justice des mineurs
Question de :
M. Jean Terlier
Tarn (3e circonscription) - La République en Marche
Question posée en séance, et publiée le 22 novembre 2018
JUSTICE DES MINEURS
M. le président. La parole est à M. Jean Terlier, pour le groupe La République en marche.
M. Jean Terlier. Madame la ministre de la justice, l'examen du projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice commence, et nous nous félicitons que son chapitre V soit consacré à la justice des mineurs.
Je tiens d'abord à rappeler, comme l'a excellemment fait hier notre collègue Perrine Goulet, que la justice des mineurs s'occupe aussi, et surtout, de l'enfance en danger, et pas seulement de la délinquance juvénile. La justice des mineurs s'oblige, en effet, à considérer l'enfant dans sa personne, au travers des actes qu'il a commis et aussi, j'insiste, au travers des actes qu'il a subis.
Nous devons préserver cette approche, consacrée par l'ordonnance de 1945. En effet, mes chers collègues, s'agissant de la délinquance juvénile, M. Pierre Joxe nous invitait déjà il y a dix ans à résister « à l'amnésie collective dans laquelle nous entraînent à la fois le sensationnalisme des médias et l'électoralisme de certains politiciens ».
Aussi, mes chers collègues, je déplore que ceux qui veulent réduire la justice des mineurs à la seule délinquance et criminalité, et légiférer sous le coup de l'émotion, ne participent pas aux travaux de la mission d'information sur la justice des mineurs, qui travaille depuis plusieurs mois et que je préside et corapporte avec notre collègue Cécile Untermaier. Ils y apprendraient peut-être des professionnels de justice que la justice des mineurs, c'est 94 % de réponse pénale et une justice spécialisée, qui permet que deux mineurs sur trois ne récidivent pas. D'ailleurs, les mineurs représentent moins de 9,5 % de l'ensemble des personnes impliquées dans des affaires pénales.
La justice des mineurs fonctionne donc bien, et on est loin du laxisme évoqué, avec près de neuf cents jeunes incarcérés, notamment dans les établissements spécialisés pour mineurs. Nous avons échangé, lors de la discussion générale du projet de loi, sur les mesures positives de ce texte, notamment la création de vingt centres éducatifs fermés et l'expérimentation d'une nouvelle mesure d'accueil. Madame la ministre, vous avez également évoqué la volonté du Gouvernement d'avancer sur la réforme de l'ordonnance de 1945, ce dont je me félicite.
Aussi, pouvez-vous préciser à la représentation nationale, dans le calendrier parlementaire déjà particulièrement rempli, quelles modalités d'action le Gouvernement entend retenir pour redonner toute sa cohérence à l'ordonnance de 1945 ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM – M. Jean-Luc Lagleize applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice. Vous avez raison, la justice pénale des mineurs et l'adaptation de notre droit à une nouvelle forme de délinquance constituent une légitime préoccupation de nos concitoyens, à laquelle le Gouvernement entend répondre.
J'ai bien entendu votre appel à une refonte de l'ordonnance de 1945. Ce chantier est ouvert depuis longtemps, trop longtemps, et il n'a pu être mené à son terme à cause de postures diverses. Pour ma part, je souhaite l'aborder sérieusement et le faire enfin aboutir. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)
Grâce à vous, une réflexion est engagée à la commission des lois de l'Assemblée nationale. Le Sénat s'est également emparé de ce sujet, et mon ministère soutient ces initiatives et travaille avec le Parlement depuis plusieurs mois.
Mais il nous faut maintenant passer à une autre étape, celle que vous appelez de vos vœux. Nous devons apporter des réponses claires et efficaces à la délinquance des mineurs, dans le respect des principes fondamentaux, qui ont été rappelés, il y a quelques jours encore, par le Conseil constitutionnel. Nous devons juger plus vite les mineurs, pour qu'ils prennent conscience, lorsqu'il y a lieu, de la gravité de leurs actes. Nous devons apporter une réponse plus prompte aux victimes, cela est essentiel. Nous devons aussi prendre des mesures adaptées à chaque profil de jeune délinquant, sans angélisme ni démagogie.
C'est pourquoi, je vous annonce que le Gouvernement sollicitera du Parlement, dans le cadre de la loi pour la réforme de la justice, une habilitation à réformer l'ordonnance de 1945 par la création d'un code de justice pénale des mineurs. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.)
Ce travail sera mené en toute transparence avec vous au prochain semestre. Le Gouvernement s'engage à ce que la loi de ratification soit l'occasion d'un débat parlementaire de fond. Cela est essentiel à nos yeux. (Mêmes mouvements.)
Auteur : M. Jean Terlier
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Justice
Ministère interrogé : Justice
Ministère répondant : Justice
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 22 novembre 2018