Interdiction de vente ou d'offre gratuite de protoxyde d'azote aux mineurs
Question de :
M. Hubert Wulfranc
Seine-Maritime (3e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine
M. Hubert Wulfranc attire l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé sur l'utilisation croissante du protoxyde d'azote à des fins euphorisantes parmi les jeunes, en particulier les mineurs. Communément appelé « gaz hilarant », le protoxyde d'azote est normalement utilisé dans le milieu médical pour ses propriétés anesthésiques et analgésiques. Celui-ci est également utilisé comme gaz de pressurisation d'aérosol tels que les cartouches pour siphon à chantilly, d'où la facilité, pour les consommateurs, de s'en procurer à des fins récréatives euphorisantes. Cet usage détourné présente des risques pour la santé. L'inhalation du protoxyde d'azote peut provoquer des effets secondaires, comme des nausées, vomissements, maux de têtes, diarrhées. A très fortes doses , sa consommation peut aller jusqu'à des infections de la moëlle épinière, des troubles neurologiques, voir des arrêts cardiaques pour les consommateurs présentant des pathologies du cœur. Ce gaz très froid est susceptible de provoquer des gelures du nez, des mains ou encore des cordes vocales. L'absence d'oxygène peut également provoquer une asphyxie si les inhalations sont trop rapprochées ainsi qu'une perte d'équilibre pouvant conduire à une chute. Si l'usage détourné du protoxyde d'azote est connu de longue date, sa consommation à des fins euphorisantes est exponentielle depuis quelques années notamment parmi les plus jeunes et ce, dès la scolarisation au collège où elle constitue une drogue du pauvre facile d'accès. Dans certaines rues et jardins publics, les cartouches de protoxyde d'azote s'accumulent par dizaines rendant aujourd'hui visible cette consommation détournée qui tend à se massifier. Confrontées à ce phénomène, des communes ont pris des arrêtés municipaux restreignant la vente du protoxyde d'azote aux seules personnes majeures et/ou, ont engagé des campagnes de sensibilisation pour tenter d'endiguer cet usage nocif pour la santé. Bien que saisi de cette question par plusieurs parlementaires, le ministère le Gouvernement n'a toujours pas pris d'initiatives fortes pour casser la dynamique qui entoure la consommation détournée de cette substance auprès des plus jeunes, limitant son action au soutien aux campagnes de prévention menées par les établissements scolaires ou par les professionnels des addictions. L'interdiction de la vente du protoxyde d'azote aux mineurs porterait pourtant un coup de frein à la consommation détournée de cette substance qui peut aujourd'hui s'acquérir aisément auprès des grandes surfaces, des commerces de proximité ou sur internet. Cette interdiction pourrait être calquée sur les interdictions de vente aux mineurs qui frappent les alcools ou le tabac. L'argument d'un report massif des achats de protoxyde d'azote sur internet, invoqué par les opposants à l'interdiction de vente de ce gaz aux mineurs, s'avère peu opérant au regard des contraintes inhérentes au commerce en ligne qui nécessite la détention d'une carte bancaire permettant ce type d'achat. Déjà deux propositions de loi visant à interdire la vente ou l'offre à titre gratuit de ce gaz aux mineurs ont été déposées, l'une à l'Assemblée nationale le 16 janvier 2019 (n° 1590) l'autre au Sénat (n° 2498) adoptée par la chambre haute le 11 décembre 2019 et renvoyée depuis à l'Assemblée nationale. Par conséquent, il lui demande de préciser s'il entend donner une suite à la proposition d'interdiction de vente ou d'offre à titre gratuit de protoxyde d'azote aux mineurs et de détailler l'ensemble des actions envisagées par son ministère afin de lutter efficacement contre l'usage détourné de ce produit à des fins euphorisantes.
Réponse publiée le 27 octobre 2020
Les données de vigilance produites en juillet 2020 par l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail et l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé permettent de mieux caractériser la nature des effets indésirables, les modes et profils de consommation et confirment les tendances relevées depuis 2017 à savoir l'augmentation des cas d'intoxication, chez un public jeune, avec plus d'une quarantaine de cas sévères rapportés en 2019. Le Gouvernement s'est engagé vers un encadrement plus strict de la commercialisation du protoxyde d'azote, en accompagnant la proposition de loi déposée par la sénatrice Mme Valérie Létard, qui prévoit l'interdiction de vente aux mineurs de produits contenant du protoxyde d'azote et de la mise à disposition de ce gaz dans les débits de boissons permanents (bars, discothèques…) ou temporaires (ex. : soirées étudiantes), ainsi que la mise en place d'un avertissement sanitaire sur l'étiquetage des produits. Des propositions pour compléter ce cadre seront intégrées lors de la poursuite de l'examen de la proposition de loi transmise à l'Assemblée nationale après son adoption par le Sénat le 11 décembre 2019. Pour mieux informer les jeunes et leur entourage sur les risques liés à cet usage détourné, deux campagnes ont été lancées sur ce sujet à l'été 2020 : en juillet, une campagne d'information et de réduction des risques de la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives a permis de doter les acteurs de terrain, associations, collectivités locales, encadrants et personnes en lien avec les jeunes, de supports de sensibilisation clairs et adaptés ; en août, la campagne « Un été sans souci » du ministère des solidarités et de la santé a intégré spécifiquement des recommandations de prévention de la consommation de protoxyde d'azote. En outre, depuis juillet 2019, sous l'impulsion conjointe du ministère chargé de la santé et du ministère de l'éducation nationale, l'ensemble des collèges et lycées de France mettent en place progressivement des partenariats avec des Consultations Jeunes Consommateurs (CJC), qui proposent aux jeunes et à leur entourage un service d'accueil, d'écoute, de conseil et d'orientation, assuré par des professionnels des addictions, dédié aux jeunes, totalement gratuit et confidentiel. Enfin, le mésusage du protoxyde d'azote par les jeunes et jeunes adultes étant une problématique partagée par plusieurs états membres de l'Union européenne, des discussions européennes seront en outre engagées afin d'encadrer la vente de ce produit au niveau communautaire.
Auteur : M. Hubert Wulfranc
Type de question : Question écrite
Rubrique : Drogue
Ministère interrogé : Solidarités et santé
Ministère répondant : Solidarités et santé
Dates :
Question publiée le 30 juin 2020
Réponse publiée le 27 octobre 2020