Soutien de l'État français au transport à la voile décarboné
Question de :
M. Nicolas Dupont-Aignan
Essonne (8e circonscription) - Non inscrit
M. Nicolas Dupont-Aignan appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance sur l'intérêt que représenterait, pour la Nation, un soutien actif de l'État au projet de voilier cargo initié par l'entreprise française TOWT. Pionnier en la matière, l'entreprise TOWT (TransOceanic Wind Transport) est le premier transporteur mondial de marchandises à la voile. Ainsi, la compagnie a déjà affrété près de 18 voiliers de travail sur les routes atlantiques et transatlantiques et cheminé plus de 1 000 tonnes de produits pour une économie estimée à 1 450 tonnes de CO2. Également propriétaire-concédant du label Anemos garantissant un transport décarboné à 90 %, cette entreprise passe désormais à l'échelle industrielle en lançant la construction du premier grand voilier-cargo moderne au monde, préfigurant des besoins identifiés pour quatre navires ! Ce qui n'est pas sans susciter l'intérêt des entreprises françaises exportatrices mondiales, puisque plusieurs grands groupes nationaux ont déjà signé des contrats de transport ou ont formalisé des demandes en ce sens. D'un coût d'environ 23,5 millions d'euros (si le projet devait voir le jour sur le territoire français, à Concarneau), la mise à l'eau serait prévue pour 2022 et pourrait annoncer le lancement de trois autres chantiers similaires à l'horizon 2025. Une telle innovation permettrait à la France de devenir le numéro 1 mondial en matière de transports décarbonés à la voile et s'inscrirait dans une logique de réindustrialisation et de création d'emplois en accord avec les impératifs écologiques actuels. Le secteur du transport maritime représente en effet, à lui seul, respectivement 3 % et 10 % des émissions mondiales de CO2 et de soufre et un tel projet aurait le mérite de permettre à la France d'ouvrir la voie à de nouvelles perspectives environnementales et ainsi inciter, par l'exemple et la réussite, les partenaires internationaux de la France à en faire autant. C'est pourquoi, en cette période de grande crise sociale, économique et environnementale, il lui demande ce que le Gouvernement entend mettre en œuvre pour apporter son soutien à l'émergence de cette nouvelle filière d'excellence en matière de transports à la voile décarbonés.
Réponse publiée le 16 mars 2021
À l'heure de la transition écologique de l'ensemble des secteurs de l'économie dans un contexte international de réchauffement climatique et de lutte contre la pollution, la décarbonation du transport maritime, qui représente environ 3 % des émissions de gaz à effet de serre au niveau mondial, est un enjeu majeur. Plusieurs décisions récentes ont été prises au niveau de l'Organisation maritime internationale (OMI) pour engager cette transition. Ainsi, l'entrée en vigueur du Global Sulphur Cap le 1er janvier 2020 limite le recours aux combustibles soufrés, permettant une réduction considérable des rejets d'oxydes de soufre dans l'air. Par ailleurs, une stratégie de réduction des émissions de gaz à effet de serre du secteur maritime a été adoptée et vise à réduire d'au moins 50 % les émissions en 2050 par rapport à 2008. La France est pleinement engagée dans les travaux de l'OMI et pousse à la prise de décisions ambitieuses, afin de respecter les objectifs de l'accord de Paris sur le climat. Le transport maritime repose aujourd'hui essentiellement sur des énergies fossiles pour la propulsion et l'alimentation en énergie à bord. En raison des contraintes d'utilisation et des besoins spécifiques du secteur, en particulier en matière d'autonomie, les solutions développées pour « décarboner » les transports terrestres, telles que la propulsion électrique, ne sont pas toujours applicables aux navires. De nombreuses innovations sont en développement et des projets de navires à faibles émissions commencent à voir le jour. La propulsion des navires à la voile fait partie des solutions prometteuses pour réduire l'empreinte environnementale du transport maritime. Au niveau national, la France est dotée d'un large écosystème d'entreprises innovantes et capables d'investir dans des nouvelles technologies vertes. Dans un secteur très concurrentiel et soumis à de fortes contraintes techniques et réglementaires, l'accompagnement de l'État est essentiel pour accroître la compétitivité des entreprises et faire émerger de nouveaux champions industriels. C'est dans cet esprit qu'ont été mis en place les programmes d'investissements d'avenir (PIA) destinés au financement des investissements innovants sur le territoire. Entre 2011 et fin septembre 2019, 51 projets ont ainsi bénéficié d'un cofinancement de l'Agence de la transition écologique, anciennement Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) pour un montant total de 176,7 M€. Les PME, qui constituent 53 % des bénéficiaires, sont fortement impliquées. L'entreprise TOWT, qui portait le projet de construction d'un voilier de transport de marchandises à la voile, a d'ailleurs été sélectionnée par l'ADEME et obtenu une aide de 196 k€ en 2015. Dans le cadre du plan de relance de l'économie lancé en septembre 2020, une nouvelle génération de PIA va voir le jour. Les projets innovants s'inscrivant dans une logique de décarbonation pourront, par le biais des guichets habituels, disposer de cofinancements. Par ailleurs, d'autres aides publiques restent également mobilisables pour financer l'innovation, auprès de la Banque publique d'investissement France notamment, mais aussi de l'Union européenne et des collectivités. Il faut ajouter à l'ensemble de ces dispositifs le mécanisme de suramortissement qui vise à favoriser le financement de la transition écologique de la flotte de commerce. La propulsion vélique s'insère naturellement dans le cadre de ce nouvel article 39 decies C du code général des impôts. Enfin, le contrat de filière, signé en 2018 entre les industriels de la mer et l'État, a décidé de mettre le conseil de la recherche et de l'innovation des industriels de la mer (CORIMER) au centre du dispositif de l'innovation. Il a ainsi vocation à jouer un rôle de sélection et d'orientation des projets en matière d'innovation maritime vers les guichets les plus adaptés.
Auteur : M. Nicolas Dupont-Aignan
Type de question : Question écrite
Rubrique : Transports par eau
Ministère interrogé : Économie, finances et relance
Ministère répondant : Transports
Dates :
Question publiée le 3 novembre 2020
Réponse publiée le 16 mars 2021