Question au Gouvernement n° 1955 :
Directives anticipées et arrêt des traitements médicaux

15e Législature

Question de : M. Olivier Falorni
Charente-Maritime (1re circonscription) - Libertés et Territoires

Question posée en séance, et publiée le 22 mai 2019


DIRECTIVES ANTICIPÉES ET ARRÊT DES TRAITEMENTS MÉDICAUX

M. le président. La parole est à M. Olivier Falorni.

M. Olivier Falorni. Madame la ministre de la santé, la tragédie humaine de Vincent Lambert, qui semble sans fin, bouleverse nos concitoyens ; mais cette tragédie qui dure est aussi le symptôme d'une faille juridique que ne peuvent ignorer des législateurs que nous sommes. Il ne s'agit pas, pour autant, de mettre notre hémicycle à l'unisson de cette arène, devenue folle, que nous observons au dehors. Je veux le dire avec la plus grande force : je trouve totalement obscène de voir la tragédie d'un homme transformée en une sorte de match de football, dont on célébrerait, avec une euphorie indécente, je ne sais quelle « remontada ». Vincent Lambert est un homme, pas un ballon. (Applaudissements sur de très nombreux bancs. - M. Damaisin se lève et applaudit.)

La tragique réalité est que Vincent Lambert souffre de lésions cérébrales irréversibles, qu'il se trouve dans un état végétatif chronique, dit de conscience minimale, et qu'il est artificiellement maintenu en vie avec une sonde qui le nourrit et l'hydrate. Ses médecins ont estimé, de façon collégiale, que cela relevait de l'obstination déraisonnable, et que l'arrêt des traitements devait être engagé, conformément à la loi. Leur décision a été confirmée par le Conseil d'État.

Mais ce drame met cruellement en lumière l'une des multiples failles des lois françaises : que faire en l'absence de directives anticipées et d'une personne de confiance désignée, la famille étant divisée par un désaccord profond ? La loi belge y répond, depuis plus de quinze ans, par la hiérarchisation de la parole portée par les proches, celle du conjoint primant sur celle des enfants majeurs, puis sur celle des parents.

Ma question, madame la ministre, est donc très concrète : êtes-vous prête, au moins, à modifier la loi Claeys-Leonetti, pour y introduire cette disposition de clarté qui permettrait d'éviter ces interminables et insupportables déchirements autour de la tragédie d'un être humain ? (Applaudissements sur de très nombreux bancs.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. Je pense que, comme beaucoup de Français, nous sommes tous bouleversés par le drame que vit cette famille. Il touche à la part intime de chacun.

Vous le savez, l'État français a toujours été soucieux de s'assurer que l'application de la procédure d'arrêt des traitements, en cas d'obstination déraisonnable, respectait la loi. Hier soir, la cour d'appel de Paris a accepté la requête des parents de Vincent Lambert, et ordonné la reprise des traitements, afin de faire exécuter les recommandations du comité des droits des personnes handicapées de l'ONU. L'équipe médicale chargée de Vincent Lambert appliquera donc ces mesures provisoires. Je n'en dirai pas davantage, car je ne connais pas le cas particulier de M. Vincent Lambert.

Aujourd'hui, encore plus qu'avant, je pense qu'il nous faut respecter l'intimité et la douleur de cette famille et des proches de Vincent Lambert. Je ne vois qu'une leçon à en tirer, et nous devons le faire collectivement, pour que cette situation ne se reproduise pas : nous devons tous remplir nos directives anticipées. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)

Chaque personne majeure, depuis la loi Claeys-Leonetti de 2007, peut rédiger par avance une déclaration pour préciser ses volontés de fin de vie, c'est-à-dire son refus ou sa volonté que les traitements ou les actes médicaux qui lui seront prodigués soient poursuivis, limités ou interrompus.

Les consignes données dans les directives anticipées permettent aux équipes médicales de prendre en charge les patients en respectant toutes leurs volontés. Je pense que c'est la seule leçon que nous pouvons tirer aujourd'hui de cette affaire. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)

Données clés

Auteur : M. Olivier Falorni

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Fin de vie et soins palliatifs

Ministère interrogé : Solidarités et santé

Ministère répondant : Solidarités et santé

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 22 mai 2019

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