projet de la Montagne d'or en Guyane
Question de :
M. Gabriel Serville
Guyane (1re circonscription) - Gauche démocrate et républicaine
Question posée en séance, et publiée le 16 janvier 2019
PROJET DE LA MONTAGNE D'OR EN GUYANE
M. le président. La parole est à M. Gabriel Serville.
M. Gabriel Serville. Monsieur le Premier ministre, aujourd'hui débute le grand débat national promis par le Président de la République en réponse à la crise sociale majeure que traverse notre pays. Toutefois, comment croire en la volonté du Gouvernement d'écouter les Français quand on voit le sort réservé aux débats publics animés par la désormais célèbre Commission nationale du débat public ?
J'en veux pour preuve le débat public relatif au projet de la Montagne d'or en Guyane (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et FI et sur plusieurs bancs du groupe LT. – Mme Delphine Batho applaudit également.), qui a récolté une écrasante majorité d'avis défavorables. Or ni le porteur du projet ni le Gouvernement n'en tiennent réellement compte. C'est bien simple : selon les sondages, sept Guyanais sur dix y sont opposés. En outre, la pétition « non à la Montagne d'or » a recueilli à ce jour 380 000 signatures, soit 100 000 de plus que le nombre d'habitants recensés dans toute la Guyane.
Au cœur de nos craintes se trouve d'abord la question autochtone. Je rappelle ici que le comité onusien pour l'élimination de la discrimination raciale vient de sommer la France de reprendre son processus de consultation (Mme Delphine Batho applaudit.), afin que les peuples autochtones soient écoutés à ce sujet. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et FI. – Mme Frédérique Tuffnell applaudit également.)
Ensuite, vient le problème de l'utilisation du cyanure, véritable poison, responsable de la pire catastrophe écologique en Europe depuis Tchernobyl. Celui-ci a joué un rôle prédominant dans l'empoisonnement de Salsigne, dans l'Aude, qui demeure à ce jour le site le plus pollué de France.
C'est pourquoi, de manière responsable et dans le cadre d'une démarche transpartisane associant des collègues des huit groupes de l'Assemblée, nous avons déposé une proposition de résolution visant à l'interdiction de l'utilisation du cyanure par l'industrie minière, à l'instar de ce qu'ont décidé des pays voisins tels que l'Allemagne ou la Hongrie. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, FI et SOC.) La multinationale Colombus Gold n'a pas tardé à réagir en rassurant ses actionnaires, considérant que cette initiative serait vouée à l'échec, à l'image des deux tentatives européennes de 2010 et 2017.
En conséquence, monsieur le Premier ministre, ma question est simple : êtes-vous du côté des multinationales étrangères, prêtes à nous empoisonner pour engraisser leurs actionnaires, ou pouvons-nous compter sur votre soutien pour éviter la catastrophe fiscale, écologique et sanitaire annoncée ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, FI et SOC ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LT et sur quelques bancs du groupe LaREM. – Mme Delphine Batho applaudit également.)
M. Fabien Roussel. Respectez la parole des gouvernés !
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Mme Brune Poirson, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Pour commencer, monsieur le député, le Gouvernement n'a pas pris de décision à ce stade ; que les choses soient claires.
Mme Delphine Batho. Qu'attendez-vous ?
Mme Brune Poirson, secrétaire d'État. Le Président de la République a fixé un cadre clair lors de son déplacement en Guyane en octobre 2017 et à l'occasion des assises de l'outre-mer en juin 2018. Les projets miniers doivent satisfaire trois critères essentiels : ils doivent être, premièrement, exemplaires du point de vue environnemental,…
M. Loïc Prud'homme. Cela n'existe pas !
Mme Brune Poirson, secrétaire d'État. …deuxièmement, acceptables démocratiquement et, troisièmement, bénéfiques pour le territoire du point de vue économique et social. C'est à l'aune de ces critères que nous jugerons si ce projet peut être réalisé ou non en Guyane.
M. André Chassaigne. La décision est prise de fait !
Mme Brune Poirson, secrétaire d'État. S'agissant de la méthode de dialogue, autre point important que vous avez soulevé dans votre question, nous nous appliquons à être, là encore, cohérents. Le grand débat national qui s'ouvre sera un moment inédit de discussion et d'écoute des Français ; il alimentera les décisions futures du Gouvernement. Nous procédons déjà de cette manière en ce qui concerne la Montagne d'or : la prise en compte des populations autochtones est une de nos préoccupations centrales. À défaut, il n'y aurait tout simplement pas de débat. Sur ce projet, de même que dans le cadre du grand débat national, il est absolument crucial et vital que nous nous écoutions les uns les autres, afin de trouver un consensus et d'avancer.
La parole des populations autochtones a été recueillie dans le cadre du débat public qui s'est tenu de mars à juillet derniers. Un grand conseil coutumier a été constitué en juin 2018. Il est représenté au sein de la commission départementale des mines, consultée sur tous les projets miniers en Guyane. La prise en compte de la position des populations autochtones, objet de la démarche du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme, est, je le répète, une préoccupation absolument centrale.
J'en viens à la proposition de résolution que vous avez déposée. Historiquement, les procédés fondés sur l'utilisation du cyanure ont été introduits pour prévenir des effets dramatiques sur l'environnement. Néanmoins, le cyanure présente lui aussi, évidemment, de nombreux risques. C'est pourquoi il nous faut encore examiner la question de plus près. Soyez assuré, monsieur le député, qu'aucune décision n'a été prise à ce stade. (Exclamations sur les bancs du groupe GDR.)
M. Fabien Roussel. Ce n'est pas une réponse !
Auteur : M. Gabriel Serville
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Outre-mer
Ministère interrogé : Transition écologique et solidaire (Mme Poirson, SE auprès du ministre d'État)
Ministère répondant : Transition écologique et solidaire (Mme Poirson, SE auprès du ministre d'État)
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 16 janvier 2019