Question au Gouvernement n° 1881 :
lutte contre l'homophobie dans le sport

15e Législature

Question de : M. Raphaël Gérard
Charente-Maritime (4e circonscription) - La République en Marche

Question posée en séance, et publiée le 11 avril 2019


LUTTE CONTRE L'HOMOPHOBIE DANS LE SPORT

M. le président. La parole est à M. Raphaël Gérard.

M. Raphaël Gérard. Madame la ministre des sports, l'homophobie n'a droit de cité nulle part en République et les dispositions du code pénal en la matière sont très claires : toute incitation à la haine ou à la violence fondée sur l'orientation sexuelle peut être réprimée d'un an d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende.

Pourtant, certains voudraient relativiser la gravité des chants homophobes proférés dans les stades de foot en l'associant à une forme de folklore. Mais qui oserait parler de folklore lorsque des footballeurs noirs sont accueillis par des cris de singe émanant des tribunes ?

Il est vrai que l'homophobie ordinaire continue d'imprégner le langage courant, a fortiori dans le monde du sport, qui valorise la culture masculine et où « pédé » est une insulte fréquemment utilisée pour humilier l'adversaire en l'assimilant à une forme de sous-homme qui serait homosexuel.

Mais rien ne légitime jamais l'homophobie et nous devons être intransigeants face à la banalisation de tous les discours de haine, sans jamais les hiérarchiser ni en relativiser la portée. En effet, les chants homophobes et les blagues potaches de vestiaires s'inscrivent toujours dans ce continuum de violences qui va de l'injure aux agressions physiques.

À l'heure où l'on comptabilise encore une agression homophobe toutes les 33 heures et où certains jeunes LGBT – lesbiennes, gays, bisexuels ou transgenre –, continuent à se faire dispenser des cours d'éducation physique et sportive, de crainte d'être harcelés dans les douches et les vestiaires des gymnases, je tiens donc à saluer votre prise de position courageuse et sans équivoque en matière de condamnation des chants homophobes dans les stades.

Elle s'inscrit dans la continuité des actions menées par votre ministère pour faire du sport un espace fédérateur et inclusif. L'an passé, le lancement de la campagne #ExAequo a permis de prendre à bras-le-corps cette bataille culturelle en sensibilisant le grand public et les acteurs du monde sportif.

Plusieurs députés du groupe LR . La question ?

M. Raphaël Gérard. Madame la ministre, pourriez-vous nous indiquer quelles mesures vous comptez prendre pour lutter efficacement contre la banalisation de l'homophobie dans le sport ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre des sports.

M. Christian Jacob. Bientôt, elle va venir en bleu de travail ! (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.)

Mme Roxana Maracineanu, ministre des sports. Monsieur le député, je vous remercie pour votre question. J'ai eu l'occasion d'exprimer ma consternation face à la nature dégradante de certains chants de supporters entendus à Paris voilà quelques semaines, et je suis bien consciente que cela concerne d'autres clubs et d'autres stades.

Passées certaines réactions épidermiques, je suis heureuse que la présidente de la Ligue de football professionnel, Nathalie Boy de la Tour, et le président de la Fédération française de football, Noël Le Graët, partagent finalement le même constat que moi : ces propos qu'on ne tolère pas dans notre société – comme l'a réaffirmé tout à l'heure ma collègue Marlène Schiappa, qui y veille avec attention –, ne doivent pas être tolérés dans les stades. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LR.) Dire que la culture du supportérisme pourrait être une raison justifiant ces agissements est un argument hypocrite.

Ces chants et injures homophobes résultent, vous l'avez dit, de stéréotypes anciens, de représentations masculines associées à la victoire, à la puissance et à la réussite, et à des représentations féminines, de la féminité et, par extension, de l'homosexualité assimilées à la fragilité, à l'échec ou à la défaite.

C'est le sens de l'alerte que j'ai lancée, car accepter cette réalité revient à adopter une ligne intenable si nous voulons promouvoir un accès égal au sport pour les femmes et pour les hommes. Celui-ci est un fait dans la pratique libre, où les femmes sont présentes à 50 %, de manière équitable, tandis que 28 % seulement de femmes ont accès à une pratique encadrée dans le cadre fédéral.

Accepter ces discriminations nous empêche aussi de parler de notre objectif affirmé de voir un plus grand nombre de femmes dirigeantes dans le sport, complément indispensable de la vision que je propose d'une offre sportive tournée davantage vers la santé, le bien-être et l'éducation, et moins vers le sport de compétition.

Enfin, tolérer de tels propos interdit d'affirmer que le milieu associatif et sportif est un lieu d'inclusion et de cohésion sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)

Données clés

Auteur : M. Raphaël Gérard

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Sports

Ministère interrogé : Sports

Ministère répondant : Sports

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 11 avril 2019

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