Question au Gouvernement n° 2205 :
fiscalité des services à la personne

15e Législature

Question de : M. Gilles Lurton
Ille-et-Vilaine (7e circonscription) - Les Républicains

Question posée en séance, et publiée le 25 septembre 2019


FISCALITÉ DES SERVICES À LA PERSONNE

M. le président. La parole est à M. Gilles Lurton.

M. Gilles Lurton. Monsieur le Premier ministre, nous sommes tous conscients de la nécessité de faire des économies. Encore faut-il que les efforts soient justement répartis.

M. Patrick Hetzel. Eh oui !

M. Gilles Lurton. Or, depuis votre arrivée à la tête du Gouvernement, ce sont toujours les mêmes qui trinquent. Sous la présidence de François Hollande, c'étaient les familles. Avec votre Gouvernement, ce sont les familles et les retraités ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.)

Après une hausse inconsidérée de la contribution sociale généralisée sur les retraites et une désindexation injuste des pensions de retraite par rapport à l'inflation, nous apprenons que vous envisagez de supprimer l'exonération des cotisations sociales sur le salaire d'une personne employée à domicile dont bénéficient les personnes âgées de plus de 70 ans.

Pourtant, et c'est l'INSEE, qui le dit, depuis 2018, le pouvoir d'achat des retraités a baissé de 400 euros par ménage et par an.

M. Patrick Hetzel. Eh oui !

M. Gilles Lurton. Voilà le résultat de votre acharnement sur les personnes âgées, qui pourtant ont travaillé toute leur vie pour pouvoir bénéficier de leur retraite. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR, ainsi que sur quelques bancs des groupes SOC et FI.)

Cette mesure, qui encouragera le travail au noir, balaie d'un revers de main tout ce que représente l'emploi à domicile pour notre économie, pour le salarié et pour l'employeur. Au-delà du service rendu, c'est tout le lien social entretenu auprès des personnes âgées qui est mis à mal. Pire, cette mesure va à l'encontre du maintien à domicile et de l'autonomie des personnes âgées...

M. Damien Abad. Évidemment !

M. Gilles Lurton. ...auxquels nous tenons tous. Quel paradoxe, alors que nous attendons une loi sur le grand âge, promise pour la fin de l'année !

Encore une fois, vous allez nous répondre : « Où sont vos propositions d'économies ? » Des propositions, nous en avons formulé, et vous feriez mieux de réduire la dépense publique, qui, depuis votre arrivée, a augmenté de plus de 50 milliards d'euros. Cette décision anéantit nos espoirs et ceux des personnes âgées.

Alors, monsieur le Premier ministre, faudra-t-il désormais, dans notre pays, que les personnes âgées soient à l'agonie ou totalement dépendantes pour être soutenues ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR, ainsi que sur plusieurs bancs des groupes SOC et GDR. – Mme Caroline Fiat applaudit également.)

M. Fabien Di Filippo. Il a raison !

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Thibault Bazin. Ah ! La question a fait mouche !

M. le président. Rien de plus normal qu'un Normand réponde à un Breton…

M. Pierre Cordier. Pourvu que ce ne soit pas une réponse de Normand !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Le projet de loi de finances pour 2020, qui sera présenté dans les prochains jours, consacre l'une des baisses d'impôts les plus massives de l'histoire récente de notre pays. En 2020, elle s'élèvera au total à près de 10 milliards d'euros : l'impôt sur le revenu diminuera de 5 milliards, le dernier tiers de la taxe d'habitation sera supprimé pour 80 % des Français, la défiscalisation des heures supplémentaires sera poursuivie et l'impôt sur les sociétés continuera de baisser. Bref, au total, un peu plus de 10 milliards d'euros d'impôts en moins. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.)

Quand on baisse aussi significativement les impôts,...

M. Éric Ciotti. Après les avoir augmentés !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. ...il est normal, je dirais même qu'il est sain de se poser la question des niches fiscales. Celles-ci se sont multipliées au fil du temps : au fur et à mesure que la pression fiscale moyenne augmentait, des contreparties, prenant la forme de niches fiscales, ont été apportées pour excuser la pression fiscale trop élevée.

Mme Valérie Beauvais. Pourquoi les personnes âgées ?

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Nous voulons réduire les prélèvements obligatoires, et nous nous sommes engagés à remettre de l'ordre dans un système fiscal devenu effroyablement complexe, notamment à cause des niches. À l'époque où je m'étais prononcé sur le sujet, j'avais dit que nous prendrions le temps nécessaire pour accompagner les secteurs dans lesquels les niches représentent une part importante du modèle de développement. Dans le cadre de la préparation du projet de loi de finances, tous les ministres ont proposé de revoir ou de supprimer certaines niches fiscales : dans un grand nombre de cas, les évolutions sont neutres, compte tenu de la baisse des impôts, pour les secteurs concernés ; dans d'autres, et je le sais parfaitement, monsieur le député, elles suscitent des interrogations et, parfois, de vives inquiétudes.

M. Patrick Hetzel. De l'incompréhension, surtout !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. C'est le cas des aides à domicile, en particulier pour les personnes âgées. J'ai entendu ces inquiétudes, relayées dès hier, notamment par les présidents Mignola et Le Gendre.

Plusieurs députés du groupe LR . Par nous aussi !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Je partage ces inquiétudes. J'ai fait le point avec la ministre du travail ce matin. Nous sommes convenus ensemble que cette décision aurait mérité une concertation beaucoup plus approfondie. (Exclamations et applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

M. Éric Ciotti. Ramez !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Cette concertation n'a pas eu lieu dans les conditions conformes aux objectifs et à la méthode que j'ai fixés pour l'acte II du quinquennat. C'est la raison pour laquelle j'ai demandé à la ministre du travail de renoncer à cette mesure. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, MODEM, LR, SOC, UDI-I, LT et GDR.)

Je veux donc rassurer les professionnels et les employeurs : ces mesures n'entreront pas en vigueur. Mais, monsieur le député, mesdames et messieurs les parlementaires, nous devrons trouver d'autres pistes d'économies dans ce champ.

M. Sébastien Jumel. Il y a le CICE !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Mme la ministre nous fera rapidement parvenir d'autres propositions,...

M. Sébastien Jumel. Nous en avons !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. ...qui feront l'objet d'une concertation avec les parlementaires et les secteurs concernés.

En 2020, nous baisserons les impôts dans des proportions inégalées, et le déficit budgétaire atteindra son plus bas niveau depuis vingt ans.

M. Patrick Hetzel. C'est faux !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Voilà l'essentiel. Voilà ce sur quoi je ne veux pas varier. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)

Données clés

Auteur : M. Gilles Lurton

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Impôt sur le revenu

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 25 septembre 2019

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