Enfants nés de festation pour autrui à l'étranger
Question de :
M. Jacques Marilossian
Hauts-de-Seine (7e circonscription) - La République en Marche
Question posée en séance, et publiée le 22 janvier 2020
ENFANTS NÉS DE GESTATION POUR AUTRUI À L'ÉTRANGER
M. le président. La parole est à M. Jacques Marilossian.
M. Jacques Marilossian. Madame la garde des sceaux, ministre de la justice, le Sénat commence aujourd’hui l'examen du projet de loi relatif à la bioéthique. Ce texte comprend plusieurs dispositifs s’inscrivant dans un modèle de bioéthique français qui repose sur trois principes : dignité, liberté et solidarité.
À l’Assemblée nationale, nous avons eu des débats riches et respectueux des convictions éthiques personnelles. Nous avons d’ailleurs adopté ce texte à une large majorité transpartisane. Lors de nos auditions, j’avais souligné que l’ouverture de la PMA – procréation médicalement assistée – aux couples de femmes procède d’un parcours complexe et d’un don d’amour, d’ailleurs facteur principal de l’épanouissement de l’enfant.
Le projet de loi a aussi confirmé l’interdiction de la gestation pour autrui. En effet, la GPA n’est pas la PMA. Le Conseil d’État a souligné que l’ouverture de la PMA n’entraînera pas juridiquement l’autorisation de la GPA en France. Cependant, des enfants de parents français sont déjà nés de GPA à l’étranger. En France, le juge assure déjà le contrôle des GPA réalisées à l’étranger, tout en veillant à la protection des intérêts et des droits des enfants. Récemment, la commission spéciale du Sénat a adopté un amendement qui propose d’interdire totalement l’adoption par le parent d’intention. Je vous poserai deux questions, madame la garde des sceaux.
Premièrement, pouvez-vous réaffirmer le principe de l’interdiction de la GPA en France ?
M. Claude Goasguen. Il n'y a pas de principe !
M. Jacques Marilossian. Deuxièmement, pour les enfants nés de GPA à l’étranger, quel dispositif législatif prévoyez-vous, afin de maintenir la possibilité de filiation par le parent d’intention ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)
M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice. Comme vous l'avez souligné, monsieur Marilossian, parce qu'il concerne avant tout les enfants, le sujet de la gestation pour autrui est extrêmement complexe et sensible. Nous avons eu l'occasion d'en discuter clairement lors du débat en première lecture du projet de loi relatif à la bioéthique, notamment à l'occasion de la seconde délibération sur un amendement que j'avais moi-même demandée au nom du Gouvernement. Depuis, notre position n'a pas changé, je le réaffirme clairement devant vous : la France a fait le choix d'interdire la GPA au nom de principes éthiques sur lesquels nous demeurons absolument fermes.
M. Xavier Breton. Pour l'instant !
M. Claude Goasguen. Et la protection juridique ?
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux . Il y a toutefois une réalité que nous ne pouvons ignorer et que vous avez évoquée : certains couples se rendent à l'étranger pour effectuer une GPA ;…
M. Xavier Breton. Hors-la-loi !
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux . …nous ne devons ni ne pouvons ignorer les enfants qui naissent de leur démarche, et nous ne devons ni ne pouvons refuser un état civil à ces enfants. C'est la raison pour laquelle nous avons recherché un équilibre entre l'effectivité de l'interdiction de la GPA et l'octroi d'un état civil aux enfants nés d'une telle pratique. Ce point est très important : les enfants nés de GPA ont le droit de voir leur filiation établie et de vivre une vie familiale normale.
M. Xavier Breton. Vous reconnaissez donc la GPA !
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux . Une évolution importante est cependant intervenue avec la jurisprudence de la Cour de cassation du 18 décembre dernier, qui semble avoir bousculé l'équilibre auquel nous étions parvenus. En décidant que la conformité d'un acte de naissance s'apprécie non pas au regard de la loi française, mais au regard de la loi étrangère, cette jurisprudence soustrait en effet la GPA au contrôle du juge français. C'est pourquoi je défendrai au Sénat, au cours des prochaines heures, un amendement qui vise à revenir à l'équilibre antérieur du projet de loi, mais j'aurai l'occasion de m'en expliquer. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.)
M. Claude Goasguen. Il n'y a pas de protection juridique !
Auteur : M. Jacques Marilossian
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Bioéthique
Ministère interrogé : Justice
Ministère répondant : Justice
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 22 janvier 2020