Question au Gouvernement n° 2628 :
Lutte contre les violences à l'encontre des élus

15e Législature

Question de : Mme Michèle Peyron
Seine-et-Marne (9e circonscription) - La République en Marche

Question posée en séance, et publiée le 29 janvier 2020


LUTTE CONTRE LES VIOLENCES À L'ENCONTRE DES ÉLUS

M. le président. La parole est à Mme Michèle Peyron. (Mmes et MM. les députés du groupe LaREM se lèvent et applaudissent.)

Mme Michèle Peyron. J'ai dû mentir, hier soir, à mes très chers parents, quand ils m'ont demandé si tout allait bien pour moi, tout en me faisant part de leur inquiétude au sujet du climat social de notre pays. Je n'ai pas pu leur raconter ce qui m'est arrivé samedi matin, tandis que j'assistais à une cérémonie de vœux dans l'une des communes de ma circonscription, en Seine-et-Marne.

M. Bruno Bilde. Comme tout élu de la République !

Mme Michèle Peyron. La cérémonie des vœux est un moment de convivialité. Toutefois, au cours de celle-ci, un citoyen m'a agressée verbalement et m'a menacée. C'est grâce à l'intervention de l'un des maires présents et d'un gendarme qu'il n'a pas pu m'atteindre. Je tiens à les en remercier une nouvelle fois.

Ma permanence parlementaire est un espace de dialogue, et ce depuis le début de mon mandat. Au demeurant, j'avais reçu ce monsieur dès le mois de décembre 2017. J'écoute tout le monde et dialogue avec chacun, élus et citoyens, opposés à la majorité ou non. Je sais que tel est le cas de mes collègues de la majorité.

Depuis le début de la législature, de nombreuses atteintes aux parlementaires ont eu lieu. Des permanences ont été vandalisées,…

Mme Valérie Boyer. Celle de Julien Aubert ce matin !

Mme Michèle Peyron. …des domiciles attaqués, des correspondances insultantes allant jusqu'aux menaces de mort envoyées, et même des véhicules brûlés ! Nous sommes témoins et victimes d'une constante augmentation des violences dans les rapports sociaux et les comportements de nos concitoyens.

M. Olivier Marleix. Rétablissez la réserve parlementaire et le cumul des mandats, vous verrez !

Mme Michèle Peyron. Combien de collègues doivent encore être victimes de tels faits ? Faut-il que l'un d'entre nous reste à terre avant que certains membres de l'opposition sortent de leur mutisme et condamnent fermement de tels comportements ? (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)

M. Stéphane Peu. Cela nous est arrivé à tous !

Mme Michèle Peyron. Nous travaillons tous ensemble. Le vivre-ensemble débute entre ces murs. Cette majorité a toujours travaillé pour une démocratie apaisée.

M. Maxime Minot. Et nous alors ?

Mme Michèle Peyron. Monsieur le Premier ministre, constatez-vous également une recrudescence des violences dans les rapports sociaux ? Que pouvons-nous faire ? (Mmes et MM. les députés du groupe La REM se lèvent et applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Madame Peyron, votre intervention, ainsi que l'agression dont vous avez fait l'objet samedi matin, soulèvent la question de la limite entre ce qui est acceptable dans un débat public et ce qui ne l'est pas.

M. Maxime Minot. C'est vous qui êtes aux responsabilités !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . Tout d'abord, ce que je sais de l'agression dont vous avez fait l'objet, c'est qu'elle aurait pu très mal se terminer. Elle a été interrompue grâce au courage d'un maire et d'un gendarme qui se trouvaient à la cérémonie, et qui ont évité que, de verbale, elle ne devienne physique et brutale.

M. Éric Straumann. Bravo !

Mme Valérie Boyer. À nos élus locaux et à nos forces de l'ordre !

M. Éric Straumann. Il faut une réponse judiciaire !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . Cela ne laisse personne indifférent.

Mme Elsa Faucillon. Contrairement à ce qu'a dit Mme Peyron !

Mme Christine Pires Beaune. Merci de le dire, monsieur le Premier ministre !

Mme Marine Le Pen. Les membres de la majorité croient que cela n'arrive qu'à eux !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . Quiconque siège dans cette assemblée, quiconque connaît la vie politique sait que le simple fait de se présenter à une élection, au suffrage de ses concitoyens, et de défendre des positions politiques auxquelles on croit, expose à des réactions et à des critiques, qui sont parfaitement légitimes, ainsi qu'à des engueulades – on parle souvent de ces élus qui sont à portée d'engueulade, cela vous est arrivé, madame Peyron, et à moi également. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

Dans une démocratie, le débat peut être vif et passionné. L'invective…

Mme Bérengère Poletti. Déplacée !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . …peut exister – je ne dis pas que c'est le genre que je préfère, mais enfin il existe. La violence et la menace physiques, elles, doivent être proscrites.

Or je constate que, depuis de nombreuses années – ce n'est malheureusement pas récent –, et sans doute de plus en plus, on passe d'une situation dans laquelle la critique et l'invective sont d'abord tolérées, puis admises, à une autre dans laquelle l'agression et la menace vis-à-vis des élus – qu'ils soient parlementaires ou élus locaux – deviennent physiques. Ce faisant, en admettant que cette évolution pourrait s'expliquer, qu'elle serait, au fond, la contrepartie d'une violence publique…

M. Loïc Prud'homme. La violence publique ? Vous avez raison, je m'en souviens !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . …et que, d'une certaine façon, nous avons toujours connu cela, on finit par l'accepter. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM. – M. Jean-Christophe Lagarde applaudit également.)

C'est pourquoi nous devons tous – absolument tous, quels que soient les partis auxquels nous adhérons – dire, dès lors que nous sommes en responsabilité, que le débat peut être vif, que l'invective – ou plus exactement la controverse – peut être dure et que la mise en cause a le droit d'être intense, mais que le franchissement de la frontière de la menace et de la violence physiques doit être proscrit.

Si nous ne le disons pas tous, si, dans certains cas, nous semblons l'excuser alors que, dans d'autres, nous nous en offusquerions, si nous acceptons cet état de fait, alors, collectivement, nous ne sommes pas à la hauteur de ce que nous devons être : des défenseurs de la démocratie. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM. – Protestations sur les bancs du groupe LR.)

J'ajoute, mesdames et messieurs les députés de la majorité et de l'opposition, que ce combat n'est pas celui de l'autre, mais de tous ceux qui croient à la démocratie. La démocratie est parfois menacée ; elle doit donc être défendue.

M. Loïc Prud'homme. On est d'accord !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . Chacun, individuellement, a son rôle à jouer. (Mmes et MM. les députés des groupes LaREM et MODEM, ainsi que plusieurs députés du groupe UDI-Agir, se lèvent et applaudissent. – Mme Agnès Thill applaudit également.)

Données clés

Auteur : Mme Michèle Peyron

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Élus

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 29 janvier 2020

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