Question écrite n° 28330 :
Invoquer la force majeure pour les entreprises durant la crise sanitaire

15e Législature

Question de : Mme Josiane Corneloup
Saône-et-Loire (2e circonscription) - Les Républicains

Mme Josiane Corneloup attire l'attention de Mme la ministre du travail sur la situation de certaines entreprises qui doivent interrompre leur activité pour raison sanitaire. Les déclarations du Gouvernement soulignent qu'est éligible au dispositif de chômage partiel toute entreprise qui subit une fermeture administrative ou une baisse d'activité. Elle lui demande de bien vouloir lui préciser si les entreprises qui sont frappées d'une fermeture administrative ou d'une suspension d'activité pour raison sanitaire, les empêchant alors d'honorer leurs engagements contractuels vis-à-vis de leurs clients, pourront invoquer la force majeure.

Réponse publiée le 25 août 2020

Depuis l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, la force majeure est définie à l'article 1218 du code civil, qui reprend la définition qu'en donnait jusqu'alors la jurisprudence. Il s'agit, quelle que soit la nature du contrat, public ou privé, d'un événement qui n'a pu être prévu par les parties au moment de la conclusion du contrat, qui échappe au contrôle des parties et qui a pour effet d'empêcher une partie d'exécuter son obligation. Si l'épidémie de Covid-19 et les mesures de fermeture administrative peuvent être considérées comme des événements imprévisibles et extérieurs aux entreprises, l'impossibilité d'exécuter leurs contrats doit en revanche être appréciée au cas par cas pour déterminer si l'exécution de ses obligations contractuelles par une entreprise est absolument impossible et pas seulement rendue plus difficile. L'inexécution ne doit pas pouvoir être surmontée par des mesures appropriées. Si les parties ne parviennent pas à s'accorder sur la qualification de force majeure de la situation à laquelle elles sont confrontées, c'est au juge qu'il appartiendra de trancher. La force majeure, si elle est retenue, a pour effet d'exonérer l'entreprise empêchée de sa responsabilité à l'égard de son créancier pour le préjudice causé par l'inexécution. En revanche, ce dernier pourra opposer à l'entreprise empêchée l'exception d'inexécution pour se libérer de la contrepartie due. Ainsi, un client non livré par une entreprise empêchée ne sera pas tenu de payer le prix. En outre, la survenance d'un événement de force majeure ne met pas nécessairement fin au contrat. Si l'empêchement n'est que temporaire, le contrat est suspendu. Ce n'est qu'en cas d'empêchement définitif d'exécuter, ou si l'exécution tardive justifie la résolution du contrat, que le contrat prend fin. L'effet suspensif ou extinctif de la force majeure dépend donc de la nature du contrat et des obligations en cause et doit, ici aussi, faire l'objet d'une appréciation au cas par cas. Enfin, il convient de souligner que les dispositions du code civil relatives à la force majeure ne sont pas d'ordre public et que les parties peuvent avoir fait le choix dans leur contrat, soit de les écarter par l'insertion d'une clause de garantie au terme de laquelle les parties s'engagent à exécuter leurs obligations même en cas de force majeure, soit de retenir une définition plus stricte ou plus extensive de la notion de force majeure. Dans les deux cas, en application du principe de liberté contractuelle, c'est alors la stipulation du contrat relative à la force majeure qui devra s'appliquer, sauf pour les parties à renégocier sur ce point.

Données clés

Auteur : Mme Josiane Corneloup

Type de question : Question écrite

Rubrique : Entreprises

Ministère interrogé : Travail

Ministère répondant : Économie, finances et relance

Dates :
Question publiée le 14 avril 2020
Réponse publiée le 25 août 2020

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