Ouïghours : l'impérative défense des droits humains
Question de :
Mme Clémentine Autain
Seine-Saint-Denis (11e circonscription) - La France insoumise
Mme Clémentine Autain appelle l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la persécution des Ouïghours par le gouvernement chinois, et sur la logique concentrationnaire dont ils sont victimes. Entre 2017 et 2019, ils auraient été plus de 80 000 prisonniers à avoir été transférés dans des usines qui appartiennent aux chaînes d'approvisionnement de quatre-vingt-trois grandes multinationales pour y travailler de force. Le rapport de l'Aspi qui documente cette exploitation de masse cite par exemple des marques telles qu'Apple, Sony ou Nike. Alors que Pékin dénonce cette enquête en évoquant des « centres de formation professionnelle » ou encore des politiques de « rééducation par le travail », les marques concernées se défaussent sur la responsabilité de leurs sous-traitants. Cette exploitation intervient dans le contexte plus général d'un internement de masse de près de deux millions de Ouïghours dans la région autonome du Xinjiang : stérilisations et avortements forcés, scènes de tortures, rétentions arbitraires, lavages de cerveau. En agitant la menace terroriste, le gouvernement chinois tente d'endoctriner toute une population musulmane par l'internement concentrationnaire et la répression. Elle l'interpelle donc sur la faiblesse de la voix française pour condamner ces agissements qui foulent du pied les droits humains les plus élémentaires ; le silence du Président de la République à ce sujet, lors de sa visite en Chine début novembre 2019, est le signe d'une diplomatie diminuée qui n'a plus que la signature de contrats pour boussole.
Réponse publiée le 26 mai 2020
La France a exprimé à plusieurs reprises ses préoccupations à l'égard de la situation des droits de l'Homme au Xinjiang, à la fois dans le cadre de ses contacts bilatéraux avec les autorités chinoises et dans les enceintes de l'ONU telles que le Conseil des droits de l'Homme. La France a réagi le 27 novembre 2019 aux témoignages et documents relayés par la presse faisant état de l'existence d'un système de camps d'internement au Xinjiang et d'une politique de répression à grande échelle dans cette région. La France et l'Union européenne s'expriment régulièrement sur ce sujet dans le cadre des Nations unies. Ainsi, lors de l'examen périodique universel de la Chine le 6 novembre 2019, la France a adressé deux recommandations aux autorités chinoises portant sur le Xinjiang : "mettre en œuvre l'ensemble des recommandations du comité pour l'élimination de la discrimination raciale (CERD) du 31 août 2018 sur le Xinjiang, notamment mettre fin aux internements massifs dans des camps dans cette région, et inviter le Haut-commissariat des Nations unies aux droits de l'Homme (HCDH) et les procédures spéciales à s'y rendre" ; et "garantir la liberté religieuse et de croyance, y compris au Tibet et au Xinjiang". Ces messages sont aussi portés par la France et l'Union européenne au Conseil des droits de l'Homme (CDH). Lors de sa 43ème session, le 10 mars 2020, la France a appelé dans sa déclaration nationale sous point 4 ("Situations relatives aux droits de l'Homme qui requièrent l'attention du Conseil") les autorités chinoises à mettre un terme aux détentions de masse au Xinjiang. Dans sa déclaration sous point 4 prononcée le même jour, le représentant de l'UE a également appelé la Chine à autoriser un accès substantiel au Xinjiang pour les observateurs indépendants et pour la Haute Commissaire aux droits de l'Homme. Le 29 octobre 2019, la France a signé, comme de nombreux autres pays européens, la déclaration transrégionale prononcée dans le cadre du dialogue interactif avec le comité de l'ONU de lutte contre la discrimination raciale (CERD) organisé au cours des travaux de la 3e Commission de l'Assemblée générale des Nations unies, portant spécifiquement sur le Xinjiang et demandant à la Chine de respecter le droit international et de mettre en œuvre les recommandations adoptées par ce même comité (CERD) en août 2018, y compris concernant les détentions arbitraires. Les contacts bilatéraux sont également l'occasion de soulever ces sujets auprès de nos interlocuteurs chinois. A ce titre, la situation des droits de l'Homme en Chine a fait l'objet d'un dialogue franc lors de la visite du Président de la République en Chine du 4 au 6 novembre 2019. Par ailleurs, la France participe de manière active à la préparation du Dialogue UE-Chine sur les droits de l'Homme, dont la dernière session s'est tenue en avril 2019 et qui a permis d'aborder la situation des droits de l'Homme au Xinjiang. La France entretient des échanges réguliers et constructifs avec les ONG de défense des droits de l'Homme, particulièrement en la personne de l'ambassadeur pour les droits de l'Homme qui s'est rendu en Chine en octobre 2018 et a pu s'entretenir à la fois avec des responsables chinois et des membres de la société civile au sujet de la situation des droits de l'Homme au Xinjiang.
Auteur : Mme Clémentine Autain
Type de question : Question écrite
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères
Ministère répondant : Europe et affaires étrangères
Dates :
Question publiée le 17 mars 2020
Réponse publiée le 26 mai 2020