Question de : M. Bernard Perrut
Rhône (9e circonscription) - Les Républicains

M. Bernard Perrut interroge M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports sur la place de la glossophobie chez les jeunes. La prise de parole en classe, les exposés effectués devant ses camarades, la récitation de poésie, l'évaluation en cours de musique ou la correction d'exercices au tableau sont autant d'exemples de situations du quotidien scolaire qui confrontent l'élève à une anxiété spécifique liée à l'oralité en public. Pourtant, ces difficultés de l'exercice de prise de parole orale en public (ou glossophobie) sont trop souvent méconnues dans le cadre scolaire, qui ne permet pas aujourd'hui de préparer de manière efficace les jeunes à cet exercice particulier, pourtant indispensable dans la future vie étudiante et professionnelle de ces derniers. Au regard de la diversité des facteurs susceptibles d'influencer la capacité d'un élève à prendre la parole en public (cadre familial, confiance en soi, etc.), cette dernière n'apparaît par ailleurs pas comme quelque chose d'inné mais comme une compétence qui s'acquiert et se travaille au et fil des années. Dans une société qui prône l'égalité des droits et l'égalité des chances, il apparaît ainsi plus que jamais essentiel de faire de l'exercice de prise de parole en public une véritable compétence enseignée aux jeunes dans le cadre de leur parcours éducatif ; c'est pourquoi il souhaiterait connaître les engagements du Gouvernement en ce sens, notamment à travers une sensibilisation et formation des enseignants à la glossophobie.

