Question au Gouvernement n° 1887 :
Programme de réforme

15e Législature

Question de : M. Olivier Becht
Haut-Rhin (5e circonscription) - UDI, Agir et Indépendants

Question posée en séance, et publiée le 1er mai 2019


PROGRAMME DE RÉFORMES

M. le président. La parole est à M. Olivier Becht.

M. Olivier Becht. Monsieur le Premier ministre, il y a près de six mois, la hausse des carburants a déclenché un mouvement social sans précédent, révélant ainsi une crise plus profonde. Cette crise avait au moins trois dénominateurs communs : le prix de l'énergie, le montant des retraites, le niveau des salaires, autrement dit le reste à vivre de ceux qui, malgré leur travail, ne parviennent pas à boucler leurs fins de mois. À ces demandes, une première réponse a été apportée en décembre. Puis, le grand débat a permis à chacun de s'exprimer sur ses difficultés, ses attentes, et sur l'avenir du pays. Parmi les annonces du Président de la République jeudi dernier, on peut saluer l'allégement de la charge fiscale pesant sur les classes moyennes, la réindexation des petites retraites sur l'inflation – comme nous l'avions demandé depuis sa suppression –, l'engagement en faveur d'une retraite minimale à 1 000 euros, ou encore le maintien des services publics au plus près des territoires ruraux.

Et maintenant, monsieur le Premier ministre ? Ce sont 8 milliards d'euros supplémentaires de dépenses, qui s'ajoutent aux 10 milliards de décembre. Le plus dur reste à faire. (« Ah ! » sur les bancs du groupe LR)

Je veux parler d'un plan de réduction de la dépense publique, pour que les mesures d'aujourd'hui ne soient pas la dette et les impôts de demain. Salaires, retraites et, surtout, prix de l'énergie : les racines de la crise demeurent et la réponse ne peut se focaliser sur les symptômes. Nous sommes toujours convaincus que la seule issue pérenne est la construction d'un nouveau projet de société et d'un nouveau modèle économique, social et environnemental.

M. Éric Straumann. Il fallait le prendre au Gouvernement !

M. Olivier Becht. Comment, monsieur le Premier ministre, au-delà de mesures techniques qui risquent de nourrir un puits sans fond et une dette sans fin, redonner aux Français le sens de la fraternité, de l'humain, de la responsabilité vis-à-vis de la planète ? Comment faire en sorte que notre pays retrouve durablement le chemin de l'apaisement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-Agir.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Monsieur le député, dans votre question, vous évoquez la situation actuelle, qui est en effet difficile. Nous devons y répondre rapidement, tout en prenant en compte des éléments de long terme. Nous devons agir sur le pouvoir d'achat sans dégrader les fondamentaux de notre économie, de notre compétitivité, de notre dette, sous peine de condamner ceux qui nous suivront, nos enfants, nos petits-enfants, à des moments encore plus difficiles que ceux que nous vivons. C'est tout l'art de gouverner, et c'est tout le défi qui est posé aujourd'hui.

M. Fabien Di Filippo. Que vous êtes mauvais !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . Pour répondre à votre question, le Président de la République a fait, jeudi dernier, un certain nombre d'annonces importantes.

M. Pierre Cordier. Adieu l'ENA !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . Elles sont venues compléter celles qu'il avait formulées au mois de décembre, qui se sont traduites par des mesures immédiates d'augmentation du pouvoir d'achat, par l'accroissement de la prime d'activité, la possibilité offerte aux entreprises de verser une prime totalement défiscalisée, la disparition de mesures relatives à la CSG, lesquelles se traduiront par un remboursement pour ceux qui ont payé les sommes en cause depuis le 1er janvier. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.) Ces mesures se sont traduites par une augmentation immédiate du pouvoir d'achat pour un très grand nombre de nos concitoyens. (Mêmes mouvements.)

Nous devons aujourd'hui continuer sur ce chemin et préparer, bien au-delà encore, la transformation de notre pays.

