Inspection des ESAT
Question de :
M. Ian Boucard
Territoire de Belfort (1re circonscription) - Les Républicains
M. Ian Boucard attire l'attention de Mme la secrétaire d'État, auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées, concernant l'inspection des établissements et services d'aide par le travail (ESAT). En effet, le Gouvernement a mandaté l'inspection générale des finances (IGF) ainsi que l'inspection des affaires sociales (IAS) pour interroger le modèle existant des 1 300 ESAT et leurs principes fondateurs qui accompagnent plus de 120 000 personnes handicapées. Les deux services d'inspection auront pour mission, à la fois, de répertorier le mode de fonctionnement des ESAT et d'évaluer s'il est un levier ou un frein à l'insertion en milieu ordinaire des travailleurs accompagnés. Les rapports des inspections devront présenter des scénarios d'évolution et faire état des dispositifs qui pourraient être mis en place afin de mieux répondre à l'objectif d'inclusion et d'individualisation des personnes en milieu ordinaire. Cependant, en à peine trois mois, l'IGF et l'IAS devront à la fois remettre une évaluation chiffrée au Gouvernement et proposer des modifications quant au fonctionnement des ESAT alors même que les réformes du développement de l'emploi accompagné et de la réforme de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés, entrées en vigueur récemment, n'ont pas encore pu produire tous leurs effets. Dans ce délai, les inspecteurs ne pourront pas être à même d'envisager le futur des ESAT qui s'inquiètent de ce calendrier resserré et des intentions du Gouvernement quant à l'évolution de ces établissements, qui permettent aujourd'hui un accompagnement par le travail de personnes lourdement handicapées ou souffrant de plusieurs handicaps. L'accès au milieu ordinaire de travail supporte déjà un désengagement financier de l'État à la charge de l'assurance maladie à hauteur de 1,5 milliards d'euros et cette démarche laisse planer le doute quant à l'orientation que le Gouvernement souhaite donner aux ESAT. Ces établissements restent des acteurs essentiels aux politiques de soutien à l'emploi et sont des interlocuteurs reconnus des entreprises. Ils développent les compétences de chaque personne accueillie et rétablissent une égalité des chances en matière d'accès à l'emploi. Le secteur protégé ne peut pas être analysé uniquement sous une lecture comptable. Ces établissements sont des lieux d'inclusion par le travail et forcer les personnes accueillies à intégrer le monde de l'entreprise ordinaire fait courir le risque d'accroître le nombre de travailleurs handicapés au chômage. C'est pourquoi il lui demande quelle est sa vision du secteur protégé pour les années à venir.
Réponse publiée le 31 mars 2020
Le gouvernement a lancé, au terme de 18 mois de concertation avec l'ensemble des acteurs, une ambitieuse stratégie pour l'emploi des personnes handicapées, qui vise à infléchir le double constat d'une prévalence du chômage des personnes handicapées deux fois supérieure à la moyenne nationale de la population nationale et d'un développement de l'exclusion et de la désinsertion professionnelle pour les personnes dont le handicap survient au cours de la vie (80% des cas). La construction de parcours professionnels diversifiés et l'accès au milieu ordinaire de travail par un accompagnement tant des personnes handicapées que de leurs employeurs est donc au coeur de cette politique. A cet égard, le Gouvernement n'ignore pas la contribution majeure actuelle des établissements et service d'aide par le travail (ESAT) à la socialisation et à la professionnalisation de près de 120 000 personnes en situation de handicap. La transformation de l'offre médico-sociale doit aussi se décliner dans le secteur des ESAT, en articulation avec les chantiers lancés par le Gouvernement, qui trouvent une partie de leur traduction dans la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel visant notamment à développer les compétences professionnelles des personnes handicapées, en particulier par un accès facilité à l'apprentissage et une amélioration significative du régime du compte personnel de formation pour les travailleurs handicapés en ESAT. La mission conduite par l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et l'Inspection générale des finances (IGF) a été diligentée dans cet esprit. Dans ses conclusions, la mission réaffirme que l'accompagnement des personnes handicapées par le travail en milieu institutionnel demeure pertinent et doit être maintenu et consolidé par des mesures permettant de mieux répondre aux besoins d'autonomie sociale et professionnelle des personnes en ESAT ou ayant vocation à y travailler en raison d'une capacité de travail réduite. Elle préconise, en outre, une plus grande ouverture des ESAT vers le milieu ordinaire de travail, à la fois pour sécuriser des transitions professionnelles dans lesquelles s'engagent certains de leurs anciens travailleurs, mais aussi pour mettre leur expertise à la disposition des employeurs publics et privés qui recrutent directement des personnes handicapées, mais qui sont demandeurs d'un appui-conseil adapté pour ces personnes afin de lever tout risque de rupture anticipée du contrat de travail et de contribuer ainsi à leur maintien en emploi. Les 37 propositions de la mission IGAS-IGF couvrent l'ensemble du champ d'intervention qui a vocation à être imparti aux ESAT et sont actuellement en cours d expertise. Il est donc à ce jour tout à fait prématuré de tirer des conclusions ou d'évoquer des orientations qui n'existent pas, et qui lorsque le temps sera venu, feront l'objet de concertation avec le secteur. En tout état de cause, le Gouvernement est attaché à développer l'accompagnement vers et dans l'emploi des personnes handicapées, à mobiliser les employeurs à cet effet et à lever les freins à des parcours diversifiés, en particulier en matière de ressources et d'avantages connexes. Le 11 février 2020, la conférence nationale du handicap a d'ailleurs acté une mesure incitative forte visant à lever un frein au passage en milieu ordinaire des travailleurs d ESAT, le relèvement du plafond de la quotité de travail (au-delà du mi-temps) ouvrant droit à une restriction substantielle et durable en emploi (RSDAE) et au maintien d une AAH différentielle lors d une sortie en milieu ordinaire, qui répond à la double nécessité d'inciter les travailleurs d ESAT à occuper un emploi et d alléger la dépense de l Etat (P 157) en matière d'aide au poste et d AAH en renforçant la part « salaire » des ressources disponibles.
Auteur : M. Ian Boucard
Type de question : Question écrite
Rubrique : Personnes handicapées
Ministère interrogé : Personnes handicapées
Ministère répondant : Personnes handicapées
Dates :
Question publiée le 2 juillet 2019
Réponse publiée le 31 mars 2020