Question écrite n° 30924 :
Conséquence de la crise sanitaire sur l'économie transfrontalière - buralistes

15e Législature

Question de : Mme Émilie Bonnivard
Savoie (3e circonscription) - Les Républicains

Mme Émilie Bonnivard interroge M. le ministre de l'action et des comptes publics sur les conséquences économiques de la crise sanitaire sur l'économie transfrontalière, et en particulier le modèle économique des buralistes. En effet, le contrôle des frontières et les restrictions aux déplacements liées au confinement ont eu pour conséquence d'augmenter les ventes des commerces de proximité, dont les débitants de tabac. Une hausse des ventes allant jusqu'à 30 à 40 % a pu être constatée dans certaines zones frontalières. Ces ventes doublent ou triplent dans le nord et l'est de la France, près de la Belgique et de l'Allemagne, et augmentent de plus de 70 % en pays catalan, illustrant le maintien du nombre d'acheteurs de cigarettes malgré le niveau élevé du prix du tabac fixé en France (près de 2 millions d'acheteurs supplémentaires en avril 2020). Dès la levée des restrictions de circulation, les buralistes situés sur l'autre versant des frontières nationales, qui pratiquent des prix presque trois fois inférieurs à leurs homologues français, ont retrouvé peu à peu l'affluence antérieure aux mesures de confinement. Pour rappel, l'augmentation du prix du tabac, qui est motivée par l'impératif de santé publique et la nécessité de faire reculer la prévalence tabagique, a entraîné la constitution d'un marché parallèle et l'exacerbation d'une concurrence intra-européenne qui aboutit à la déstabilisation du modèle économique des buralistes frontaliers ainsi qu'à la dégradation des finances publiques. Le rapport parlementaire d'information de l'Assemblée nationale n° 3786 « sur les conséquences fiscales des ventes illicites de tabac » estime que 2,5 milliards d'euros échappent aux comptes publics. Ainsi, elle lui demande de lui indiquer les intentions du Gouvernement, suite à l'évolution des achats constatés chez les buralistes durant le confinement, sur les suites de la politique relative au prix du paquet de cigarettes et les mesures susceptibles d'accompagner le secteur des buralistes.

Réponse publiée le 3 novembre 2020

S'agissant de la fiscalité relative aux produits du tabac, le Gouvernement a engagé une politique de santé publique ambitieuse en matière de lutte contre le tabagisme. Cela se traduit par une hausse régulière de la fiscalité sur les produits du tabac, adoptée par le Parlement fin 2017, qui s'achèvera en novembre 2020. En effet, au travers de plusieurs augmentations successives (une en 2018, deux en 2019 et deux en 2020), le prix moyen du paquet de cigarettes est passé de 7 € à 9,75 € entre janvier 2018 et juin 2020. Il en résulte un accroissement du différentiel de prix avec nos partenaires européens, notamment avec les pays limitrophes, qui peut conduire à affaiblir l'efficacité de la politique de lutte contre le tabagisme. Afin de maintenir l'objectif majeur de préservation de la santé publique, tout en luttant contre les achats transfrontaliers de produits du tabac et en soutenant l'activité économique des buralistes plusieurs mesures ont été prises : Dans le cadre de la lutte contre les achats transfrontaliers de produits du tabac, la loi de finances rectificative, adoptée par l'Assemblée nationale et le Sénat le 23 juillet 2020, prévoit la modification des seuils de présomption de détention de tabacs manufacturés à des fins commerciales, mentionnés à l'article 575 I du code général des impôts (CGI). Ces seuils sont ainsi abaissés à deux-cent cigarettes, cent cigarillos, cinquante cigares et deux-cent cinquante grammes de tabac à fumer. Ils s'appliquent à toute personne introduisant des tabacs manufacturés en France, quelle que soit sa provenance, à l'exception de la principauté d'Andorre pour laquelle les seuils prévus par l'article 13 de l'accord Andorre/UE de 1990 continuent de s'appliquer. Par cette mesure, le Gouvernement souhaite peser dans les négociations européennes, afin d'harmoniser par le haut la fiscalité sur les tabacs et d'introduire, dans le cadre de la révision de la directive 2011/64/UE du Conseil du 21 juin 2011, des limites quantitatives impératives de transport de tabacs manufacturés par les particuliers entre États membres. Il s'agit, d'une part, de faire de la lutte contre le tabagisme un objectif européen afin que ce combat ne passe pas uniquement par une augmentation isolée la fiscalité nationale et, d'autre part, de protéger le réseau des buralistes. En outre, afin de combattre le marché parallèle de tabac, l'administration des douanes a entrepris en 2018 un plan de renforcement de la lutte contre le commerce illicite du tabac qui a conduit à intensifier les contrôles mis en œuvre par les services douaniers sur l'ensemble des vecteurs de contrebande de tabacs, dont les autocars, le fret express, mais également la vente à la sauvette. Dans ce cadre, des contrôles renforcés sont menés dans les zones frontalières et dans les zones urbaines, sur des lieux de vente de cigarettes préalablement identifiés. Des actions de contrôles conjoints douane-police et douane-gendarmerie sont ainsi proposées localement au préfet de région. Cette mobilisation majeure des services douaniers a conduit à des saisies remarquables. Ce sont ainsi plus de 360 tonnes de tabac de contrebande qui ont été saisies par les douanes en 2019 sur tout le territoire national, soit une augmentation de 49 % par rapport à l'année précédente. Ces efforts sont maintenus en 2020 et mobilisent pleinement les effectifs douaniers. En ce qui concerne la trajectoire fiscale, il est à noter que, dans un contexte de hausse de la fiscalité sur les produits du tabac, le chiffre d'affaires moyen de l'activité tabac des buralistes en France a augmenté de 4,9 % entre 2018 et 2019, signe de la bonne santé économique globale du monopole de vente au détail de tabacs manufacturés. Enfin, afin d'accompagner les buralistes les plus fragiles, implantés notamment dans les zones rurales et frontalières particulièrement sensibles aux variations du prix du tabac, le Protocole d'accord conclu le 2 février 2018 entre l'État et la Confédération des buralistes pour la période 2018-2021 propose plusieurs aides qui constituent un réel soutien à leur activité. Ce protocole a également pour objet d'aider les buralistes à transformer durablement leur activité en commerces multi-services de proximité, réduisant ainsi leur dépendance économique aux ventes de tabac.

Données clés

Auteur : Mme Émilie Bonnivard

Type de question : Question écrite

Rubrique : Commerce et artisanat

Ministère interrogé : Action et comptes publics

Ministère répondant : Comptes publics

Dates :
Question publiée le 7 juillet 2020
Réponse publiée le 3 novembre 2020

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