a été encore renforcé ces dernières années. En effet, plusieurs mesures sont entrées en vigueur depuis le 1er janvier 2017 : - L'instauration d'un crédit d'impôt sur la taxe sur les salaires (CITS) à destination des entreprises non lucratives (associations) équivalent à 4 % de la masse salariale pour des salaires n'excédant pas 2,5 Smic ; - L'augmentation du taux du crédit d'impôt pour la compétitivité des entreprises (CICE) de 6 à 7 % ; - Et surtout l'extension de crédit d'impôt sur le revenu à tous les ménages. La loi de finances rectificative pour 2015 avait déjà porté à deux euros la réduction forfaitaire de cotisations par heure travaillée au bénéfice des particuliers employeurs. A l'avenir, les services à la personne bénéficieront à plein du basculement du CICE en allègements de cotisations sociales puisque celui-ci sera renforcé au niveau du Smic. Or, de nombreux salariés sont employés à ce niveau de rémunération dans ces activités. Le crédit d'impôt services à la personne (4,5 Mds€), comme le crédit d'impôt garde d'enfant à l'extérieur du domicile (1,2 Md€), qui représentent la moitié de l'effort financier pour ce secteur sont perçus par les ménages l'année suivant celle de la dépense. Ce décalage temporel d'un an de l'avantage fiscal peut contribuer effectivement à limiter la visibilité de l'aide apportée à ce secteur, et surtout ne facilite pas la juste perception du reste à charge par les usagers. Le Gouvernement partage avec les fédérations professionnelles l'objectif de favoriser une meilleure perception du reste à charge pour les usagers, ce qui peut passer par un rapprochement de l'aide apportée par le crédit d'impôt à la dépense réalisée. Une telle mesure soulève cependant de fortes difficultés budgétaires et techniques qui doivent être levées avant de lancer de tels projets. Du point de vue budgétaire, rendre immédiat l'avantage fiscal double les dépenses de l'État afférentes au crédit d'impôt l'année de sa mise en oeuvre, puisqu'il convient de verser les crédits d'impôt de l'année en cours et ceux de l'année écoulée. Cela se traduirait donc par un surcoût pour les finances publiques mécanique de 5,7 Mds€ l'année de la transition. Ce coût ne peut être négligé. Du point de vue technique, une telle disposition doit couvrir l'ensemble du secteur des services à la personne sans introduire de distorsion entre les modes de recours ou les publics. En outre, elle ne doit pas se traduire pour les bénéficiaires, notamment les plus fragiles d'entre eux, par une complexité supplémentaire ou des frais de gestion potentiellement substantiels. Différents scénarios sont ainsi actuellement à l'étude.
Auteur : Mme Gisèle Biémouret
Type de question : Question écrite
Rubrique : Emploi et activité
Ministère interrogé : Solidarités et santé
Ministère répondant : Économie et finances
Dates :
Question publiée le 3 octobre 2017
Réponse publiée le 28 novembre 2017