Conséquences du Bexit sur le programme Erasmus +
Question de :
Mme Constance Le Grip
Hauts-de-Seine (6e circonscription) - Les Républicains
Mme Constance Le Grip appelle l'attention de Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation sur le sujet du retrait du Royaume-Uni du programme Erasmus + et sur les conséquences pour les étudiants français. Plus de 8 000 jeunes Français franchissent la Manche chaque année, ce qui fait du Royaume-Uni la deuxième destination des étudiants français dans le cadre du programme Erasmus. Mais, depuis le 1er janvier 2021, l'entrée en vigueur du Brexit a sonné la fin de la participation du Royaume-Uni à ce programme, et les conséquences en sont préoccupantes. En effet, Erasmus + permettait aux étudiants français d'effectuer jusqu'à une année scolaire complète dans un établissement d'enseignement supérieur britannique de leur choix en payant les frais d'inscription de leur établissement d'origine. Les étudiants français vont désormais devoir s'acquitter des frais de scolarité pratiqués par les établissements britanniques et qui peuvent atteindre jusqu'à 10 000 euros l'année. Beaucoup d'étudiants modestes ne pourront donc plus envisager le Royaume-Uni comme destination universitaire. Ils ne pourront plus non plus bénéficier de la bourse mensuelle accordée dans le cadre du programme Erasmus. Cette bourse leur permettait d'être accompagné dans leur mobilité et de faire face au coût de la vie quotidienne parfois élevé dans des villes comme Londres. Les étudiants désireux d'étudier au Royaume-Uni pour une période supérieure à six mois devront aussi désormais demander un visa dont le coût et les modalités sont non négligeables, comme Mme la ministre l'a mentionné lors de son audition du 27 janvier 2021 par la commission des affaires culturelles et de l'éducation de l'Assemblée nationale. La Conférence des présidents d'université, de son côté, a déploré qu'Erasmus + ne fasse pas partie de l'accord UE-RU, ce qui risque de mettre fin à plus de 30 ans de coopération entre établissements universitaires français et britanniques. Comme la CPU, Mme le députée regrette la décision unilatérale du gouvernement britannique de se retirer d'Erasmus, allant à contre-courant de la dynamique de construction de coopération des universités européennes dans laquelle les universités françaises et celles des autres pays de l'Union européenne se sont largement investies. Même s'il existe, comme précisé lors de l'audition de Mme la ministre devant la commission des affaires culturelles et de l'éducation, la possibilité d'accords équilibrés entre certains établissements français et britanniques, Mme la députée souhaiterait savoir comment le Gouvernement compte accompagner et appuyer les efforts de maintien de la coopération et du partenariat avec des universités britanniques menés par certaines universités françaises, afin de poursuivre la mobilité étudiante de part et d'autre de la Manche, et si des accords concernant le montant des frais de scolarité annuels peuvent être envisagés, à l'instar de ce qui a été mis en place avec le Québec, par exemple.
Réponse publiée le 4 mai 2021
La France a pris acte de la décision du Royaume-Uni de ne pas s'associer au programme Erasmus+. Cette décision, sur laquelle le Royaume-Uni peut évidemment revenir, aura un impact sur les mobilités étudiantes entre nos deux pays. En effet, l'augmentation des frais d'inscription dans les universités britanniques pour les étudiants européens dissuadera vraisemblablement des étudiants français non issus de familles aisées d'entreprendre des mobilités outre-Manche. Cette augmentation paraît inévitable, puisque la perception même d'un manque à gagner financier induit par les conditions du programme Erasmus+ a pesé dans le choix du Royaume-Uni (En 2018, la contribution du Royaume-Uni au financement d'ERASMUS s'élevait à 160 M€, pour un flux sortant de 17 000 étudiants britanniques et un flux entrant de 32 000 étudiants européens). L'attractivité mondiale des universités britanniques devrait de fait rendre relativement aisée la substitution des étudiants européens (notamment par des étudiants chinois, dont les familles sont prêtes à payer des droits d'inscription élevés, et que leurs difficultés récentes d'accès aux Etats-Unis ou à l'Australie pourraient inciter à se reporter sur le Royaume-Uni). Au cas par cas, ce sera entre des universités britanniques et des établissements français que pourront se négocier des accords de mobilité croisée prévoyant des frais d'inscription réduits. La faisabilité de négociations sur des programmes de mobilité régionaux avec les gouvernements de régions à majorité pro-européenne, en particulier l'Ecosse et l'Irlande du Nord, doit par ailleurs être examinée. Enfin, une concertation avec les pays de l'union européenne pour la négociation des frais d'inscription appliqués aux étudiants européens sera recherchée. Concernant la mobilité sortante, les autorités britanniques ont annoncé la création d'un programme national « Turing », en substitution au programme Erasmus, dont les contours doivent encore être précisés. Financé à hauteur de 110 M€ pour la première année, il bénéficiera uniquement aux étudiants britanniques et pour des mobilités internationales sortantes, sans ciblage privilégié des établissements européens. Un objectif de 35 000 mobilités sortantes est annoncé. Attirer en France des étudiants britanniques reste un objectif important. L'espace Campus France à Londres travaillera à la promotion de l'enseignement supérieur français auprès des étudiants britanniques. De plus, l'ambassade de France propose la mise en place d'un dispositif de bourses du Gouvernement français pour des ressortissants britanniques souhaitant venir étudier en France. Enfin, un sommet bilatéral franco-britannique devrait avoir lieu en 2021, qui pourrait comprendre un volet consacré à l'enseignement supérieur et la recherche.
Auteur : Mme Constance Le Grip
Type de question : Question écrite
Rubrique : Enseignement supérieur
Ministère interrogé : Enseignement supérieur, recherche et innovation
Ministère répondant : Enseignement supérieur, recherche et innovation
Dates :
Question publiée le 23 février 2021
Réponse publiée le 4 mai 2021