Question écrite n° 28953 :
Accord-cadre pour l'achat de 650 appareils de type « drones »

15e Législature

Question de : Mme Agnès Thill
Oise (2e circonscription) - Non inscrit

Mme Agnès Thill interroge M. le ministre de l'intérieur au sujet d'un appel d'offres, paru il y a quelques jours, fixant un accord-cadre pour l'achat de 650 appareils de type « drones » d'un montant total estimé à près de 4 millions d'euros hors TVA, sur quatre ans. Le financement s'inscrirait dans un « programme financé par des fonds de l'Union européenne », le Fonds pour la sécurité intérieure (FSI). D'après le site du ministère de l'intérieur, le FSI se divise en deux volets : l'un centré sur les « frontières extérieures » et l'autre sur « la coopération policière, la prévention et répression de la criminalité, et la gestion des crises ». Dans le contexte de crise sanitaire actuel, l'utilisation de drones se généralise pour vérifier le respect des mesures de confinement. Toutefois, le ministère de l'intérieur assure que cette commande n'a rien à voir avec l'actualité : « Cet appel d'offres est sans lien avec la situation sanitaire actuelle, l'expression de besoin et les spécifications techniques ayant été consolidées au cours du second semestre 2019. » Par ailleurs, les industriels français alertent sur certaines négligences autour de précautions en matière de cybersécurité, ainsi que sur les risques que cet appel d'offres soit remporté par le leader chinois du secteur, DJI (Da Jiang Innovation). Aussi, pour toutes ces raisons, elle l'interroge pour savoir si l'achat de drones sera fait, en partie ou entièrement, sur les deniers du FSI, et dans lequel de ses volets s'inscrit l'achat de ces équipements. Elle souhaiterait également attirer son attention sur le fondement et la pertinence de cet appel d'offre et des sommes qui lui seraient affectées dans un contexte de crise sanitaire et au vu des coûts financiers astronomiques que cette dernière va engendrer pour la France, et cela au moment où nombre de soignants manquent de matériel et où nombre d'entreprises, d'élus et de bénévoles font preuve d'ingéniosité pour rendre service à la collectivité. Enfin, elle l'alerte sur de possibles négligences en matière de cybersécurité, sur une potentielle violation du « patriotisme économique » ainsi que sur le risque de favoriser la Chine pour remporter ce marché, dans un contexte exacerbé de guerre économique globale que la France n'a pas toujours su prendre en compte par le passé.

Réponse publiée le 3 novembre 2020

A l'instar des entreprises et des particuliers, les services publics, dont la police nationale, doivent tirer profit des avantages que peuvent offrir les nouvelles technologies. Il en est ainsi par exemple des drones, qui constituent des outils utiles dans plusieurs domaines de l'action policière. Le ministère de l'Intérieur n'a à ce jour aucun projet d'achat de drones conventionné ou en cours d'instruction au titre du Fonds pour la sécurité intérieure (FSI) de l'Union européenne, qu'il s'agisse du FSI-police (volet coopération policière, prévention et répression de la criminalité et gestion des crises) ou du FSI-FEV (volet frontières extérieures et visas). En revanche, le ministère de l'Intérieur a lancé en avril 2020 une procédure d'appel d'offres relative à l'acquisition de drones, de passerelles de réception des trames wi-fi des drones collaboratifs et de prestations associées pour les besoins de la sécurité intérieure (4 lots distincts). Cet accord-cadre est sans montant minimum ni maximum. Ce marché ne prévoit donc pas de minima contractuels engageant financièrement l'administration. Il n'est pas prévu que ces 4 lots puissent faire l'objet d'un financement au titre du FSI. S'agissant du « patriotisme économique », il doit être rappelé que les dispositions légales régissant les marchés publics résultent de la transposition en droit interne de directives européennes. Il en est ainsi, par exemple, du décret du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics. Ce cadre légal ne comporte aucun élément sur la notion de « patriotisme économique », qui ne figure pas non plus dans le décret du 3 décembre 2018 portant partie réglementaire du code de la commande publique, qui constitue le régime de droit commun fixant les règles générales de passation et d'exécution des marchés publics et des contrats de concession. Les principes généraux applicables en la matière sont l'égalité de traitement des candidats, la transparence des procédures et la liberté d'accès à la commande publique (les marchés publics sont donc accessibles à des sociétés étrangères). En l'état actuel du droit, le « patriotisme économique » n'est donc pas prévu et favoriser un candidat en raison de son implantation géographique locale ou nationale constituerait une méconnaissance du principe d'égalité de traitement des candidats fixé par les règles européennes et nationales de la commande publique. Il n'en demeure pas moins que le Gouvernement est particulièrement attentif au tissu industriel français et s'attache à défendre et promouvoir la compétitivité de nos entreprises françaises et l'attractivité du territoire national. Enfin, la cybersécurité est évidement un enjeu essentiel de toutes les nouvelles technologies et d'autant plus quand ces technologies sont amenées à manipuler des données potentiellement sensibles. Par conséquent, le ministère de l'Intérieur sera particulièrement vigilant à ne pas opter pour du matériel qui présenterait un niveau d'exposition non maîtrisé.

Données clés

Auteur : Mme Agnès Thill

Type de question : Question écrite

Rubrique : Police

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Intérieur

Dates :
Question publiée le 28 avril 2020
Réponse publiée le 3 novembre 2020

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