Question de : M. Bernard Brochand
Alpes-Maritimes (8e circonscription) - Les Républicains

M. Bernard Brochand attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance sur la situation particulièrement préoccupante des buralistes. Ces derniers, au nombre de 24 000 répartis sur le territoire national, assurent déjà une mission essentielle d'animateurs de commerce de proximité, faisant bien souvent vivre un village ou un quartier désaffecté par d'autres présences commerciales ou de services publics. Leur mission ne se résume pas à la seule vente du tabac. Ils génèrent d'ailleurs un chiffre d'affaires de 16 milliards d'euros qui vient abonder de manière non négligeable les recettes de la T.V.A française. Aujourd'hui, les buralistes souffrent de deux principales menaces à la fois. D'une part, la hausse constante du prix du tabac, en raison essentiellement de l'augmentation des taxes y afférant et qui touche particulièrement la France alors que certains partenaires européens demeurent à l'abri de ces hausses de taxes perçues par leurs États ; des études estiment d'ailleurs la perte fiscale engendrée par les achats de tabac à l'étranger à environ 4 milliards d'euros. D'autre part, leur pérennité est également menacée par la multiplication des réseaux de contrebande qui parviennent à écouler sur le territoire national des quantités très importantes de tabac provenant de pays où il est fabriqué à moindre coût et parfois même avec des risques sanitaires évidents. Aussi, il souhaiterait savoir si le Gouvernement entend avoir une action d'influence sur ses partenaires européens afin que la fiscalité sur le tabac soit harmonisée au niveau de la CEE, bien entendu dans un sens qui contribuerait à ne pas pénaliser la politique de santé publique de la France. Il souhaiterait également savoir si des instructions fortes peuvent être adressées à la douane, afin que celle-ci contrôle et réprime de manière plus performante les trafiquants qui se livrent à ce commerce illégal.

Réponse publiée le 10 novembre 2020

Le Gouvernement a engagé une politique de santé publique ambitieuse en matière de lutte contre le tabagisme. Cela passe par une hausse régulière de la fiscalité sur les produits du tabac, adoptée par le Parlement fin 2017, qui s'achèvera en novembre 2020. Cette politique conduit à un différentiel de prix avec nos pays voisins. Le phénomène d'achats transfrontaliers ainsi que la multiplication des réseaux de contrebande pénalisent notre politique de santé publique, génèrent des pertes de recettes fiscales et impactent négativement le chiffre d'affaires des buralistes français, alors que ces derniers assurent une mission essentielle de commerçants de proximité sur le plan local. Pour ces raisons, le ministre délégué confirme son intention de défendre une plus grande harmonisation de la fiscalité applicable aux tabacs manufacturés au niveau européen, et de poursuivre la lutte contre les trafics de tabacs manufacturés. Dans cet esprit, il a souhaité que de nouvelles mesures soient rapidement adoptées afin de lutter contre le phénomène des achats transfrontaliers de tabac. À cet effet, la loi de finances rectificative du 30 juillet 2020 modifie, à son article 51, les seuils de présomption de détention de tabacs manufacturés à des fins commerciales, prévus à l'article 575 I du code général des impôts (CGI). Ces seuils sont désormais abaissés à deux cents cigarettes, cent cigarillos, cinquante cigares et deux cent cinquante grammes de tabac à fumer. Par cette mesure, le Gouvernement entend peser dans les négociations européennes afin d'introduire des limites quantitatives impératives de transport de tabacs manufacturés par les particuliers entre États membres et d'harmoniser par le haut la fiscalité sur les tabacs, dans le cadre de la révision prochaine de la directive 2011/64/UE du Conseil du 21 juin 2011. D'ores et déjà, les efforts déployés par le Gouvernement afin de faire entendre ces arguments commencent à porter leurs fruits. A l'occasion de la publication le 10 février 2020 de son évaluation de l'efficacité de la directive 2011/64/UE, la Commission européenne a ainsi rappelé que celle-ci visait à « garantir le bon fonctionnement du marché intérieur et, dans le même temps, un niveau élevé de protection de la santé, ainsi qu'à lutter contre la fraude et l'évasion fiscales et contre les achats transfrontaliers illégaux. » Elle a néanmoins déclaré que « l'impact de la directive sur la santé publique » avait été « modéré » et que « le niveau du commerce illicite des cigarettes et du tabac fine coupe » demeurait « un défi sur les plans du contrôle de l'application, de la perte de recettes et de l'impact sur la prévalence du tabagisme ». Selon la Commission européenne, « il est nécessaire d'adopter une approche plus globale, tenant compte de tous les aspects de la lutte contre le tabagisme, y compris la santé publique, la fiscalité, la lutte contre le commerce illicite et les préoccupations environnementales. Une plus grande cohérence est également nécessaire eu égard au programme de l'UE dans le domaine de la lutte contre le cancer. » Fort de cette position, le Gouvernement continuera de plaider pour une harmonisation des règles fiscales applicables aux produits du tabac auprès de ses partenaires européens au cours des prochains mois. Par ailleurs, depuis la réouverture des frontières, les services douaniers sont pleinement mobilisés pour faire respecter les quantités maximales autorisées pour le transport de tabac par des particuliers et lutter contre la reprise des phénomènes de contrebande. Les nombreux contrôles menés s'inscrivent dans le plan de renforcement de la lutte contre le commerce illicite du tabac décidé en 2018. Celui-ci a conduit à intensifier les contrôles mis en œuvre par les services douaniers sur l'ensemble des vecteurs de contrebande de tabacs, dont les autocars, le fret express, mais également la vente à la sauvette. Dans ce cadre, des contrôles renforcés sont menés dans les zones frontalières et dans les zones urbaines, sur des lieux de vente de cigarettes préalablement identifiés. Dans le domaine de la lutte contre les trafics de produits du tabac, les saisies sont remarquables. Ce sont ainsi plus de 360 tonnes de tabac de contrebande qui ont été saisies par les douanes en 2019 sur tout le territoire national, soit une augmentation de 49 % par rapport à l'année précédente. Ces efforts sont bien évidemment maintenus en 2020 et mobilisent pleinement les effectifs douaniers, notamment depuis le 1er août, date d'application des nouveaux seuils prévus par l'article 575 I du CGI.

Données clés

Auteur : M. Bernard Brochand

Type de question : Question écrite

Rubrique : Commerce et artisanat

Ministère interrogé : Économie, finances et relance

Ministère répondant : Comptes publics

Dates :
Question publiée le 15 septembre 2020
Réponse publiée le 10 novembre 2020

partager