Question au Gouvernement n° 1364 :
taxation des géants du numérique

15e Législature

Question de : Mme Émilie Cariou
Meuse (2e circonscription) - La République en Marche

Question posée en séance, et publiée le 8 novembre 2018


TAXATION DES GÉANTS DU NUMÉRIQUE

M. le président. La parole est à Mme Émilie Cariou, pour le groupe La République en marche.

Mme Émilie Cariou. Monsieur le ministre de l'économie et des finances, notre majorité et le Gouvernement s'engagent totalement pour obtenir enfin une imposition juste des bénéfices des géants du net, notamment des GAFA – Google, Apple, Facebook, Amazon. Le Président de la République en fait une action essentielle de notre politique européenne. Vous-même, monsieur le ministre, depuis 2017, multipliez les efforts en Europe, de Tallinn à Vienne en passant par Berlin, pour obtenir l'instauration d'une première taxation de compensation, avec l'appui de la Commission européenne. Je tiens ici à saluer l'important travail de Pierre Moscovici et son soutien sans faille dans la lutte contre la fraude et l'évasion fiscale.

M. Adrien Quatennens. Ah ah ah ah !

Mme Émilie Cariou. Notre objectif commun est bien, au-delà de la taxation du chiffre d'affaires, de parvenir à localiser des établissements stables et à imposer les résultats de ces entreprises numériques.

Mes chers collègues, c'est quand ils sont unis que les Européens sont forts. Nous devons faire primer l'intérêt européen en instaurant une imposition juste des GAFA sur notre continent.

Il y a urgence politique et citoyenne à agir. Nous devons affirmer notre force collective et notre volonté de recouvrer ensemble notre souveraineté face à ces acteurs quasi-monopolistiques du numérique et à leur organisation stratégique fiscale, qui porte atteinte à nos solidarités, mais aussi au principe d'égalité devant la loi.

Monsieur le ministre, ce mardi 6 novembre a eu lieu le conseil « Affaires économiques et financières » – ECOFIN. Nous n'avons cessé de le pousser à prendre formellement cette décision de taxation d'ici à la fin de l'année 2018. Allons-nous obtenir de nos partenaires européens, notamment allemands, la programmation d'une taxation plus juste des géants du numérique ? Le ministre allemand des finances, M. Olaf Scholz, va-t-il enfin tenir la parole de son prédécesseur, respecter le contrat de gouvernement de son propre pays et donner corps à l'accord trouvé entre la chancelière Merkel et le Président de la République dans la déclaration de Meseberg de juin 2018 ?

M. Aurélien Pradié. Amen !

Mme Émilie Cariou. Monsieur le ministre, où en sont nos négociations ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LaREM.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie et des finances.

M. Aurélien Pradié. Et de l'augmentation de la CSG !

M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie et des finances. Madame la députée, jamais nous n'accepterons que les géants du numérique – les Google, les Amazon, les Facebook… – payent 14 points d'impôts de moins que les entreprises françaises et européennes. Jamais, jamais, jamais ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, MODEM et UDI-Agir et sur plusieurs bancs du groupe SOC. – « Alors ? » sur les bancs du groupe LR.)

M. Gilles Carrez et M. François Cornut-Gentille . Et la taxe sur les transactions financières ?

M. Bruno Le Maire, ministre. C'est pour cela que nous sommes mobilisés depuis plus d'un an, vous l'avez rappelé, derrière le Président de la République, au côté de l'Allemagne, d'abord, pour obtenir une juste taxation des GAFA. D'autres États nous ont rejoints : la Grande-Bretagne, l'Italie et l'Espagne, puis dix-neuf autres. Hier, nous étions vingt-trois prêts à voter une taxation des GAFA, dans le cadre d'une directive, au mois de décembre prochain, c'est-à-dire dans moins d'un mois.

Mme Frédérique Meunier. Alors ?

M. Maxime Minot. Mais il est urgent d'attendre !

M. Bruno Le Maire, ministre . Trois États demeurent aujourd'hui opposés à cette mesure : le Danemark, la Suède et l'Irlande. Un dernier, vous l'avez dit, hésite encore : l'Allemagne. Je ne doute pas un instant que ce pays ne soit fidèle à l'engagement pris auprès de la France depuis le début de nos discussions ; je ne doute pas un instant que l'Allemagne ne soit fidèle à l'engagement pris dans le cadre de la déclaration de Meseberg en vue d'obtenir, dans moins d'un mois, une juste taxation des géants du numérique en Europe.

Mme Frédérique Meunier. En attendant, il est plus facile de taxer les Français, n'est-ce pas ?

M. Bruno Le Maire, ministre. C'est une question essentielle : l'enjeu est d'abord la justice.

Mme Marie-Christine Dalloz. Ce sont aussi des recettes fiscales, monsieur le ministre !

M. Bruno Le Maire, ministre . Il n'y a aucune raison pour que ceux qui réalisent les profits les plus importants grâce à nos données soient moins taxés que nos PME, que nos TPE, que toutes nos entreprises. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)

M. Claude Goasguen. Et Mercedes ?

M. Bruno Le Maire, ministre. L'enjeu est aussi l'unité : si nous ne parvenons pas à imposer une taxation européenne, alors chaque État créera sa propre taxe, comme l'Italie, l'Espagne, la Grande-Bretagne l'ont déjà annoncé. Ce sera la ruine de l'unité fiscale européenne, indispensable à la souveraineté de l'Europe.

M. Claude Goasguen. Qu'en dit Mme Merkel ?

M. Bruno Le Maire, ministre . L'enjeu est enfin celui du leadership : le rôle de l'Europe n'est pas d'attendre, à l'arrière, les décisions des autres ; c'est d'être devant et d'ouvrir la voie vers plus de justice et plus d'efficacité économique, fiscale et sociale. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.) C'est le chemin que nous voulons ouvrir, avec le Président de la République, et nous y arriverons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur plusieurs bancs du groupe MODEM.)

Données clés

Auteur : Mme Émilie Cariou

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Impôt sur les sociétés

Ministère interrogé : Économie et finances

Ministère répondant : Économie et finances

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 8 novembre 2018

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