Question au Gouvernement n° 2682 :
Brexit et zones franches économiques

15e Législature

Question de : M. Paul Christophe
Nord (14e circonscription) - UDI, Agir et Indépendants

Question posée en séance, et publiée le 12 février 2020


BREXIT ET ZONES FRANCHES ÉCONOMIQUES

M. le président. La parole est à M. Paul Christophe.

M. Paul Christophe. Ma question s’adresse à Monsieur le Premier ministre.

Le Premier ministre britannique Boris Johnson a annoncé ce week-end qu’il souhaitait créer outre-Manche, d’ici à la fin 2021, jusqu’à dix ports francs bénéficiant de règles fiscales et sociales avantageuses. Dans un communiqué, le gouvernement britannique explique vouloir « accroître l’activité commerciale de ces ports, y attirer les investissements étrangers et augmenter la productivité », afin d’y créer « des milliers d’emplois » et, pour ce faire, se dit prêt à planifier des investissements d’infrastructures, évoquant la possibilité d’y instaurer une « flexibilité tarifaire, des facilités douanières et des mesures fiscales ». Le but : « […] faire en sorte que les ports britanniques profitent » du Brexit.

Or l’instauration de ces ports francs risque d’éloigner les investissements de nos côtes au profit de celles du Royaume-Uni ! En dépit de l’attractivité qu'exerce la France en Europe, certains grands projets de développement industriel se concrétisent déjà aujourd'hui dans d’autres pays européens. L’instauration de ces zones franches britanniques risque d’accentuer cet effet d’évitement. Il est donc nécessaire de prévoir des solutions concrètes et rationnelles pour que nos territoires bénéficient des retombées positives de l’installation de nouveaux établissements industriels.

Dans ce contexte défavorable à la France, ne serait-il pas bienvenu d’ériger en zone économique spéciale les deux grandes zones des Hauts-de-France labellisées « site clé en main », notamment la zone Grandes industries du port de Dunkerque ? Je rappelle par ailleurs que M. le Président de la République, lors de sa venue à Calais, sollicité en ce sens par le président de région Xavier Bertrand, avait accepté le principe de la création d’une zone franche économique sur le littoral.

J'aimerais connaître la position de la France devant cette annonce du gouvernement britannique et savoir comment M. le Premier ministre appréhende l'idée de zones économiques spéciales et entend traduire l’engagement présidentiel en faveur des zones franches économiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-Agir. – MM. Benoit Potterie, Pierre-Henri Dumont et Daniel Fasquelle applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Mesdames, messieurs les députés, François André était un de mes amis depuis longtemps. En cet instant, je pense à lui, à ses combats, à son histoire, et à ses proches. (Applaudissements sur de nombreux bancs.)

Monsieur le député, nous avons pris note des récentes annonces du gouvernement britannique sur ses objectifs de négociations et sur les mesures qu'il compte prendre pour relancer l'attractivité de son territoire, telle son intention, vous venez de l'évoquer, de créer une dizaine de ports francs d'ici à la fin de l'année 2021.

Étant donné que les ports francs permettent de différer la perception des droits de douane et d'autres taxes au moment où les marchandises sont mises sur le marché, le gouvernement français va examiner cette annonce au regard des indispensables enjeux de transparence fiscale, en lien avec la Commission européenne, chargée du mandat de négociation à partir du 25 février prochain, sous la responsabilité de M. Michel Barnier et dans la cohérence de l'Union des vingt-sept.

Mais je tiens à répéter ici que nous serons d'une vigilance absolue pour empêcher toute forme de concurrence déloyale, quel que soit le domaine, et que nous prendrons le temps nécessaire pour négocier. Nous n'avons pas l'intention de voir apparaître près de nos côtes, en l'occurrence près des côtes des Hauts-de-France, un paradis fiscal, environnemental et commercial susceptible de concurrencer anormalement les produits européens sur nos propres marchés. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-Agir et sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.) Et je tiens à rappeler, monsieur le député, que l'accès au marché intérieur ne sera pas automatique, et qu'il constitue à cet égard un levier de négociation. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-Agir. – M. Jimmy Pahun applaudit également.)

M. Christian Hutin. On n'est pas naïfs !

M. Jean-Yves Le Drian, ministre . Le gouvernement français abordera cette négociation dans la clarté et dans la fermeté, mais jamais en position de faiblesse ou de demandeur. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM, MODEM et UDI-Agir)

Données clés

Auteur : M. Paul Christophe

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Union européenne

Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères

Ministère répondant : Europe et affaires étrangères

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 12 février 2020

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