Réponse publiée le 8 mars 2022

L'oral est au cœur de l'enseignement dispensé à l'école et de ses examens que sont le diplôme national du brevet, le certificat d'aptitude professionnel ou le baccalauréat. En fin de 3e, tous les collégiens passent le diplôme national du brevet des collèges, série générale ou professionnelle. Délivré par un jury, le brevet est un diplôme qui atteste les connaissances et compétences acquises en fin de collège. Sur les 800 points que compte la totalité de l'examen, 400 points sont acquis par l'évaluation du socle et 400 points par les épreuves terminales, dont l'épreuve orale sur 100 points. Cette épreuve compte donc pour 1/8e dans l'obtention de l'examen, ce qui n'est pas négligeable, au même niveau que le français ou les mathématiques. Le certificat d'aptitude professionnel, préparé en deux ans après le brevet pour la formation initiale, comporte une épreuve orale de français, de langues vivantes et d'histoire. Le chef d'œuvre et sa présentation constitue une occasion forte d'expression orale dans le cadre du baccalauréat professionnel. Le baccalauréat général et technologique, réformé pour la session 2021, a quant à lui une épreuve intitulée « Le Grand oral ». Les futurs bacheliers passent par ailleurs toujours l'oral de français. Les dernières réformes ont accentué la place de l'oral dans le cursus scolaire pour les élèves. Afin de mieux accompagner et de favoriser leurs réussites, le ministère de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports (MENJS) et les académies ont mis en place des plans de formation ambitieux afin de former les encadrants et les enseignants à l'oral. La maîtrise de l'oral est complexe dans toutes ses dimensions : production et réception. Depuis une prise de parole spontanée dans le cadre de la classe, la participation à un débat, la récitation d'un poème appris par cœur ou l'exposé effectué avec des prises de notes en support, les compétences mobilisées chez les élèves sont diverses. Il faut également être en capacité de maîtriser la sémantique spécifique du sujet, quelle que soit la thématique. C'est pour cela que l'oral engage toutes les disciplines. La prise en compte de la problématique particulière de l'oral est présente dès l'entrée de l'enfant dans le système scolaire, avec de nombreuses formations sur l'oral en maternelle et notamment la problématique des petits parleurs, que ce soit pour des raisons psychologiques ou linguistiques. Savoir les repérer et les accompagner le plus tôt possible permet d'ancrer la pratique de l'oral au cœur de l'expérience scolaire. Le Plan français et le Plan mathématiques, les deux grands plans nationaux de formation des enseignants du premier degré ont chacun proposé des formations autour de l'oral et du français ou des mathématiques. Cette année, le Plan français a proposé une réflexion autour de l'oral articulée en deux temps : l'oral en maternelle, puis l'oral à l'école élémentaire. En 2019-2020 et en 2020-2021, une formation à l'éloquence était inscrite au plan national de formation afin de former les formateurs de formateurs à la maîtrise de cet exercice, notamment pour préparer les collégiens participant à l'enseignement d'éloquence proposé, à titre expérimental, en classe de troisième. Cette formation se proposait de sortir de la vision scolaire ou utilitaire de l'oral pour aller étudier l'éloquence dans des métiers qui l'utilisent : avocat, journaliste, ou pour l'art oratoire moderne qu'est le slam. Cette formation avait pour but de former les enseignants à une approche de l'éloquence, afin d'outiller les élèves et de leur donner confiance en eux et donc de réduire la peur de l'oral en public. L'oral est également considéré, de manière inédite, dans le cadre du baccalauréat général et technologique rénové. Le Grand oral est en effet une nouvelle épreuve terminale pour tous les élèves de ces deux voies : sa mise en oeuvre a donné lieu à de nombreuses formations au niveau national. Cette thématique est l'une des priorités nationales de formation décidées par le MENJS et qui fait l'objet d'un suivi spécifique. Former au Grand oral, c'est concevoir un plan de formation qui soit à la fois pluricatégoriel (s'adressant aux formateurs, aux enseignants et aux chefs d'établissement), pluridisciplinaire (toutes les disciplines du lycée général et technologique), à toutes les échelles du territoire et s'inscrivant dans une logique de parcours, de la maternelle à la terminale. C'est également prendre en compte le Grand oral dans ses différentes dimensions au savoir mais aussi au corps, à son histoire (dans la partie 3 de l'épreuve notamment), à sa relation avec les autres, que ce soit pour les élèves, mais aussi pour les enseignants. Il a donc fallu tout d'abord former des formateurs dans des disciplines différentes pour avoir un vivier suffisamment composite et varié pour sortir du prisme disciplinaire dans les formations pour s'intéresser surtout à la technique propre de l'oral et a ses problématiques, notamment la crainte de s'adresser au public. Des formations ont pu ainsi regrouper des enseignants sur des thématiques transversales telles que : les compétences psychosociales propres à la prise de parole en public / les fondamentaux techniques de l'oral ; le travail de l'oral en équipe ; les gestes professionnels requis pour préparer les élèves puis évaluer un examen oral ; la préparation à l'oral par les pratiques médiatiques. Au niveau national, un parcours numérique de formation et d'accompagnement des formateurs académiques a été élaboré sur la plateforme m@gistère. Dans tous les plans académiques de formation publiées par les académies, l'oral tient une place essentielle, notamment pour les enseignants de lycée avec le grand oral, ou en lycée professionnel avec le chef d'œuvre. Quelques exemples de formations spécifiques : L'académie de Bordeaux propose une formation sur l'oral médiatique en lien avec le CLEMI. L'oral en lien avec les médias est une entrée très pertinente pour les élèves qui vivent dans un monde d'informations. L'utilisation des réseaux sociaux actuels invite à se filmer, se mettre en scène dans de très courts clips : les élèves expérimentent ainsi l'expérience de parler face caméra. L'académie de Créteil a publié en 2019-2020 un rapport sur la pratique de l'oral en éducation prioritaire. Dans cette académie, des classes de 3e dites « classe éloquence » ont travaillé toute l'année pour participer à un concours d'éloquence. Les académies de Limoges et de Versailles ont construit par exemple des formations en lien avec Sciences Po Paris et un enseignant d'art oratoire. Certaines académies ont fait du travail de l'oral une des priorités de leur plan de formation. Un groupe de pilotage spécialement dédié à cette thématique a été constitué, interdegré, intercatégoriel et interprofessionnel (intégrant des spécialistes d'art oratoire et des artistes). Des actions de formation mettant en avant la dimension transversale de l'oral ont été conçues.

Données clés

Auteur : M. Bernard Perrut

Type de question : Question écrite

Rubrique : Enseignement

Ministère interrogé : Éducation nationale, jeunesse et sports

Ministère répondant : Éducation nationale, jeunesse et sports

Dates :
Question publiée le 14 décembre 2021
Réponse publiée le 8 mars 2022

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