Question écrite n° 28827 :
Déclarer l'état de catastrophe naturelle et mettre à contribution les assurances

15e Législature

Question de : M. Stéphane Peu
Seine-Saint-Denis (2e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine

M. Stéphane Peu attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur la nécessité d'inciter, sinon de contraindre, les assureurs privés à porter assistance à nombre d'artisans, de commerçants et de TPE frappées par les conséquences économiques de la crise sanitaire du covid-19. Les sociétés d'assurances, pourtant florissantes, en particulier depuis le début du confinement puisqu'elles bénéficient d'une baisse drastique des sinistres, notamment automobiles, sont peu enclines à porter assistance à leurs clients aujourd'hui confrontés à une catastrophe d'ampleur exceptionnelle. En effet, les assureurs s'en tiennent à la stricte application de leurs contrats qui prévoient la prise en charge des pertes d'exploitation seulement lorsqu'il y a dommages matériels tels qu'un incendie ou un bris de machine. Dans cette situation, les pertes d'exploitation considérables subies par ces entreprises ne sont pas prises en compte, avec des conséquences potentiellement considérables sur leur avenir et sur l'emploi. Certes, les entreprises du secteur assurantiel ont, sous la pression de l'opinion publique et du Gouvernement abondé au fonds de solidarité à hauteur de 200 millions d'euros, une somme qui, même si elle évoluait sensiblement à la hausse, resterait très éloignée des niveaux de pertes d'exploitation estimées à ce jour à 60 milliards d'euros toutes entreprises confondues. M. le député rappelle que l'article L. 125-1 alinéa 3 du code des assurances dispose que « sont considérés comme les effets des catastrophes naturelles les dommages matériels directs non assurables ayant eu pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel, lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n'ont pu empêcher leur survenance ou n'ont pu être prises ». Cet article décrivant très précisément la situation actuelle et les conséquences de « l'agent naturel » qu'est le covid-19, il lui demande si le Gouvernement envisage de déclarer par voie d'arrêté l'état de catastrophe naturelle ainsi qu'il en a le pouvoir, offrant ainsi un recours supplémentaire aux TPE, aux artisans et commerçants aujourd'hui en grande difficulté, et permettant d'engager les discussions avec les compagnies d'assurance sur un éventuel nouveau régime d'assurance des catastrophes sanitaires dans des conditions d'écoute plus favorables.

Réponse publiée le 23 juin 2020

Le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles n'est pas adapté pour couvrir le risque lié à une menace sanitaire grave telle que celle à laquelle nous faisons face aujourd'hui. Sur le plan financier d'abord, le régime n'a pas été conçu pour couvrir les risques d'épidémie. Ce régime ne couvre que les dommages matériels directs résultant d'une catastrophe naturelle et les pertes d'exploitation résultant de ces dommages si l'assuré est couvert contre ces pertes. En l'espèce, les pertes d'exploitation dues au Covid-19 n'ont pas été provoquées, dans l'immense majorité des cas, par des dommages matériels. Comme tout mécanisme assurantiel, le niveau de provisions du régime et de primes collectées sont calculés au préalable en fonction des aléas préalablement identifiés. Prendre en charge les pertes d'exploitation liées à la pandémie du Covid-19, hors de toute possibilité d'en avoir organisé au préalable la couverture financière, pourrait mettre en péril l'équilibre économique du régime déjà fortement mobilisé ces dernières années par les sinistres naturels extrêmes. Par ailleurs, en tout état de cause, une modification par la loi des contrats d'assurance déjà en cours pour imposer la couverture du risque de pandémie s'avèrerait inconstitutionnelle en ce qu'elle porterait atteinte de manière disproportionnée à l'équilibre économique de conventions légalement conclues. Pour autant, le Gouvernement a pleinement conscience des attentes légitimes exprimées à l'égard des assurances et de la couverture du risque que font peser les menaces sanitaires graves. Une réflexion autour de l'idée de création d'un régime de type assurantiel destiné à intervenir en cas d'une future catastrophe sanitaire majeure vient d'être engagée. Un tel mécanisme ne pourra nécessairement porter que sur l'avenir. Un groupe de travail a été mis en place par le ministère de l'économie et des finances, associant les principales parties prenantes. Il a pour objectif de déterminer l'opportunité, la faisabilité technique d'un tel régime ainsi que les avantages et les inconvénients pour tous les acteurs économiques. Les élus seront pleinement associés à ces travaux. Des premières recommandations doivent être rendues dès le mois de juin. Elles feront l'objet de concertations les plus larges possibles.

Données clés

Auteur : M. Stéphane Peu

Type de question : Question écrite

Rubrique : Assurances

Ministère interrogé : Économie et finances

Ministère répondant : Économie et finances

Dates :
Question publiée le 28 avril 2020
Réponse publiée le 23 juin 2020

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