ratification du CETA
Question de :
M. Jean-Michel Clément
Vienne (3e circonscription) - Libertés et Territoires
Question posée en séance, et publiée le 10 juillet 2019
RATIFICATION DU CETA
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Clément.
M. Jean-Michel Clément. Au nom du groupe Libertés et territoires, je tiens à faire part de toute notre compassion à la famille de Patricia Gallerneau et aux membres de son groupe.
Monsieur le Premier ministre, nous allons aborder l'examen du projet de loi autorisant la ratification du CETA quelques jours seulement après l'annonce du compromis sur le MERCOSUR. Cette manière de faire pose une vraie question démocratique : il a fallu des négociations engagées en 2004, un accord signé en 2016 et un accord déjà appliqué de manière provisoire depuis le 21 septembre 2017 pour qu'enfin le Parlement en soit saisi.
Plus encore que le calendrier, c'est l'opacité qui a entouré les négociations de ce traité qui interroge. Ce traité affecte directement nos modes de production ainsi que nos modes de vie. J'ai l'impression qu'avec le CETA, et plus encore avec le MERCOSUR, nous sommes embarqués dans une machine à remonter le temps. Mais les temps ont changé : au siècle dernier, on pouvait se convaincre que le commerce assurerait la paix, la prospérité et la démocratie. Aujourd'hui l'urgence climatique nous force à penser autrement : c'est bien le libre-échange qui est à l'origine des problèmes écologiques auxquels nous sommes confrontés. (Applaudissements sur les bancs des groupes LT, FI, SOC et GDR.)
Quel sens y a-t-il, dans ce contexte, à échanger à travers l'Atlantique des produits de qualité AOC contre du saumon nourri aux OGM et de la viande bovine nourrie aux farines animales ? (Mêmes mouvements.) Avons-nous mesuré les conséquences de ce traité sur nos modèles de production agricole dont la qualité est le produit et nos territoires le support ?
M. Pierre Cordier. Très bien, monsieur Clément !
M. Jean-Michel Clément. Finissons-en avec les arguments d'autorité. D'aucuns n'ont-ils pas juré hier que l'euro ferait converger les économies ? Il les a fait diverger. Que la Chine se démocratiserait après son entrée dans l'OMC ? Je vous laisse apprécier la situation.
À l'inverse, je pense, avec Cyril Dion, que : « Tout naît de nos récits. Nous avons donc, avant toute chose, une bataille culturelle à mener. Il est fondamental de proposer une vision de l'écologie désirable de l'avenir, de projeter un imaginaire […] tangible, à la fois politique, économique mais également […] agricole, énergétique ». Pourquoi ces récits d'un genre nouveau ne pourraient-ils pas modifier nos représentations, contaminer positivement les esprits et, s'ils sont largement partagés, se traduire dans nos traités et nos lois ?
Monsieur le Premier ministre, la France est-elle prête à conjurer le mauvais sort que nous réservent le CETA et, plus encore demain, le MERCOSUR ? (Applaudissements sur les bancs des groupes LT et FI ainsi que sur quelques bancs du groupe LR.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Monsieur Clément, vous anticipez un débat qui aura lieu dans cette assemblée le 17 juillet prochain à l'occasion de l'examen du projet de loi autorisant la ratification du CETA.
M. Pierre Cordier. Il est normal qu'on l'anticipe ! Gouverner c'est prévoir !
M. Éric Straumann. C'est déjà plié !
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Vous le savez, ce projet de loi sera accompagné par une étude d'impact rigoureuse et indépendante que nous avons voulue ensemble. Elle témoigne de la volonté qui a orienté le contenu de cet accord. Cette étude – j'imagine que vous l'avez lue, monsieur Clément – montre que la mise en œuvre provisoire du CETA a été positive pour notre balance commerciale.
M. Pierre Cordier. Ça se voit…
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Cette étude d'impact montre également qu'aucune des cinq filières agricoles sensibles identifiées – bœuf, porc, volaille, sucre et éthanol – n'a subi de conséquences négatives. Elle montre enfin que nos normes sanitaires et environnementales restent inchangées. Je suis donc en désaccord total avec les propos que vous venez de tenir au sujet des produits importés par l'Union européenne dans le cadre de cet accord. J'ajoute qu'un nouvel audit sanitaire sera mené au Canada par la Commission européenne à la fin de l'année 2019.
M. Pierre Cordier. C'est un peu tard !
M. Jean-Yves Le Drian, ministre . Le CETA sert déjà de support au renforcement de notre coopération en matière de lutte contre le changement climatique avec le Canada ; j'en veux pour preuve le partenariat bilatéral conclu entre nos deux ministres de l'environnement en avril dernier. Le CETA est un bon accord…
Mme Mathilde Panot. Il faut arrêter de dire cela !
M. Jean-Yves Le Drian, ministre . …qui sera soumis à votre discussion. Il renforcera notre relation sereine et saine avec le Canada, qui est par ailleurs notre partenaire pour la refondation du multilatéralisme.
Mme Mathilde Panot. Et le Brésil ?
M. le président. Madame Panot, s'il vous plaît, un ton plus bas !
Auteur : M. Jean-Michel Clément
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Traités et conventions
Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères
Ministère répondant : Europe et affaires étrangères
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 10 juillet 2019