Pérennisation du dispositif de crédit d'impôt audiovisuel et cinématographique
Publication de la réponse au Journal Officiel du 14 novembre 2017, page 5566
Question de :
Mme Aurore Bergé
Yvelines (10e circonscription) - La République en Marche
Mme Aurore Bergé attire l'attention de M. le ministre de l'action et des comptes publics sur la pérennisation du dispositif de crédit d'impôt national et international pour les dépenses de production audiovisuelle et cinématographique. Ces dispositifs d'accompagnement de la production cinématographique française ont permis, avec d'autres facteurs, la mise en production de 85 projets de longs métrages d'initiative française en 2017 (+ 8 % par rapport au 1er semestre 2016), hors films d'animation et documentaires. Pour la première fois, en 2017, le taux de délocalisation des tournages est tombé à 15 % (contre 24 % au 1er semestre 2016). En outre, le nombre de semaines de tournage en France a également passé le cap des 500 semaines (+ 13 % par rapport au 1er semestre 2016). Ces excellents résultats démontrent l'effectivité des dispositifs de crédit d'impôt national et international sur le maintien des productions françaises sur le territoire national et sur l'attractivité de productions étrangères en France. À titre d'exemple, le récent tournage du film « Dunkerque » de Christopher Nolan a rapporté 19 millions d'euros de retombées économiques à la région Hauts-de-France. Elle aimerait donc savoir quelles mesures il envisage de prendre pour assurer la pérennité de ces dispositifs d'accompagnement de la production audiovisuelle et cinématographique française et internationale en France, dont l'impact sur l'économie, l'emploi local et le tourisme est si important.
Réponse publiée le 14 novembre 2017
La mise en place des dispositifs de crédits d'impôt en faveur de la production cinématographique et audiovisuelle, en 2004, 2005 et 2009, a permis le maintien de l'activité et la reprise des investissements des industries techniques, une intégration plus poussée du secteur, surtout dans la production d'animation où certains acteurs ont pu étendre leur rôle, au-delà de la seule production, à la conception et à la distribution, et enfin le maintien du savoir-faire et de la compétitivité technologique de la France. Toutefois, dans un environnement de concurrence fiscale internationale très forte, à l'origine de délocalisations massives de projets cinématographiques et audiovisuels jusqu'en 2015, il était essentiel de repenser les crédits d'impôt afin de les rendre plus compétitifs et de permettre à la France de redevenir un territoire privilégié d'accueil de tournages, aussi bien français qu'étrangers. Il était urgent de rendre le crédit d'impôt cinéma plus compétitif face aux concurrents, en augmentant son taux, mais aussi en l'ouvrant aux projets tournés en langue étrangère, et notamment aux films à forts effets visuels et d'animation, dont les dépenses de tournage et de post-production sont les plus importantes. Cette réforme fut un succès : la production cinématographique française, qui avait connu en 2015 un taux de délocalisation des tournages de 37 %, jamais atteint depuis 8 ans, a vu le pourcentage de jours de tournage à l'étranger baisser à 22 %. Ainsi, de nombreux films français qui auraient pu être tournés à l'étranger ont finalement été localisés en France : « Au revoir là-haut » d'Albert Dupontel, « Marie-Francine » de Valérie Lemercier, « Le petit Spirou » de Nicolas Bary et, bien sûr, « Valerian » de Luc Besson. Le cinéma d'animation a bénéficié de cette mesure, avec la production du studio à Angoulême de « La fameuse invasion de la Sicile par les ours » de Lorenzo Mattoti et à Paris de « Minuscule 2 ». En tout, la réforme du crédit d'impôt cinéma a permis, en 2016, de rapatrier en France plus de 210 M€ de dépenses et plus de 600 jours de tournages supplémentaires par rapport à 2015. Dans le secteur audiovisuel, également, il était essentiel de stimuler le volume de production d'œuvres ambitieuses et tournées vers l'international et, par là même, renforcer l'ensemble de la filière et tout particulièrement les industries techniques françaises, très sollicitées pour les projets aux budgets importants. Les tournages de plusieurs séries ambitieuses comme « Les Témoins » Saison 2 ou encore « Versailles » Saison 2, ont été