Question au Gouvernement n° 2610 :
Réforme du baccalauréat

15e Législature

Question de : Mme Michèle Victory
Ardèche (2e circonscription) - Socialistes et apparentés

Question posée en séance, et publiée le 22 janvier 2020


RÉFORME DU BACCALAURÉAT

M. le président. La parole est à Mme Michèle Victory.

Mme Michèle Victory. Monsieur le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, au risque de m'entendre répondre que je radote, je voudrais vous alerter une nouvelle fois sur les conséquences de la réforme du bac que vous avez introduite dans une précipitation incompréhensible. La quasi-totalité des syndicats vous ont demandé de reporter les E3C en histoire-géographie, en langues vivantes et en mathématiques pour la voie technologique, afin de laisser le temps aux différents acteurs de mettre en place un système qui inquiète une majorité de chefs d'établissement, d'enseignants, d’élèves et de parents.

Votre réforme ne simplifie pas le bac mais empile les modalités de certification. Elle ne fait pas la liaison avec l'après-bac, proposant un calendrier prévisionnel décalé par rapport à Parcoursup, et instaure des périodes d'évaluation quasi permanentes qui placent les enseignants et les élèves en situation de bachotage et diminuent d'autant le temps de l'apprentissage et la cohérence des progressions pédagogiques. Concrètement, l'ensemble des personnels doivent faire face à l'accumulation de nouvelles tâches, sans que ne soient reconnus clairement les temps nécessaires à l'organisation du nouveau bac. Dans certains établissements, la dématérialisation des supports pose de gros problèmes. Les notes des épreuves de contrôle continu ne figureront pas sur les bulletins, ce qui fait de celles-ci des épreuves anticipées du bac ; leur harmonisation et leur correction méritent donc une juste reconnaissance.

Pourquoi vous entêtez-vous à considérer que ceux qui critiquent votre réforme ont forcément tort et qu'à l'inverse de vous, ils n'auraient pas le souci de leurs élèves ou le sens des responsabilités ? Les équipes vous demandent une liberté pédagogique, des décharges et des indemnités, des créations de postes, la formation et l'accompagnement aux réformes. À leurs revendications vous répondez par la sanction, alors que dans le même temps, les derniers chiffres montrent que les nombres de candidats aux concours du CAPES – certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement du second degré – et de l’agrégation ont chuté de plus de 10 % en 2019, et que l'inquiétude très forte quant à la réforme des retraites n’est absolument pas dissipée par les annonces que vous faites. La compensation est une chose, la revalorisation et la prise en compte concrète des difficultés des enseignants en sont une autre. Allez-vous enfin, monsieur le ministre, repenser la réforme du bac à l'aune d'une véritable concertation ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Madame Victory, je vous remercie d'abord pour le ton de votre question, qui permet d'aborder le fond des nombreux sujets que vous avez soulevés en deux minutes. J'essaierai de répondre sur chacun de ces points.

Premièrement, vous avez dit qu'il n'y avait pas eu de concertation et que la réforme a été menée dans la précipitation. Je vous rappelle que la réforme s'échelonne de 2017 à 2021. Le Premier ministre l'avait annoncée ici même dans sa déclaration de politique générale de 2017, et nous sommes en train de la mener à bien. La consultation et la concertation, que j'ai conduites moi-même, ont duré près d'un an.

M. Laurent Furst. C'est comme pour la réforme des retraites : ça a bien fonctionné…

M. Jean-Michel Blanquer, ministre . Nous avons consulté 40 000 lycéens et l'ensemble des organisations syndicales. Le système de contrôle continu résulte d'ailleurs de cette concertation : ce n'était pas mon idée de départ, mais c'est le point d'équilibre entre le souhait de simplicité des uns et l'exigence d'objectivité des autres. Le système auquel nous avons abouti est vu comme un progrès par bon nombre d'observateurs puisqu'il permet de prendre en compte le travail continu des élèves et de leur éviter le stress excessif, chacune des notes représentant 1,7 % de la note finale. Il permet un approfondissement des connaissances et une amélioration du niveau général de nos élèves, ce qui représente, à mes yeux, la première des mesures de justice sociale.

Comme je le soulignais tout à l'heure, il n'y a pas de désordres particuliers en dehors de ceux créés par ceux-là mêmes qui en parlent ! Il faudrait savoir si vous êtes d'accord ou non avec ce genre d'actions : à chacun de prendre ses responsabilités ! Tous ceux qui perturbent les épreuves portent une responsabilité très grave vis-à-vis des élèves. Ces derniers jours, des choses scandaleuses se sont passées. Samedi, dans l'académie d'Auvergne, les élèves de plusieurs lycées ont composé de manière totalement normale, ce qui prouve que, quand on fait les choses dans les règles, tout se passe bien. Un seul lycée a fait l'objet de perturbations – celui dont les médias ont parlé, évidemment. Ces perturbations sont notamment le fait d'éléments extérieurs ; il s'agit d'intrusions et c'est illégal.

M. David Habib. Mais ce n'est pas vrai ! Vous habitez où ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre . Quand on est pour la République, on est contre ce genre d'actions. On a le droit de s'opposer à la réforme, mais on ne peut pas dire qu'il n'y a pas eu de concertation ni que les règles de l'État de droit n'ont pas été respectées. L'État de droit, c'est ce que nous faisons ; les violations de l'État de droit, c'est ce que vous semblez soutenir. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe MODEM.)

M. David Habib. Vous racontez littéralement n'importe quoi !

Données clés

Auteur : Mme Michèle Victory

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Enseignement secondaire

Ministère interrogé : Éducation nationale et jeunesse

Ministère répondant : Éducation nationale et jeunesse

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 22 janvier 2020

partager