politique migratoire européenne
Question de :
M. Jean-Louis Bourlanges
Hauts-de-Seine (12e circonscription) - Mouvement Démocrate et apparentés
Question posée en séance, et publiée le 28 juin 2018
POLITIQUE MIGRATOIRE EUROPÉENNE
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Bourlanges, pour le groupe du Mouvement démocrate et apparentés.
M. Jean-Louis Bourlanges. Monsieur le ministre d'État, face au drame de l'asile et des migrations, à la veille d'un conseil européen chargé de périls, l’Union européenne traverse à la fois une crise de solidarité, d'unité et de volonté. Ce qui rend cette crise moralement terrifiante, c'est qu'elle se déroule sur un fond de remise en cause des valeurs humanistes et démocratiques qui fondent le pacte européen depuis 1950 ! (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes LaREM, MODEM et UDI-Agir.)
Mme Muriel Ressiguier. Très juste !
M. Jean-Louis Bourlanges. Ce qui la rend administrativement ingérable, c'est que partout, dans la fausse Europe de Dublin, dans la défense bec et ongles des frontières, des comptabilités et des approches exclusivement nationales, nous trouvons le refus de l'altruisme et de la mutualisation ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe MODEM et sur plusieurs bancs du groupe FI.) Ce qui rend cette crise intellectuellement incompréhensible, c'est que face à un problème d'ampleur historique qui requiert des solutions à long terme, les Européens ont le nez sur le guidon et multiplient les expédients et les défausses.
M. Fabien Di Filippo. N'importe quoi !
M. Jean-Louis Bourlanges. Ne pensez-vous pas, monsieur le ministre d’État, que les problèmes de gestion ne peuvent recevoir de réponse que si nous en sortons politiquement par le haut ? La question des finalités de notre action ne doit-elle pas être posée avant que nous nous épuisions sur la querelle des modalités ?
L'Union et les États ne peuvent pas transiger sur les principes de solidarité humaine fixés dans les conventions internationales (Applaudissements sur divers bancs) mais, pour le reste, le problème des migrations se pose en termes profondément renouvelés ; renouvelés par l'augmentation massive des flux, renouvelés par la fragilité croissante des distinctions entre les différentes catégories de migrants politiques, économiques et climatiques, renouvelés par la dimension d'un problème qui se pose à tout le monde et impose une construction multilatérale, renouvelés enfin par la prise de conscience des difficultés anthropologiques d'une intégration que nous découvrons chaque jour culturellement plus difficile, administrativement plus exigeante.
M. le président. Je vous remercie, mon cher collègue.
M. Jean-Louis Bourlanges. Monsieur le ministre d’État, le devoir de l'Europe n'est-il pas de tout changer dans ses pratiques afin de rester fidèle à ses valeurs ? (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe MODEM et sur de nombreux bancs des groupes LaREM, UDI-Agir et FI.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Monsieur le député, je suis complètement d'accord avec votre analyse : l’Union européenne fait d'abord face aujourd'hui à une crise de sa politique en matière de migrations, beaucoup plus qu'à une crise migratoire proprement dite.
M. Pierre Cordier. Vous venez de dire le contraire !
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Les chiffres sont à eux seuls révélateurs : en 2015, plus d'un million de personnes sont arrivées en Europe par voie terrestre ou maritime ; en 2018, il y en aura moins de 100 000. Le sujet n'est donc pas l'aggravation des migrations, mais bien la crise politique autour des migrations et du type de migrations, ce que vous avez évoqué et qu'il nous faut traiter, une crise qui travers l'Europe même si le chiffre a beaucoup diminué.
M. Fabien Di Filippo. C'est une crise migratoire, pas politique !
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. C'est une crise de nature politique parce que ce qui est en jeu aujourd'hui, c'est à la fois nos valeurs et notre avenir. Et il y a des divergences sur ces points.
Nos valeurs, ce sont celles de solidarité et d'humanisme que vous avez rappelées,…
M. Éric Coquerel. Ce n'est pas ce que vous faites !
M. Jean-Yves Le Drian, ministre . …des éléments fondamentaux de la construction européenne.
Quant à notre avenir, il s'agit bien de la relation que nous, Européens, voulons avoir par rapport à cet immense défi que représentent l'avenir de l’Afrique et nos relations avec ce continent.
Et c'est cela qu'il nous faut mener ensemble, parce que le cavalier seul amènera à l'échec, que ce soit aujourd'hui ou demain. C'est l'enjeu des propositions que fera la France, par la voix du Président de la République, en matière migratoire. Il s'agit de renouveler pour affirmer d'une nouvelle manière à la fois notre responsabilité collective, notre rigueur et notre respect du droit, mais aussi la solidarité et l'humanisme, fondements de l’Union européenne. (Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM et sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)
Auteur : M. Jean-Louis Bourlanges
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique économique
Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères
Ministère répondant : Europe et affaires étrangères
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 28 juin 2018