Question au Gouvernement n° 1836 :
coopération franco-allemande en matière de défense

15e Législature

Question de : M. Claude de Ganay
Loiret (3e circonscription) - Les Républicains

Question posée en séance, et publiée le 3 avril 2019


COOPÉRATION FRANCO-ALLEMANDE EN MATIÈRE DE DÉFENSE

M. le président. La parole est à M. Claude de Ganay.

M. Claude de Ganay. Monsieur le Premier ministre, malgré la récente signature du traité franco-allemand d'Aix-la-Chapelle, un désaccord substantiel demeure sur les coopérations industrielles en matière de défense, ce qui a de graves conséquences pour les programmes SCAF – système de combat aérien du futur – et MGCS – main ground combat system –, remplaçants respectifs des avions Rafale et des chars Leclerc.

La création de champions industriels européens a pour objectif la survie de notre industrie face à une compétition internationale accrue, sur fond de guerre commerciale. Or la décision allemande de prolonger son moratoire sur les ventes d'armes à l'Arabie saoudite bloque des livraisons françaises qui utilisent des composants allemands et, ce faisant, fait échouer cet objectif.

En l'absence de règle de préférence européenne pour l'achat d'équipements militaires, et faute de budgets nationaux suffisants, il est impossible de créer une base industrielle de défense européenne compétitive sans exportations. Il serait inacceptable que le parti socialiste, très minoritaire au Bundestag, soit le responsable de l'échec de programmes industriels français, échec qui mettrait en péril des dizaines de milliers d'emplois qualifiés sur notre sol. En l'état, le rapprochement entre Paris et Berlin n'est pas gagnant-gagnant : il est « gagnant-allemand ».

Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous détailler la feuille de route de la négociation d'un seuil en deçà duquel aucune exportation ne pourra être bloquée ? Ce seuil sera-t-il suffisant pour assurer la pérennité des programmes SCAF et MGCS ?

Votre réponse pourrait s'inspirer des trois principes de coopération que l'ambassadrice de France à Berlin a énumérés, et qui font aujourd'hui défaut : le pragmatisme, aujourd'hui dans le camp de la France et de ses industriels ; la confiance mutuelle, qui doit être construite par l'Allemagne, qui a ramené son effort d'investissement en matière de défense à un très modeste 1,25 % du PIB ; la responsabilité, enfin, et j'espère, monsieur le Premier ministre, que vous prendrez clairement les vôtres durant ces négociations. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères. (Protestations sur quelques bancs du groupe LR.)

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Bien entendu, monsieur de Ganay, pour rendre pleinement opérationnelle une Europe de la défense, nous avons besoin d'un socle industriel franco-allemand très solide. C'est ce à quoi nous nous attelons de part et d'autre du Rhin.

Cette conception commune en matière de défense est un peu à l'image de l'Europe : elle s'est construite petits pas par petits pas. Elle figurait dès 1963 dans le traité de l'Élysée signé par le général de Gaulle et M. Adenauer. Vingt-cinq ans plus tard, un protocole additionnel a permis de renforcer ce traité ; puis est née la brigade franco-allemande, suivie par l'Eurocorps.

M. Éric Straumann. Ce n'est pas la question !

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État. Aujourd'hui, nous avons bien entendu l'ambition d'aller plus loin avec d'autres coopérations, pour les chars et pour les avions. Pour que celles-ci soient viables, les exportations au-delà du marché européen sont en effet nécessaires. C'est pourquoi un travail conjoint, très précis, est conduit par les deux gouvernements, et il se poursuit.

Aujourd'hui même, Jean-Yves Le Drian est aux États-Unis avec Heiko Maas, son homologue allemand. Nous assurons en effet ensemble, à tour de rôle, la présidence du Conseil de sécurité des Nations unies. Le sujet dont nous parlons sera bien entendu au cœur des discussions bilatérales.

L'amitié franco-allemande est un trésor, disait un Président français : c'était Nicolas Sarkozy en 2009. Loin des polémiques, ce trésor mérite d'être entretenu et chéri. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe MODEM. - Exclamations sur quelques bancs du groupe LR.)

Données clés

Auteur : M. Claude de Ganay

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Politique extérieure

Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères (M. le SE auprès du ministre)

Ministère répondant : Europe et affaires étrangères (M. le SE auprès du ministre)

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 3 avril 2019

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