Question de : M. Michel Larive
Ariège (2e circonscription) - La France insoumise

M. Michel Larive interroge Mme la ministre de la transition écologique et solidaire sur devenir des trains de nuit. Force est de constater que les intercités de nuit (ICN) ont été progressivement délaissés depuis les années 2000. Avec la fermeture des lignes Paris-Savoie, Luxembourg-Nice, Paris-Hendaye et Paris-Nice entre 2014 et 2017, il ne reste plus aujourd'hui que deux lignes en service aujourd'hui : les lignes Paris-Briançon et Paris-Rodez/Latour de Carol. L'abandon de ce mode de transport aurait été justifié par une baisse importante de la fréquentation des ICN, qui ne concerneraient que 3 % des voyageurs, selon le rapport du conseil d'orientation des infrastructures, paru en janvier 2018. Mais cette lecture semble biaisée, car la diminution du nombre total de voyageurs peut très bien s'expliquer par la réduction drastique du nombre de trains mis en circulation. En termes de taux d'occupation en revanche, les ICN afficheraient un meilleur taux moyen que les autres intercités et que les TER (50 % contre respectivement 42 % et 25 %). L'autre argument évoqué est le déficit important des lignes de trains de nuit. Les recettes de l'ICN Paris-Rodez/Latour de Carol ne couvriraient que 43 % des charges, et celles de la ligne Paris-Briançon seulement 22 %. Le rapport susmentionné estime que « le déficit des lignes de nuit représente environ 25 % du déficit de l'ensemble des lignes TET » (Trains d'équilibre du territoire). Mais il est possible d'objecter que cette manière de voir ne tient pas compte des dépenses d'investissement. En effet le même rapport indique que « le TGV c'est 38 % des dépenses d'investissement depuis 25 ans pour 2 % des usagers.» Par ailleurs le déficit peut être qualifié de structurel et il concerne tous les trains conventionnés, et les transports publics en général. Le rapport de la Cours des comptes de juillet 2014 mentionnait en outre que l'activité TET était l'activité conventionnée la moins subventionnée, et que son déficit n'était « que » de 25 %, quand celui des TER était de 65 %, et celui du Transilien de 62 %. De plus il faut comparer les lignes selon le coût par voyageur et par kilomètre parcouru, car les lignes d'ICN font de 600 à plus de 1 000 km, quand la distance moyenne parcourue en intercités de jour (ICJ) n'était que de 136 km en 2015. Le collectif « Oui au trains de nuit » a publié un graphique comparant le montant moyen des subventions accordées par voyageur pour 100 km. Il met en évidence que les ICN ne coûtent que 18 euros quand les ICJ en coûtent 23 euros et les TER 30 euros. Vu sous cet angle, les ICN ne représentent pas une si grande charge que cela. Les trains de nuit répondent à une demande importante, contribuent largement à désenclaver les territoires, et constituent un moyen efficace de lutter contre le réchauffement climatique. Mme la ministre des transports avait d'ailleurs déclaré à l'Assemblée nationale le 11 avril 2018 que les ICN « sont une bonne solution pour l'accessibilité des territoires ». Le 22 septembre 2018, elle avait tweeté : « Oui, les trains de nuit ont de l'avenir ! ». Tout récemment le 3 septembre 2019, dans le cadre d'une réunion de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, sur le projet de loi d'orientation des mobilités, Mme la ministre a réaffirmé l'engagement du Gouvernement « à maintenir les deux lignes encore existantes : Paris-Briançon et Paris-Rodez-Latour-de-Carol. » Répondant à M. le député, elle a aussi déclaré que les « conventions seront renouvelées au-delà du terme prévu en 2020 », et que des investissements seront réalisés dès cette année à hauteur de « 30 millions d'euros pour remettre ces trains en état ». Enfin, elle a évoqué l'ouverture à la concurrence comme un moyen important pour relancer ces services de trains de nuit, affirmant que certains opérateurs avaient déjà manifesté leur intérêt. Il lui demande comment a été calculé le montant de l'enveloppe de 30 millions d'euros proposée pour la remise en état des trains utilisés sur les ICN. Il souhaiterait aussi comprendre par quels mécanismes l'ouverture à la concurrence doit permettre un nouveau développement de ces lignes et quels sont les principaux atouts des trains de nuits pour attirer de nouveaux opérateurs.

Réponse publiée le 9 mars 2021

Le Gouvernement partage la conviction que le train de nuit peut constituer une offre de transport utile pour répondre à des enjeux forts d'aménagement du territoire, du fait notamment de l'absence d'alternative, et une offre écologique et sociale pour effectuer de longues distances. Elle est aujourd'hui trop réduite en France avec seulement cinq dessertes, dont trois internationales et deux conventionnées par l'État. Les préoccupations de la société, en particulier environnementales, modifient le contexte qui a prévalu jusqu'à présent et qui a conduit à la quasi-disparition des trains de nuit en France. Dans ce nouveau contexte, le Gouvernement est décidé à agir. Cela se matérialise tout d'abord par l'engagement à maintenir, malgré des difficultés d'exploitation, les deux lignes Paris-Briançon et Paris-Rodez/Toulouse-Latour-de-Carol/Cerbère qui ne bénéficient pas d'offres alternatives, et à rénover leur matériel pour un montant d'environ 44 millions d'euros financé par l'État. Le Gouvernement s'est engagé à poursuivre le conventionnement de ces deux lignes au-delà de l'échéance de la convention d'exploitation actuelle signée entre l'État et la SNCF. C'est ainsi bien l'ensemble des voitures Corail aptes au service qui seront rénovées. Leur durée de vie pourra être prolongée d'une dizaine d'années avant de laisser la place à un nouveau matériel roulant. Ensuite, le Gouvernement s'est engagé à ouvrir deux nouvelles branche, grâce au plan de relance : Paris-Nice (cette année) et Paris-Tarbes (en 2022). Sur les 100 millions d'euros consacrés, une partie permettra d'engager le renouvellement du matériel roulant existant, voire l'achat de nouvelles rames pour développer un réseau européen plus vaste à long terme. Des réflexion sur un maillage plus dense du territoire sont aussi menées. À ce titre, la loi d'orientation des mobilités prévoit la remise d'un rapport au Parlement devant présenter les conditions d'amélioration de l'offre de trains de nuit en France et lé dfinition de corridors essentiels. Leurs conditions d'exploitation, notamment en termes de matériel roulant, sont aussi étudiées. Il sera transmis à la représentation nationale début de cette année. Enfin, l'ouverture à la concurrence permet à tout nouvel opérateur d'exploiter librement des services de transport ferroviaire de voyageurs. Certaines liaisons de nuit pourraient ainsi intéresser de nouveaux entrants notamment dans le cadre de liaisons internationales.

Données clés

Auteur : M. Michel Larive

Type de question : Question écrite

Rubrique : Transports ferroviaires

Ministère interrogé : Transition écologique et solidaire

Ministère répondant : Transports

Dates :
Question publiée le 1er octobre 2019
Réponse publiée le 9 mars 2021

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