Question au Gouvernement n° 22 :
canal Seine-Nord Europe

15e Législature

Question de : Mme Catherine Osson
Nord (8e circonscription) - La République en Marche

Question posée en séance, et publiée le 13 juillet 2017


CANAL SEINE-NORD EUROPE

M. le président. La parole est à Mme Catherine Osson, pour le groupe La République en marche.

Mme Catherine Osson. Monsieur le Premier ministre, les habitants des Hauts-de-France sont inquiets. Les élus de tous bords politiques veulent croire que leur combat et leur mobilisation depuis tant d'années en faveur du grand chantier du canal Seine-Nord ne seront pas remis en question. La genèse de ce dossier fut longue et difficile, mais, après trop d'années d'hésitations, un consensus a été trouvé sur le tracé et le financement bouclé grâce à la participation de l'État, des collectivités locales et surtout de l'Europe.

Ce canal, c'est la perspective d'emplois supplémentaires – 10 000 emplois directs et indirects à court terme, et plusieurs dizaines de milliers d'autres dans les transports, la logistique et l'industrie. Dans une région durement touchée par le chômage, un chantier de cette ampleur est une formidable espérance, mais c'est aussi une affirmation forte face aux défis écologiques et climatiques. Nul n'ignore la saturation de l'autoroute A1, notamment par le trafic des poids lourds ; chacun sait la pollution et les dégâts sur l'environnement et les conditions de vie que cela occasionne. Cette liaison fluviale permettrait d'éviter, chaque année, les trajets de près de 500 000 camions.

Au moment même où le Président de la République réaffirme avec force l'engagement de la France dans la lutte contre le réchauffement climatique et les dégâts environnementaux, tandis que notre majorité s'engage dans un programme d'investissements massifs pour dynamiser la croissance, recréer des emplois et moderniser la France, le chantier du canal Seine-Nord répond à l'évidence à toutes nos attentes.

Le canal Seine-Nord peut être une chance pour ma belle mais meurtrie région des Hauts-de-France. Les entreprises du bâtiment et des travaux publics ont mis en place des plans de formation spécifiques, et l'Europe a promis près de 5 milliards de financements, que nous risquons de perdre si nous ne nous engageons pas rapidement.

Monsieur le Premier ministre, le canal Seine-Nord a besoin d'un signal, de l'expression d'une volonté renouvelée et d'une clarification. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Edouard Philippe, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, madame la députée, votre question sur le projet de canal Seine-Nord traduit une inquiétude.

M. Christian Hutin. Une véritable inquiétude, monsieur le Premier ministre !

M. Edouard Philippe, Premier ministre. Je l'ai entendue dans votre voix, je l'ai entendue dans les paroles d'autres parlementaires, siégeant sur tous les bancs de cette assemblée, et dans les contacts que j'ai pu avoir avec des élus qui n'en sont pas membres. J'entends cette inquiétude, et j'ai conscience des interrogations qu'ont suscitées les propos du Président de la République…

M. Christian Hutin. Ce sont plus que des interrogations ! C'est grave !

M. Edouard Philippe, Premier ministre. …lorsqu'il a évoqué la question de la pause et de la réflexion que nous voulions engager sur les infrastructures.

M. Christian Hutin. Je suis de Dunkerque, il est maire du Havre !

M. le président. S'il vous plaît, monsieur Hutin ! Seul M. le Premier ministre a la parole !

M. Edouard Philippe, Premier ministre. Je connais ce projet, madame la députée. Je sais l'importance qu'il revêt pour l'ensemble des élus de votre région – pas seulement de votre région, d'ailleurs – et de la population, qui y voit une occasion de développer l'activité économique, de renforcer l'activité locale, de capter des flux et de développer, notamment, les activités de logistique une fois que les travaux de construction auront été réalisés.

J'ai dit quelles étaient mes interrogations, lorsque je siégeais sur ces bancs…

M. Christian Hutin. Plus que cela ! Plus que cela !

M. Edouard Philippe, Premier ministre. …et je les assume évidemment. Mais je voudrais vous dire de la façon la plus claire, la plus ferme et la plus tranquille que ces interrogations sont sans lien avec notre discussion du jour. Ce qui est en discussion, ce qui doit nous occuper, c'est la question de la politique des infrastructures de transport, c'est la question des engagements pris par les gouvernements successifs,…

M. Laurent Furst. Et la loi Macron !

M. Edouard Philippe, Premier ministre. …c'est la question de la soutenabilité financière de ces engagements, et c'est aussi la question tout à fait essentielle, et sans doute insuffisamment traitée, de la conciliation entre de nouvelles infrastructures nécessaires et l'entretien des réseaux existants indispensables.

M. Éric Straumann. Alors que fait-on ?

M. André Chassaigne. Ça mouline…

M. Christian Hutin. Ça mouline fort !

M. Edouard Philippe, Premier ministre. C'est la raison pour laquelle Mme la ministre des transports tiendra à la rentrée des Assises de la mobilité (« Ah ! » sur les bancs du groupe LR) qui permettront d'associer l'ensemble des élus, les collectivités territoriales, les citoyens, les entreprises, les associations…

M. Patrice Verchère. C'est un sujet qu'on découvre !

M. Edouard Philippe, Premier ministre. …d'identifier à la fois les besoins et les urgences – et je comprends parfaitement la question des urgences – et de construire une trajectoire de financement crédible…

M. Marc Le Fur. Il n'y aura pas de canal !

M. Laurent Furst. Il a sorti les rames !

M. Patrick Hetzel. Bientôt le pédalo !

M. Edouard Philippe, Premier ministre . …pour financer l'ensemble des infrastructures qui ont été promises, mais dont nous ne savons pas aujourd'hui comment elles sont financées. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe REM.)

Nous allons travailler sur ce sujet, madame la députée, et discuter avec ceux qui veulent faire avancer le projet. J'aurai l'occasion d'échanger dans le courant de la semaine prochaine avec le président du conseil régional des Hauts-de-France, Xavier Bertrand, et de rencontrer les parlementaires qui m'en ont fait la demande, comme M. Demilly. Nous verrons dans quelle mesure nous pouvons non en rester à ces incantations sur les nouvelles infrastructures, que nous voulons tous, mais tracer un chemin sérieux, crédible et efficace…

M. Éric Straumann. Nous voulons un canal, pas un chemin !

M. Edouard Philippe, Premier ministre. …de financement de ces infrastructures. C'est beaucoup plus difficile, mais beaucoup plus nécessaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe REM.)

Nous sommes au travail, nous allons regarder quelles solutions sont envisageables.

M. Christian Hutin. Bref, vous êtes opposé au canal Seine-Nord !

M. Edouard Philippe, Premier ministre. C'est le sens très clair de ma réponse. (Applaudissements sur les bancs du groupe REM.)

Données clés

Auteur : Mme Catherine Osson

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Aménagement du territoire

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 13 juillet 2017

partager