Côte d'Azur : menaces sur l'activité du plus grand parc animalier marin d'Europe
Question de :
M. Éric Pauget
Alpes-Maritimes (7e circonscription) - Les Républicains
M. Éric Pauget appelle l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur les incidences fâcheuses que génère l'application de l'arrêté du 3 mai 2017 sur l'activité des parcs animaliers marins. Il lui rappelle que ces derniers participent grandement à l'attractivité touristique et économique des territoires français. Ils voient aujourd'hui par ce texte leur pérennité remise en cause ainsi que celle de nombreux emplois afférents. En effet, cette disposition normative fixe les caractéristiques générales et les règles de fonctionnement des établissements présentant au public des spécimens vivants de cétacés. Il interdit la reproduction au sein de ces parcs de certaines espèces, ce qui est pour le moins préjudiciable aux dits établissements. De plus, il semblerait, eu égard aux éléments d'information portés à sa connaissance, que sa teneur remette en cause une longue et constructive période de concertation entre les services de l'État, les associations de défense des animaux et les professionnels du secteur. En France sont concernés par ces dispositions de nombreux parcs animaliers marins au nombre desquels le plus important d'Europe implanté dans le département des Alpes-Maritimes qui accueille 1 million de visiteurs chaque année, emploie plusieurs centaines de salariés, permanents et saisonniers, et participe à la préservation d'espèces marines (dauphins, orques, otaries). Alors que les territoires littoraux connaissent une diminution importante de leur fréquentation en raison des menaces terroristes et des perspectives sécuritaires dégradées auxquelles La France est confrontée, ce texte contribue à amplifier un phénomène qui affecte particulièrement cette activité touristique. Aussi, ces professionnels forment le vœu que ledit arrêté, à l'issue d'une concertation avec la communauté scientifique, soit modifié. Ils souhaitent notamment que les règles d'encadrement des activités zoologiques que connaissent tous les zoos de France leur soient appliquées et que soit enfin trouvé un juste équilibre entre préservation des espèces et activités économiques. Aussi, il le remercie de bien vouloir l'informer des intentions du Gouvernement afin de pallier une situation des plus préoccupantes pour la pérennité de tout un secteur professionnel et des emplois des territoires français.
Réponse publiée le 19 septembre 2017
Le bien-être animal est un sujet de société, et les réflexions en cette matière doivent se poursuivre, dans la continuité des améliorations apportées par la loi no 2015-177 du 16 février 2015, qui a proclamé que les animaux sont des « êtres vivants doués de sensibilité ». À l'heure actuelle, en France métropolitaine, trois établissements détiennent et présentent au public des spécimens vivants de cétacés. Toutefois, si l'ordre des cétacés regroupe entre 80 et 90 espèces, seules deux espèces sont effectivement détenues : l'orque (Orcinus orca) et le grand dauphin (Tursiops truncatus). Or, la détention en captivité des cétacés, et en particulier la participation de ces animaux à des spectacles, soulèvent de nombreuses questions éthiques. Dans le milieu naturel, le territoire exploité par les dauphins peut atteindre 100 km2, et les dimensions du territoire d'un orque sont de l'ordre de plusieurs milliers de kilomètres. Dans le milieu naturel, les dauphins et plus encore les orques sont des espèces migratrices : un orque peut parcourir 225 km par jour pendant plus de 30 jours d'affilée, et les dauphins parcourent couramment des dizaines de kilomètres par jour. Ces migrations conduisent les orques de l'Antarctique vers les zones tropicales, et l'hypothèse a été formulée que ces migrations étaient nécessaires à leur bonne santé. Les orques plongent parfois à plus de 500 mètres de profondeur, et fréquemment à plus de 150 mètres. Les dauphins peuvent plongent jusqu'à 450 mètres, ce que les scientifiques ignoraient il y a encore trente ans. Au regard de telles exigences, les installations qui accueillent ces espèces en captivité seront donc toujours trop exigües, quels que soient les efforts entrepris en matière de forme, de surface, et de profondeur. Comme les bassins ont une taille limitée, les spécimens dominés se trouvent dans l'incapacité d'échapper aux agressions des dominants. Les animaux souffrent de l'ennui et développent ce que les éthologues appellent des stéréotypies, qui sont aggravées par la « pauvreté » des bassins par rapport au milieu naturel. La trop faible profondeur, combinée au fait que les animaux passent trop de temps la tête hors de l'eau (pour recevoir des consignes ou de la nourriture de la part de leurs soigneurs), et pas suffisamment de temps en apnée, pose de nombreux problèmes physiologiques, dont le syndrome de la nageoire flaccide chez l'orque n'est qu'un exemple parmi d'autres. Pour toutes ces raisons, l'interdiction de la détention en captivité des cétacés par l'arrêté ministériel du 3 mai 2017 ne doit pas être remise en cause. L'impact de cette interdiction sur les delphinariums existants a par ailleurs été réduit autant que possible : en effet, l'arrêté du 3 mai 2017 est assorti de mesures transitoires qui autorisent la détention et la présentation au public des grands dauphins et des orques actuellement détenus en captivité jusqu'à leur mort naturelle. Comme l'espérance de vie moyenne des orques et des grands dauphins en captivité est estimée entre 30 et 45 ans et que la plupart des dauphins et des orques présentés dans les trois établissements français sont des animaux jeunes, chacun de ces établissement pourra donc poursuivre son activité pendant encore au moins 30 ans. Il faut noter également que l'activité des sites d'accueil des trois delphinariums de France métropolitaine n'est pas exclusivement consacrée à la présentation au public de cétacés : ces établissements sont en effet soit des parcs d'attraction, soit des parcs zoologiques hébergeant de nombreuses espèces animales autres que des cétacés. L'impact économique de l'interdiction de la détention en captivité des cétacés sera donc modéré au regard du progrès que cette interdiction constitue pour le bien-être animal. Dans les prochains mois, de nouvelles démarches de réflexion sur le bien-être animal seront engagées, en associant les parlementaires, les éthologues et les philosophes.
Auteur : M. Éric Pauget
Type de question : Question écrite
Rubrique : Emploi et activité
Ministère interrogé : Transition écologique et solidaire
Ministère répondant : Transition écologique et solidaire
Dates :
Question publiée le 1er août 2017
Réponse publiée le 19 septembre 2017