Ressources informatiques des petites communes rurales
Question de :
M. Michel Larive
Ariège (2e circonscription) - La France insoumise
M. Michel Larive attire l'attention de Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales sur la menace qui pèse sur l'accès aux ressources informatiques des petites communes rurales. L'Agence de gestion et de développement informatique (AGEDI) est une structure qui offre à un coût proportionné, par rapport au budget des plus petites communes, un accès à des logiciels informatiques nécessaires à la gestion quotidienne des affaires locales. C'est un interlocuteur de référence et de confiance dans le domaine du numérique pour 10 % des communes françaises et pour plus de 6 500 collectivités territoriales en France. Pourtant, l'administration publique a décidé de l'assujettir à l'impôt sur les sociétés, et ce, rétroactivement. Il s'agit d'une procédure de redressement fiscal qui va condamner le syndicat à disparaître sur le court terme. Dans un premier temps, M. le député s'oppose au principe d'une telle décision, qui va à l'encontre de la bonne santé financière des communes. En effet, la disparition d'un tel syndicat amènerait une augmentation des coûts informatiques des communes de l'ordre d'une multiplication par cinq, voire par dix. Dans un second temps, il rappelle que l'AGEDI est un syndicat mixte constitué de collectivités territoriales. De ce fait, il ne saurait être assujetti à l'impôt sur les sociétés, en vertu de l'article 207 1-6 du code général des impôts. De plus, si l'on se réfère à la règle des 4 P (prix, produit, place, promotion) qui détermine si une association est soumise ou non aux impôts commerciaux, il apparaît les éléments suivants : l'AGEDI ne construit pas un prix par rapport à un marché, elle met à disposition gracieusement ses produits, elle place ses produits hors du marché des grands éditeurs privés de logiciels et ne propose pas de promotion de type démarchage commercial. Ainsi, soumettre l'AGEDI à une telle imposition est contestable et relève en réalité du choix politique de réduction drastique des dépenses publiques. Cette politique menace déjà largement le bloc communal, qui a vu se réduire la dotation globale de fonctionnement pendant que de nouvelles compétences lui étaient transférées. Mais elle ne saurait se répandre au mépris des règles d'imposition des établissements publics administratifs et au point d'impacter en profondeur la bonne administration des communes, un échelon fondamental pour le milieu rural. Dans l'Ariège, de nombreux maires de communes (Saint-Girons, Prat-Bonrepaux, Arrien-en-Bethmale, Fabas, Cerizols, Castillon-en-Couserans, Teilhet, Erp, Lacourt, Alos, Le Peyrat, Montjoie-en-Couserans, Tarascon, Labastide-sur-l'Hers) ont d'ailleurs directement fait part de leurs inquiétudes à M. le député. Alors que le Président de la République Emmanuel Macron faisait de la réduction de la « fracture numérique » une de ses promesses de campagne, il lui demande comment elle justifie cette décision administrative, dont elle ne saurait ignorer les conséquences pratiques pour la vie quotidienne des administrés.
Réponse publiée le 7 janvier 2020
Pour des raisons tenant au secret professionnel prévu à l'article L.103 du livre des procédures fiscales (LPF), il n'est pas possible de communiquer des informations relatives à la situation de l'agence de gestion et de développement informatique (AGEDI). Les précisions suivantes peuvent néanmoins être apportées s'agissant des règles d'assujettissement aux impôts commerciaux des collectivités et établissements publics. Conformément aux dispositions combinées du 1 de l'article 206 et de l'article 1654 du code général des impôts (CGI) ainsi que de l'article 165 de l'annexe IV au CGI, sont passibles de l'impôt sur les sociétés (IS) les établissements publics ainsi que les organismes de l'État et des collectivités territoriales jouissant de l'autonomie financière réalisant des opérations à caractère lucratif. S'agissant de la nature des activités exercées par les organismes de droit public, les critères de lucrativité dégagés par la jurisprudence du Conseil d'État sont repris par la doctrine administrative (Bulletin Officiel des Finances Publiques (BOFiP) - Impôts, BOI-IS-CHAMP-10-50-10-20). Ainsi, sous réserve de la condition tenant au caractère désintéressé de la gestion de ces organismes, qui est présumée remplie pour les organismes de droit public, le caractère lucratif d'une activité s'apprécie en analysant le produit proposé, le public visé, les prix pratiqués ainsi que la publicité réalisée (méthode dite des « 4 P »). Par conséquent, un organisme de droit public doit être soumis à l'IS s'il exerce une activité concurrentielle dans des conditions similaires à celles d'une entreprise commerciale (CE, 30 juin 2016 n° 382975, centre départemental de Méjannes-le-Clap ; CE, 28 janvier 2015 n° 371501, syndicat mixte de l'aéroport de Saint-Brieuc Armor ; CE, 20 juin 2012 n° 341410, Commune de la Ciotat). Toutefois, lorsqu'ils se livrent à une exploitation lucrative, les régions et les ententes interrégionales, les départements et les ententes interdépartementales, les communes, les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, les syndicats de communes et les syndicats mixtes constitués exclusivement de collectivités territoriales ou de groupements de ces collectivités, ainsi que leurs régies de services publics, bénéficient d'une exemption formelle d'IS, en application du 6° du 1 de l'article 207 du CGI. Conformément à la jurisprudence du Conseil d'État (CE, 16 janvier 1956 n° s 13019, 15018 et 15019 ; CE, 7 mars 2012 n° 331970, Commune de Saint-Cyprien), cette exonération ne s'applique qu'au titre de l'exécution d'un service public indispensable à la satisfaction des besoins collectifs de la population. Ainsi, demeurent imposables les structures qui exploitent des services à caractère industriel et commercial non indispensables à la satisfaction des besoins collectifs des habitants au sens de la jurisprudence du Conseil d'État. La direction générale des finances publiques (DGFiP) veille, dans le strict respect des procédures prévues par le LPF, à la correcte application de ces règles, sous le contrôle du juge de l'impôt.
Auteur : M. Michel Larive
Type de question : Question écrite
Rubrique : Impôt sur les sociétés
Ministère interrogé : Cohésion des territoires et relations avec les collectivités territoriales
Ministère répondant : Action et comptes publics
Dates :
Question publiée le 9 juillet 2019
Réponse publiée le 7 janvier 2020