Question au Gouvernement n° 2589 :
Établissements de travail protégé

15e Législature

Question de : M. Arnaud Viala
Aveyron (3e circonscription) - Les Républicains

Question posée en séance, et publiée le 15 janvier 2020


ÉTABLISSEMENTS DE TRAVAIL PROTÉGÉ

M. le président. La parole est à M. Arnaud Viala.

M. Arnaud Viala. Madame la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées, en octobre 2017, un rapport de l’Organisation des Nations Unies sur les droits des personnes handicapées jetait l’opprobre sur les institutions de notre pays qui les hébergent, leur permettent de travailler et les accompagnent. Il concluait que « le bon établissement n’existe pas ». À la fin du mois de février 2019, un rapport est venu compléter ce constat caustique, qui enjoint le Gouvernement français à fermer les institutions médico-éducatives existantes, à revoir la loi de 2005 et à favoriser la désinstitutionnalisation à tous les niveaux.

C'est au sujet de vos choix concernant les établissements de travail protégé, plus particulièrement les entreprises adaptées, que je souhaite vous interroger. Ces établissements ont déjà subi plusieurs réformes – la loi de 2005, qui les a sortis du champ médico-social, et les modifications de tarification de 2014 –, auxquelles viennent s'ajouter vos annonces récentes.

Celles-ci laissent entendre que la part de l'État dans les financements dépendra désormais du type de résident, ce qui provoquera nécessairement une forme de sélection discriminatoire. Vos annonces semblent aussi indiquer que l'aide à l’emploi des entreprises adaptées est appelée à diminuer considérablement, avec un plafonnement à 75 % des effectifs d’ici à 2022. Enfin, la marchandisation du secteur serait bel et bien à l'œuvre : jusqu'à maintenant, un taux de 80 % de travailleurs handicapés était nécessaire pour bénéficier du statut et des aides : dorénavant, un plafond de 55 % les conditionnera.

Comment ces établissements pourront-ils s'adapter à des changements aussi fondamentaux, mettant en cause leur visibilité, voire leur pérennité ? Cette logique du tout inclusif semble oublier que les personnes en situation de handicap s’épanouissent dans ces établissements et ne souhaitent pas nécessairement rejoindre un milieu dit ordinaire, qui n'est pas toujours des plus bienveillants.

M. Vincent Descoeur. Il a raison !

M. Arnaud Viala. Sur le fond, avez-vous l'intention de supprimer ces établissements à court terme ? Croyez-vous, de ce fait, que le monde du travail ordinaire est en capacité de répondre aux besoins et aux attentes de toutes les personnes handicapées ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées.

Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État chargée des personnes handicapées. Monsieur le député, vous faites référence au choix des personnes. Or c'est justement une société de choix que nous construisons. Nous avons la chance, en France, de disposer d'une palette de solutions : établissements et services d'aide par le travail –  ESAT –, entreprises adaptées, contrats à durée déterminée – CDD – tremplins, emplois accompagnés et emplois en milieu dit ordinaire, classique. Cela nous permet de répondre de façon graduée au besoin d'accompagnement des personnes en situation de handicap. Non, nous ne souhaitons pas détricoter tous ces dispositifs – au contraire même, nous souhaitons amplifier leurs capacités.

Avec Mme Muriel Pénicaud, la ministre du travail, nous avons mis sur la table 500 millions d'euros supplémentaires sur la durée du quinquennat afin de doubler l'offre des entreprises adaptées, qui est aujourd'hui de 35 000 postes. Nous avons mis en place des CDD tremplins car tous les salariés en situation de handicap ont fait des parcours et des choix de parcours différents. Nous sécurisons les parcours professionnels. Cette société de choix est tout l'enjeu du travail que nous réalisons avec Muriel Pénicaud.

Je ne peux pas vous laisser dire que nous voulons détruire les entreprises adaptées.

M. Thibault Bazin. C'est pourtant ce qui est vécu localement !

M. Maxime Minot. Nous avons encore le droit de poser des questions !

Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État . Au contraire, l'Union nationale des entreprises adaptées, aux côtés d'APF France handicap, de l'APAJH – l'Association pour adultes et jeunes handicapés – et de l'UNAPEI – l'Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis –, participe à l'engagement national « Cap vers l'entreprise inclusive 2018-2022 ». Le mouvement des associations gestionnaires a construit avec nous tous ces dispositifs et ces évolutions. Maintenons cette palette de dispositifs, mais conformons-nous surtout aux choix des personnes !

Nous devons également répondre aux besoins des 510 000 travailleurs en situation de handicap au chômage et donc mobiliser l'ensemble de l'écosystème, y compris les entreprises ordinaires,…

M. Jean-Pierre Door. Y compris les associations !

Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État . …pour atteindre enfin l'objectif de 6 % de personnes en situation de handicap dans les entreprises d'au moins vingt salariés qui, je vous le rappelle, est issu de la loi de 1987 en faveur de l'emploi des personnes handicapées. Nous n'en sommes qu'à 3,5 % : il y a donc de la marge ! Nous devons donc accompagner toutes les situations, tous les parcours. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.)

M. Vincent Descoeur. Les associations ne sont pas aussi sereines que vous le dites !

Données clés

Auteur : M. Arnaud Viala

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Personnes handicapées

Ministère interrogé : Personnes handicapées

Ministère répondant : Personnes handicapées

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 15 janvier 2020

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