M. Éric Straumann. À quelle vitesse ?

M. Édouard Philippe, Premier ministre . À court terme, le Président de la République a annoncé une baisse de 5 milliards d'euros de l'impôt sur le revenu des personnes physiques, ce qui est loin d'être négligeable puisque, vous le savez, le produit global de cet impôt s'élève à près de 77 milliards d'euros. Le réduire de 5 milliards n'est donc pas une petite mesure ; cela permet de redistribuer du pouvoir d'achat à un très grand nombre de Français.

M. Pierre Cordier. Sans recettes !

M. Fabien Di Filippo. Rendez l'argent !

M. Éric Straumann. Comment la financez-vous ?

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Le ministre de l'économie et des finances me fera des propositions. Nous vous présenterons au cours du mois de juin les modalités selon lesquelles la réduction de l'impôt sur le revenu permettra aux Français de retrouver du pouvoir d'achat.

Au-delà des mesures fiscales de redistribution du pouvoir d'achat, il y a des enjeux considérables de retour au plein emploi. Comme l'a dit le Président de la République, nous devons organiser la société française, le tissu productif pour revenir vers le plein emploi.

M. Pierre Cordier. S'il l'a dit, c'est que c'est vrai !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Je sais qu'un grand nombre de Français, peut-être un certain nombre de parlementaires, considèrent cet objectif avec une forme d'étonnement, voire de pessimisme. Voilà bien longtemps que nous peinons, en France, à résoudre la question du chômage de masse. Depuis trop longtemps, sans doute, notre société s'est à certains égards résignée à cette situation. Le Président de la République, pour sa part, ne s'y résigne pas.

M. Pierre Cordier. Heureusement qu'il est là !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Il nous a demandé de mobiliser l'ensemble des forces productives de notre pays, les corps intermédiaires… (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

M. Pierre Cordier. Vous avez essayé de les détruire !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. …qui se disent depuis longtemps prêts à intervenir.

Tel est le sens de la mobilisation nationale que je lancerai lundi prochain avec les organisations syndicales, patronales, les associations d'élus, les associations environnementales pour faire en sorte que l'ensemble des instruments existants soient mis au service de mobilisations territoriales.

M. Laurent Furst. Elles existent !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . Il s'agit de répondre au cas par cas, territoire par territoire, à des problèmes cruciaux qui nous empêchent de résorber le chômage de masse. Cela peut être un problème de domiciliation : quelqu'un qui veut accéder à un travail et dispose des compétences nécessaires ne peut occuper cet emploi parce qu'il n'a pas de garde d'enfants. Cela peut être une difficulté liée à la mobilité : l'idée d'une prime de mobilité, qui a été évoquée, devrait pouvoir être étudiée dans ce cadre. Beaucoup de mesures de court terme doivent être étudiées. J'ai indiqué hier, à l'issue du séminaire qui rassemblait un certain nombre de membres de la majorité et l'ensemble du Gouvernement, quels étaient les pistes et le calendrier de travail.

Je voudrais conclure ma réponse à votre question, monsieur le député, sur l'aspect de long terme qu'elle envisage. Préserver le long terme, c'est accroître la compétitivité de notre économie, améliorer l'éducation et la formation professionnelle de nos concitoyens, définir collectivement – pas seulement au sein du pouvoir exécutif –, à travers l'agenda 2025 auquel nous invite le Président de la République, le modèle de société que nous voulons construire à cette échéance. Il ne s'agit pas, monsieur le député, de revenir au plan, mais de se demander collectivement ce que nous mettons en œuvre pour atteindre un objectif sur lequel nous pouvons nous entendre. Il y a là quelque chose comme une méthode nouvelle, digne d'intérêt, qui nous permet, en mariant les réponses de court terme, de préparer le long terme. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM. – M. Olivier Becht applaudit également.)

Données clés

Auteur : M. Olivier Becht

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Politique sociale

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 1er mai 2019

partager