Question écrite n° 15843 :
Coopération en matière de défense - France - Royaume-Uni

15e Législature
Question signalée le 2 décembre 2019

Question de : M. Grégory Besson-Moreau
Aube (1re circonscription) - La République en Marche

M. Grégory Besson-Moreau attire l'attention de Mme la ministre, auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes, sur le traité de coopération de Lancaster House unissant la France et le Royaume-Uni. À l'heure d'un divorce qui s'annonce complexe et à l'approche du vote des députés britanniques sur le texte négocié par le Premier ministre britannique, le sujet de la coopération en matière de sécurité et de défense est crucial. En effet, la coopération avec le Royaume-Uni doit demeurer étroite pour les problèmes de sécurité intérieure, et particulièrement la lutte contre le terrorisme. Il s'agit d'un réel enjeu de coopération afin de maintenir les échanges d'informations avec les agences européennes en charge de la coopération policière (EUROPOL) et judiciaire (EUROJUST). Dans l'actuel contexte de tensions dans le monde et en Europe, il lui demande comment le Gouvernement entend défendre et protéger la coopération stratégique initiée entre la France et le Royaume-Uni en 2010 par le traité de Lancaster House.

Réponse publiée le 5 mai 2020

1- La négociation entre l'Union européenne et le Royaume-Uni sur leurs relations futures d'une part et la relation bilatérale entre la France et le Royaume-Uni dans le cadre du traité de Lancaster House d'autre part, constituent deux sujets bien distincts qui n'ont pas vocation à interférer l'un sur l'autre. 2- Entré en vigueur le 31 janvier 2020, l'accord de retrait a permis une sortie ordonnée du Royaume-Uni de l'Union, intégrant une période de transition jusqu'au 31 décembre 2020 au moins, pendant laquelle droit de l'Union continue de s'appliquer. Cette période doit permettre de définir les termes du futur partenariat entre l'Union et le Royaume-Uni devenu Etat tiers, dans le cadre d'une négociation entre les deux parties. La coopération en matière de sécurité figure parmi les principaux volets de cette négociation, engagée le 2 mars 2020. En vue de ces négociations, l'Union a défini ses principes et objectifs à travers l'adoption par le Conseil, le 25 février dernier, d'un mandat qui fixe la feuille de route de l'équipe de négociation européenne, conduite par Michel Barnier au sein de la Commission européenne. En matière de sécurité, ce mandat envisage la mise en place d'« un partenariat étendu, complet et équilibré », tenant compte « de la proximité géographique et de l'évolution des menaces, parmi lesquelles figurent la grande criminalité internationale, la criminalité organisée, le terrorisme, les cyberattaques, les campagnes de désinformation, les menaces hybrides, l'érosion de l'ordre international fondé sur des règles et la résurgence de menaces de nature étatique ». Le partenariat ainsi souhaité se décline à la fois dans sa dimension externe à travers la coopération dans le domaine de la politique étrangère, de sécurité et de défense et dans sa dimension intérieure, sur le plan de la coopération policière et judiciaire en matière pénale, y compris à travers une coopération opérationnelle avec les agences Europol et Eurojust, « conformément aux arrangements visant la coopération avec des pays tiers définis dans la législation pertinente de l'Union ». Le 18 mars 2020, la Commission a publié un projet d'accord qui précise ces orientations. Ce projet consacre une partie entière à la coopération en matière de sécurité, couvrant la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme, la cybersécurité et la question des échanges de données (Passenger Name Record, Prüm). Deux chapitres sont dédiés à la coopération avec Europol et Eurojust. Parallèlement, ce projet prévoit des dispositions en matière de politique étrangère, de sécurité et de défense, ouvrant la possibilité d'une association aux missions et opérations de l'Union ainsi que des dispositions en matière de sanctions, d'échange de renseignements, de coopération dans le domaine spatial et de développement des capacités de défense. 3- Au Royaume-Uni, le gouvernement a publié un document intitulé « The Future Relationship with the EU – the UK's Approach to Negotiations », qui présente les orientations et objectifs de la partie britannique dans ses négociations avec l'Union européenne. La partie britannique s'y déclare favorable à une coopération en matière policière et judiciaire sous certaines conditions. Le Royaume-Uni n'envisage en revanche pas de dispositions institutionnalisées en matière de politique étrangère, de sécurité et de défense, au contraire de l'Union. 4- Les positions de départ sont ainsi différentes. A l'issue de la première session de négociation du 2 au 5 mars 2020, Michel Barnier a ainsi souligné la difficulté que posait, pour la coopération judiciaire et policière en matière pénale, le refus britannique de s'engager formellement à continuer à appliquer la Convention européenne des droits de l'Homme et de reconnaître le rôle de la CJUE dans l'interprétation du droit européen. 5- Pour ce qui la concerne, la France restera engagée en faveur de la concrétisation d'un partenariat à la hauteur des défis communs en matière de sécurité, qui soit à la fois ambitieux et respectueux du droit de l'Union et des principes définis par les chefs d'Etat ou de gouvernement des 27 depuis le début des négociations avec le Royaume-Uni. 6- S'agissant de la relation bilatérale entre la France et le Royaume-Uni, les accords de Lancaster House de 2010 consacrent le partenariat stratégique entre les deux pays, dont ils demeurent la pierre angulaire. Ces traités ont permis de nombreuses avancées permettant de renforcer nos capacités collectives et favorisant l'intégration de nos forces armées, de nos services de renseignement et de nos organes diplomatiques et de développement. Dans la relation bilatérale que nous souhaitons préserver, la France et le Royaume-Uni doivent poursuivre sur cette voie, équilibrée, y compris sur les sujets sensibles. C'est leur intérêt et leur volonté partagée, en matière de défense et de sécurité. Le Royaume-Uni et la France sont les deux plus grandes puissances européennes en matière de défense, dotées de forces de dissuasion nucléaire indépendantes et, en termes de projection, d'un éventail complet de forces armées en mesure de se déployer et d'opérer dans le monde, seules ou avec leurs Alliés et partenaires, sur terre, en mer, dans les airs et, de plus en plus, dans le cyberespace. Le 10ème anniversaire des traités de Lancaster House à l'occasion du prochain sommet bilatéral prévu en France permettra de marquer un nouveau départ en relançant ce partenariat ancré dans la durée, dans le prolongement du précédent sommet de Sandhurst qui s'était tenu en janvier 2018. C'est avec cette ambition que la France et le Royaume-Uni y travaillent, également déterminés à approfondir leurs capacités conjointes, leur coopération opérationnelle et la coordination de leurs politiques, comme en témoigne la montée en puissance de la Force expéditionnaire commune interarmées (CJEF) qui devrait être pleinement opérationnelle cette année. Le Royaume-Uni reste ainsi un partenaire bilatéral essentiel, notamment en matière de défense, de sécurité et de renseignement avec lequel nous entendons continuer à développer des liens de confiance.

Données clés

Auteur : M. Grégory Besson-Moreau

Type de question : Question écrite

Rubrique : Défense

Ministère interrogé : Affaires européennes

Ministère répondant : Affaires européennes

Signalement : Question signalée au Gouvernement le 2 décembre 2019

Dates :
Question publiée le 15 janvier 2019
Réponse publiée le 5 mai 2020

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