Question de : M. Stéphane Viry
Vosges (1re circonscription) - Les Républicains

M. Stéphane Viry attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur le bilan des états généraux de l'alimentation mis en place par les autorités gouvernementales du 20 juillet au 21 décembre 2017. Organisés sous forme d'ateliers traitant, d'une part, du chantier sur la création et la répartition de la valeur au sein des filières agricoles et agroalimentaires et, d'autre part, du chantier pour une alimentation sûre, saine, durable et accessible, ces états généraux ont travaillé pendant trois mois sur des sujets majeurs pour l'avenir de la filière agricole. Ils ont été clôturés par des engagements clairs et concrets, sous forme d'un consensus entre tous les acteurs des filières agricoles et agroalimentaires françaises. Le Premier ministre avait également annoncé la prise d'une loi par ordonnance, qui avait pour but de réviser les conditions d'accès au marché entre les distributeurs et les agriculteurs, afin de garantir un marché sain, efficace et juste. Ce projet de loi a notamment promis des restrictions des promotions et une meilleure répartition de la valeur ajoutée, un « plan bio » et une limitation des pesticides, la garantie du bien-être animal et la lutte contre le gaspillage alimentaire. Toutes ces promesses ont satisfait à l'époque les organismes représentatifs tels que la Fédération du commerce (FDC) pour le versant distributeur, et la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA) pour le versant agriculture. M. le député remarque cependant que, si un certain nombre d'engagements ont été traduits, ce n'est pas le cas de tous ces engagements. À titre d'exemple, la question essentielle pour les agriculteurs de la fixation des prix à partir du coût de production est encore aujourd'hui en suspens. Pourtant, les états généraux étaient parvenus à identifier les leviers à activer et les obstacles à lever pour redynamiser la filière alimentaire agricole. Il souhaite donc savoir quels sont aujourd'hui les engagements des états généraux qui ont été réalisés. Il lui demande également s'il entend procéder à une évaluation des résultats et de la proposer à la consultation aux parlementaires.

Réponse publiée le 2 février 2021

Dans la lignée des travaux des états généraux de l'alimentation (EGA) qui se sont tenus en 2017, la loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (dite loi EGALIM), publiée le 1er novembre 2018, a pour objectif de faire cesser une guerre des prix génératrice de destruction de valeur et d'appauvrissement des producteurs et de rééquilibrer les relations entre l'amont et l'aval des filières afin de permettre une meilleure répartition de la valeur ajoutée tout au long de la filière. Ainsi, elle renforce le cadre formel (les clauses obligatoires) que doit dorénavant respecter tout contrat écrit entre un producteur et son acheteur, ou tout accord-cadre entre l'organisation de producteurs ou l'association d'organisations de producteurs et son acheteur, sachant qu'en cas d'accord-cadre, le contrat individuel doit forcément respecter l'accord-cadre. La jurisprudence montre que le renforcement du formalisme protège la partie la plus faible. Dorénavant, le producteur fait la proposition de contrat. Cette proposition devient le socle de la négociation et toute réserve de l'acheteur doit être motivée. Cette réserve peut porter sur la proposition de prix. Avec ce mécanisme, c'est désormais le producteur qui fait la proposition de prix ou de formule de prix. Cette dernière doit prendre en compte obligatoirement des indicateurs pertinents de coûts de production et leur évolution, des indicateurs relatifs aux prix des produits agricoles et alimentaires constatés sur le ou les marchés sur lesquels opère l'acheteur ainsi que leur évolution. Une responsabilisation est également introduite tout au long de la filière s'agissant du prix à la production agricole, avec la disposition dite de la « cascade » qui permet que, tout au long de la chaîne d'approvisionnement, les contrats avals prennent en compte les indicateurs de prix et de coûts prévus dans le contrat entre le producteur et son acheteur. Pour aider les producteurs à se saisir des outils contractuels, les missions des interprofessions ont été élargies. Ces dernières ont été invitées à élaborer et diffuser les indicateurs qu'elles jugent pertinents et qui deviennent des indicateurs de référence qui pourront être utilisés par les parties. Elles peuvent également élaborer des contrats types qui pourront préciser le formalisme prévu par la loi pour prendre en compte les spécificités des filières. L'ensemble des dispositions de la loi EGALIM a ainsi contribué à améliorer les relations commerciales en 2019. À titre d'exemple dans le secteur laitier, le prix du lait payé aux producteurs est ainsi resté en 2019 au-dessus du prix de 2018 tout au long de l'année. En particulier, la baisse saisonnière des prix du lait observée chaque année au printemps lors de la période du pic de production a été très limitée. Toutefois, la crise sanitaire et économique qui a marqué l'année 2020 a fragilisé la filière alimentaire, marqué notamment par une réduction très forte de certains débouchés (restauration hors domicile notamment), les coûts engendrés et la hausse des prix des matières premières. Alors que vient de s'ouvrir le cycle annuel des négociations commerciales pour 2021 (du 1er décembre 2020 au 1er mars 2021), le ministre de l'agriculture et de l'alimentation et la ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargée de l'industrie ont réuni le 18 décembre 2020 les représentants des producteurs agricoles, des industries transformatrices et des distributeurs dans le cadre d'un comité de suivi des relations commerciales. Ils ont appelé à la responsabilité et à l'engagement des distributeurs afin que justement, l'état d'esprit des EGA soit respecté pour une plus juste répartition de la valeur. Il est attendu que les distributeurs s'engagent à faire preuve d'une responsabilité particulière dans les négociations, notamment par la prise en compte de la hausse des coûts de production. Par ailleurs, d'autres mesures de la loi EGALIM ont fait l'objet d'évaluation, telle que la mesure de relèvement du seuil de revente à perte et d'encadrement des promotions. Par ailleurs, la loi n° 2020-1525 du 7 décembre 2020 d'accélération et de simplification de l'action publique a prolongé cette expérimentation jusqu'au 15 avril 2023, tout en l'aménageant pour permettre à certains produits de pouvoir déroger, sous certaines conditions, à l'encadrement des promotions en volume. Tous les moyens seront par ailleurs employés pour que la loi soit respectée. Les ministres ont ainsi indiqué qu'à leur demande, les contrôles pour faire appliquer la loi EGALIM seront renforcés. Déjà, durant les négociations commerciales de 2020, les services de contrôle de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ont auditionné plusieurs centaines de fournisseurs afin de suivre « en temps réel » le déroulement de ces négociations et l'intégration des éléments de la loi, notamment l'utilisation des indicateurs de coût. Enfin, une mission a été confiée à M. Serge Papin, qui avait présidé un des ateliers des états généraux, pour identifier les solutions envisageables afin d'aller plus loin dans le rééquilibrage de la valeur le long de la chaîne alimentaire. Ainsi, tous les leviers sont utilisés afin répondre aux engagements des EGA qui ont été traduits dans la loi EGALIM.

Données clés

Auteur : M. Stéphane Viry

Type de question : Question écrite

Rubrique : Agroalimentaire

Ministère interrogé : Agriculture et alimentation

Ministère répondant : Agriculture et alimentation

Dates :
Question publiée le 8 décembre 2020
Réponse publiée le 2 février 2021

partager