Question au Gouvernement n° 1907 :
Montée de l'intolérance à l'Universtié et poursuites pénales

15e Législature

Question de : Mme Laurence Vichnievsky
Puy-de-Dôme (3e circonscription) - Mouvement Démocrate et apparentés

Question posée en séance, et publiée le 8 mai 2019


MONTÉE DE L'INTOLÉRANCE À L'UNIVERSITÉ ET POURSUITES PÉNALES

M. le président. La parole est à Mme Laurence Vichnievsky.

Mme Laurence Vichnievsky. Madame la garde des sceaux, depuis plusieurs années s'est installé en France un climat d'intolérance dont les manifestations ont tendance à se banaliser : c'est l'organisation d'ateliers de formation « décoloniaux » dans des locaux universitaires réservés aux « racisés », c'est-à-dire interdits aux Blancs ; c'est l'interdiction par plusieurs organisations se réclamant de la lutte contre la « négrophobie » des représentations d'une pièce d'Eschyle à la Sorbonne ; ce sont, plus récemment, les menaces de mort proférées contre Alain Finkielkraut pour l'empêcher de donner une conférence à Sciences-Po, qui ont obligé les organisateurs à l'accueillir dans un autre bâtiment.

Tous ces actes suscitent sans doute la réprobation générale et la publication d'éditoriaux indignés, mais nous ne savons pas si des poursuites pénales ont été engagées contre leurs auteurs qui sont, semble-t-il, facilement identifiables.

Or la fourniture d'un service conditionnée à un critère de discrimination, c'est un délit. De la même manière, la menace de mort avec ordre ou sous condition est constitutive d'un délit. Les responsables universitaires cèdent à ces violences, parce qu'ils n'ont pas d'autre choix.

D'accommodements raisonnables en compromis opportunistes, nous nous engageons dans l'acceptation tacite d'une société d'intolérance. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe LR.)

Madame la ministre, la République ne peut plus reculer. Pouvez-vous nous dire si des poursuites ont été engagées contre les auteurs de ces agissements ? Dans la négative, avez-vous l'intention d'adresser aux parquets des instructions en ce sens ? (Applaudissements sur les bancs des groupes MODEM, LR et GDR.)

M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice. Vous le savez il ne m'appartient pas de donner des instructions individuelles aux magistrats du parquet.

M. Jean-Luc Mélenchon. Mon œil !

M. Claude Goasguen. Mais vous pouvez envoyer des circulaires générales !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Eux seuls peuvent apprécier si les faits portés à leur connaissance sont susceptibles de justifier en droit et en fait des poursuites.

Lorsque des plaintes sont déposées, notamment sur les faits que vous avez soulevés, les magistrats du parquet n'hésitent pas à les poursuivre, comme ce fut le cas pour la pièce d'Eschyle dont vous vous êtes fait le porte-parole. Dans ce cas-là précisément, comme dans d'autres situations, une enquête a été diligentée par le parquet. Elle a été spécialement confiée à la brigade de répression de la délinquance contre les personnes, car évidemment c'est de cela que relevaient ces faits.

M. Christian Hutin. Que pense le Gouvernement de tels actes ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux . S'il ne m'appartient pas de donner des instructions individuelles, en revanche il m'appartient d'adresser des instructions générales aux procureurs généraux. C'est précisément parce qu'il nous a semblé que cette situation était particulièrement délicate, que j'ai adressé, le 4 avril dernier, une instruction à l'ensemble des parquets pour la lutte contre les discriminations.

M. Claude Goasguen. Très bien !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. J'ai appelé l'attention des parquets sur trois points. D'abord, je leur ai dit que j'attendais d'eux une extrême vigilance dans la conduite de l'action publique concernant ce type d'acte afin d'identifier les auteurs. Ensuite, pour s'assurer de la qualité des procédures, ce qui est indispensable, j'ai demandé aux procureurs de sensibiliser les services d'enquêtes et de procéder à un accueil attentif des victimes et de construire des partenariats locaux. Enfin, j'ai souhaité, chaque fois que des responsables de ce type de propos ou d'agissements étaient identifiés, que le ministère public apporte systématiquement – je dis bien systématiquement – une réponse pénale adaptée à l'infraction qui a été commise et à la personnalité des auteurs.

Je vous assure, madame la députée, que sur ces questions-là, la République ne recule pas. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et LR.)

M. le président. Je demande à toutes et tous de respecter le temps de parole de deux minutes : cela me gêne de devoir chaque fois vous interrompre.

Données clés

Auteur : Mme Laurence Vichnievsky

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Enseignement supérieur

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 8 mai 2019

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