Prévention et lutte contre l'anorexie
Question de :
M. Fabrice Brun
Ardèche (3e circonscription) - Les Républicains
M. Fabrice Brun attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur la prévention et la prise en charge des troubles de l'anorexie. Cette maladie grave et chronique, en voie de banalisation, touche aujourd'hui soixante-dix mille Français. Les premières victimes de ce trouble psychique sont les jeunes filles âgées de quinze à vingt-cinq ans. Chaque année, quinze mille personnes décèdent de ce trouble comportemental alimentaire (TCA). Le développement de ce TCA résulte d'une part - et ce en dépit de l'adoption d'une charte du mannequinat adoptée récemment - de l'image véhiculée par les professionnels de la mode, mais aussi du développement de site internet dits sites « pro-ana » qui font l'apologie de cette maladie. Si depuis quelques années les sites de prise en charge des patientes se multiplient, il n'en demeure pas moins que les moyens, notamment en matière de soins des troubles psychiatriques, restent insuffisants. Par ailleurs il apparaît que le personnel hospitalier n'est pas toujours suffisamment formé pour prendre en charge cette pathologie et se focalise uniquement sur l'aspect physique de la maladie (la perte ou la prise de poids) et peuvent être amenés à négliger l'aspect psychique. Il lui demande de lui indiquer si le Gouvernement entend mettre en œuvre une véritable politique de prévention et de lutte contre l'anorexie.
Réponse publiée le 27 février 2018
Aujourd'hui, la représentation sociale collective du corps en France érige la minceur, voire la maigreur en modèle de beauté. Ainsi, l'étude individuelle nationale sur les consommations alimentaires 2006-2007 (INCA 2) menée par l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) a montré que près de 50 % des femmes de corpulence normale ou mince ont suivi un régime amaigrissant pendant l'enquête ou l'année la précédant. Dans ces conditions, les pouvoirs publics ont mis en œuvre des stratégies s'appuyant sur le programme national nutrition santé (PNNS) depuis 2001 pour éviter le développement de pathologies liées à la nutrition et pour organiser la prise en charge des patients. C'est pour lutter contre les stéréotypes qu'une charte d'engagement collectif et volontaire sur l'image du corps a été signée le 9 avril 2008 sous l'égide du ministère chargé de la santé, avec les professionnels de la mode, des medias et de la communication, afin de contribuer à faire évoluer les représentations et les comportements et notamment de mettre un frein à la quête de minceur, voire de maigreur qu'elle fait peser sur certains. Conscient de l'enjeu que représentent en termes de santé publique les régimes amaigrissants, le ministère chargé de la santé a saisi l'Anses le 2 avril 2009, pour qu'elle réalise une évaluation des risques liés aux pratiques alimentaires d'amaigrissement. Son rapport a été publié en 2011 et largement médiatisé et diffusé. Il montre que les régimes amaigrissants présentent des risques pour la santé plus ou moins graves, cliniques, biologiques, comportementaux ou psychologiques. La recherche de perte de poids par des mesures alimentaires ne peut être justifiée que pour des raisons de santé et cette démarche doit faire l'objet d'une prise en charge par des spécialistes - médecins nutritionnistes, diététiciens-nutritionnistes, qui seront les plus à même de proposer le régime alimentaire correspondant le mieux aux caractéristiques de la personne. Ceci a été complété par des travaux de l'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé publiés en juillet 2012 sur l'analyse des pratiques liées à l'utilisation de produits de santé à des fins d'amaigrissement. Ces expertises ont conduit à la diffusion d'informations et une sensibilisation à destination des professionnels de santé sur les risques liés à l'usage de certains produits de santé, ainsi qu'à destination du grand public sur les dangers des produits proposés particulièrement sur internet. La loi no 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé contient deux dispositions aux articles 19 et 20 ayant trait aux mannequins et à leur santé. Les textes d'application de ces deux mesures sont parus au Journal officiel du 5 mai 2017 : le décret no 2017-738 du 4 mai 2017 introduit l'obligation d'apposer la mention "photographie retouchée" dès lors que la silhouette des mannequins a été affinée ou épaissie par un logiciel de traitement d'image dans les photographies à usage commercial qui en sont faites. Par ailleurs, l'arrêté du 4 mai 2017 relatif au certificat médical permettant l'exercice de l'activité de mannequin permet aux médecins, dans le cadre des services de santé au travail et donc de la prévention des risques professionnels, de vérifier, à travers la délivrance d'un certificat médical tous les deux ans, que l'état de santé des mannequins, notamment au regard de leur indice de masse corporelle, est compatible avec l'exercice de leur profession. Ces deux types de dispositions visent, à travers les mannequins, à donner une image du corps dans notre société plus réaliste afin de mettre fin à l'incitation à la maigreur extrême voire à l'anorexie chez les jeunes les plus fragiles qui sont sensibles à un idéal de beauté inaccessible. Le futur programme relatif à la nutrition et à la santé prévu en 2018 prendra également en compte cette question. Le ministère de la santé finance l'AFDAS TCA (association française pour le développement des approches spécialisées sur les troubles du comportement alimentaire) qui regroupe la majorité des spécialistes français, notamment une ligne d'écoute téléphonique (« Anorexie-Boulimie-info-Ecoute »). L'objectif est de mieux faire connaître cette ligne au grand public et aux professionnels en affinant notamment le référencement sur internet. Cette association a contribué largement à l'amélioration des pratiques professionnelles en participant à l'élaboration des recommandations de bonnes pratiques cliniques sur l'anorexie. Le ministère chargé de la santé soutient également l'association nationale des maisons des adolescents, ces structures constituant un dispositif reconnu d'intervention précoce pour faciliter le repérage de l'anorexie mentale et la continuité des parcours de soins.
Auteur : M. Fabrice Brun
Type de question : Question écrite
Rubrique : Santé
Ministère interrogé : Solidarités et santé
Ministère répondant : Solidarités et santé
Dates :
Question publiée le 1er août 2017
Réponse publiée le 27 février 2018