effectués en France. Au total, ce sont 180 M€ de dépenses supplémentaires qui ont été effectuées en France pour la production d'œuvres audiovisuelles de fiction et d'animation en 2016, représentant 172 heures de programmes en plus. La filière animation a particulièrement bénéficié de ces mesures avec la création et l'expansion de plus d'une dizaine de studios sur l'ensemble du territoire français et avec le soutien des régions Nouvelle Aquitaine, Hauts de France, Auvergne-Rhône-Alpes et bien sûr Île-de-France. La relocalisation de segments entiers de la fabrication de l'animation en France permet d'offrir des perspectives très concrètes en termes d'emploi aux 500 étudiants diplômés des écoles d'excellence française, studios tels que Xilam à Lyon et Valence par exemple. Les chiffres de l'emploi dans le secteur de l'animation, qui devraient être annoncés en novembre, devraient être très positifs. Le territoire a également gagné en attractivité pour les films étrangers, qu'il est essentiel de savoir capter quand on sait que plus de 35 % des films de majors américains sont tournés hors des États-Unis. Grâce à la revalorisation du crédit d'impôt international, les dépenses des œuvres étrangères localisées en France ont atteint, en 2016, le niveau sans précédent de 139 M€, soit 80 M€ de dépenses supplémentaires par rapport à 2015. Un plus grand nombre de projets anglo-saxons majeurs ont choisi la France pour tourner en 2016 : « Dunkerque », de Christopher Nolan, mais aussi le film d'animation « Skylander 2 », les effets visuels de la nouvelle saison de « Twin Peaks » de David Lynch, la série britannique « Riviera », ou encore la saison 2 de la série Netflix « Marseille ». Mais la France a attiré également des productions du monde entier comme le film indien « Befikre » ou la série animée chinoise « Tig Tiger ». Au total, les effets des différentes réformes des crédits d'impôt ont été spectaculaires : près de 500 M€ supplémentaires de dépenses de tournage ou de fabrication d'animation et d'effets visuels en France par rapport à 2015, selon le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) qui est en charge du suivi et de l'évaluation des dispositifs. Au-delà de la seule relocalisation de dépenses et d'emplois, qui se traduisent par des recettes fiscales et sociales pour l'État, c'est une véritable dynamique industrielle et commerciale qui a été mise en place. Cette dynamique se maintient en 2017. Le taux de délocalisations des films français, de 17 % sur les 5 premiers mois de 2017, est descendu sous la barre des 20 %, pour la première fois depuis 10 ans. On constate déjà, au premier semestre, plus de 100 M€ de dépenses supplémentaires en France par rapport à 2016, grâce au crédit d'impôt cinéma et au crédit d'impôt international. Des tournages importants ont eu lieu, notamment celui de « Mission Impossible 6 » à Paris, en avril et mai dernier. Ce mouvement va être encore renforcé grâce à la promotion accrue du territoire français par l'association Film France à travers le monde avec le soutien du CNC et en coopération avec les autres agences de promotion des images françaises, Unifrance et TVFI, et grâce à la mobilisation des postes diplomatiques. Il apparaît donc aujourd'hui indispensable non seulement de pérenniser, mais également de continuer à améliorer les crédits d'impôt français face à une concurrence internationale qui ne cesse de s'accentuer : le Royaume-Uni, qui a aussi revalorisé son crédit d'impôt en 2015 a ainsi attiré en 2016 le plus grand nombre de films de majors américains tournés en dehors des États-Unis, dont « Rogue One » et « Les Animaux fantastiques ». D'autres pays ont récemment lancé leurs dispositifs de crédit d'impôt (la communauté espagnole de Navarre avec un taux de 35 %, l'Estonie à 30 %) ou ont prévu de le faire cette année (Portugal, Finlande, Roumanie, Ukraine ou Slovénie), tandis que certains mécanismes récemment réformés restent très agressifs en matière de concurrence fiscale, à l'image du tax shelter belge.
Auteur : Mme Aurore Bergé
Type de question : Question écrite
Rubrique : Audiovisuel et communication
Ministère interrogé : Action et comptes publics
Ministère répondant : Culture
Signalement : Question signalée au Gouvernement le 16 octobre 2017
Dates :
Question publiée le 1er août 2017
Réponse publiée le 14 novembre 2017