Situation au Yemen
Question de :
M. Olivier Faure
Seine-et-Marne (11e circonscription) - Socialistes et apparentés
Question posée en séance, et publiée le 15 mai 2019
SITUATION AU YÉMEN
M. le président. Mes chers collègues, on se calme et on écoute M. Olivier Faure, qui a seul la parole.
M. Olivier Faure. Comme chacun d'entre vous ici, je veux saluer le courage et l'abnégation de nos soldats. Je veux dire à leurs familles et leurs frères d'armes qu'ils sont notre fierté et qu'ils ont notre pleine reconnaissance. (Applaudissements sur tous les bancs.)
Je voulais vous parler, monsieur le Premier ministre, d'un sujet tout aussi grave : de ces êtres humains qui n'ont pas été, comme dirait Mme Loiseau, « invités à entrer en Europe » alors qu'ils fuient la guerre ou la misère.
Je souhaite plus précisément évoquer avec vous nos rapports avec la Libye. Nous sommes alertés par le secrétaire général de l'Organisation des Nations unies, le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés et les organisations non gouvernementales à propos de la situation dramatique qui prévaut dans les centres de détention libyens, où la torture, le viol, l'esclavage sont devenus la règle – une situation qui fut même décrite à une époque par le président Macron comme un « crime contre l'humanité ».
Le gouvernement italien, qui n'a pas ces pudeurs, a fait dès 2018 le choix de sous-traiter nos frontières extérieures aux garde-côtes libyens en fournissant à ces derniers des vedettes rapides. Et qu'apprend-on ? En dépit des protestations des ONG, votre gouvernement vient d'emboîter le pas de l'Italie en annonçant la cession de six bateaux à la marine libyenne. Votre ministre de l'intérieur a désigné l'adversaire lors d'une conférence de presse commune avec son homologue Matteo Salvini : les complices des passeurs seraient les ONG !
Monsieur le Premier ministre, qui défend aujourd'hui les valeurs de la France et de l'Europe ? Les garde-côtes libyens ou l'Aquarius ? Je vous demande une réponse aussi courte que claire : allez-vous renoncer à ce don ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, FI et GDR.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Les bateaux dont vous parlez, monsieur le député, ont été livrés à la marine libyenne sous l'autorité du président Sarraj, reconnu par la communauté internationale et par les Nations unies.
M. Claude Goasguen. Hélas !
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Je préférais vous le dire pour que les choses soient claires.
Vous faites ensuite référence à la situation en Libye. Celle-ci est très préoccupante, parce que le scénario et la feuille de route qui avaient été proposés par les Nations unies – plus précisément par M. Ghassan Salamé – à l'ensemble des parties, et qui avaient failli trouver un aboutissement favorable à Abou Dabi à la fin du mois de mars, ont été mis en échec à la fois par une initiative du maréchal Haftar et par une initiative – ou une non-initiative – du président Sarraj.
C'est la raison pour laquelle le Président de la République a souhaité rencontrer et l'un et l'autre, afin d'appuyer l'initiative des Nations unies. Nous avons donc tenu hier à Bruxelles une réunion des ministres des affaires étrangères en vue d'inciter très fortement l'ensemble des parties à prendre le chemin des négociations, à faire appliquer immédiatement un cessez-le-feu et à parvenir à une solution politique – car il n'y aura pas de solution militaire en Libye.
Quant à la préoccupation que vous exprimez concernant les camps, j'y suis allé, monsieur Faure,...
M. Olivier Faure. Justement, réagissez !
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. ...et j'ai pu constater la situation moi-même, y compris dans les camps du HCR et ceux qui sont placés sous l'autorité du gouvernement libyen.
M. Christian Hutin. Et les vedettes ?
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Il est nécessaire de faire en sorte que l'aide humanitaire puisse y parvenir rapidement. Cela ne sera possible que si la feuille de route politique peut être respectée. Nous souhaitons qu'elle fasse l'objet d'une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies. Sinon, je le répète, il n'y aura pas de solution, seulement la poursuite d'affrontements entre milices qui entraînent les situations que vous avez décrites. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM. – Protestations sur les bancs du groupe SOC.)
Auteur : M. Olivier Faure
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères
Ministère répondant : Europe et affaires étrangères
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 15 mai 2019