Crise migratoire
Question de :
M. Julien Aubert
Vaucluse (5e circonscription) - Les Républicains
Question posée en séance, et publiée le 4 mars 2020
CRISE MIGRATOIRE
Mme la présidente. La parole est à M. Julien Aubert.
M. Julien Aubert. M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères nous a beaucoup parlé de la Syrie, j'aimerais lui poser une question à propos de la Grèce et de la frontière de l'Union européenne.
Vous l'avez rappelé, dans un contexte de tension militaire avec la Russie en Syrie et dans le but d'obtenir le soutien de l'Union européenne et de l'OTAN, la Turquie a annoncé qu'elle ne retiendrait plus à ses frontières les migrants désireux de rejoindre l'Europe. Selon l'ONU, 13 000 migrants se masseraient à la frontière gréco-turque avec l'intention de pénétrer sur le territoire de l'Union européenne. Le ministre de l'intérieur turc estime, lui, que ce sont 76 000 migrants qui convergeraient vers cette zone, parfois même avec l'aide de bus mis à disposition par des municipalités tenues par le parti de M. Erdogan. La Grèce est débordée, les tensions se font chaque jour de plus en plus vives, l'armée grecque multiplie les exercices militaires à balles réelles tandis que la population locale excédée tente, par ses propres moyens, de repousser les migrants. Un enfant est également mort noyé lors d'une tentative de traversée sur une embarcation surchargée. Ce chantage mené par la Gouvernement turc est scandaleux et irresponsable, en totale violation de l'accord relatif à la réadmission des migrants conclu en 2016 avec l'Union européenne
Mme Valérie Boyer. Bravo !
M. Julien Aubert. Cela s'ajoute à d'autres actes inamicaux comme la livraison d'armes et l'envoi de combattants djihadistes. Monsieur le ministre, pouvez-nous indiquer ce que fera la France, en pleine crise épidémiologique mondiale, pour faire cesser cette situation ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – M. Nicolas Dupont-Aignan et Mme Agnès Thill applaudissent aussi.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Vous avez rappelé quelle était la situation migratoire à la frontière entre la Grèce et la Bulgarie d'une part et la Turquie d'autre part. Nous observons en effet un afflux de migrants à la frontière terrestre et des arrivées sur les îles. Présents depuis longtemps en Turquie, ces migrants, qu'ils soient iraniens, afghans, syriens ou – pour beaucoup – africains, sont sans doute poussés par les autorités turques à essayer de franchir la frontière. La Grèce a pris des mesures fortes visant à empêcher cela. Comme le Président de la République l'a fait avec son homologue grec, j'ai moi-même exprimé au ministre grec des affaires étrangères, hier et avant-hier, la pleine et entière solidarité de la France. Ce message a été transmis aux autorités bulgares car ce qui passe en Grèce nous concerne tous dans le cadre de l'espace Schengen.
Je veux vous dire clairement qu'il est inacceptable que la Turquie instrumentalise la question des migrants pour faire pression sur l'Europe. Nous avons conclu en mars 2016 un accord que tous les pays membres de l'Union européenne appliquent depuis quatre ans. La Turquie doit également le respecter, d'autant plus que les engagements financiers sont très significatifs.
Plusieurs députés du groupe LR. Qu'est-ce qu'on fait ?
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Pour que notre organisation soit plus efficace, nous avons décidé de tenir deux réunions, un conseil des ministres de l'intérieur demain et, en soutien à la Grèce, une réunion du conseil européen vendredi…
Mme Valérie Boyer. Et pourquoi pas plus tard !
M. Jean-Yves Le Drian, ministre . …afin de déployer des moyens d'intervention rapide destinés à soulager les autorités grecques, d'activer le mécanisme Frontex et de faire en sorte que les Grecs aient les moyens de réagir et de s'opposer à cette intrusion et à ce chantage. Telle est la position de la France.
Mme Frédérique Meunier. Vous ne savez pas ce que vous allez faire !
Mme la présidente. La parole est à M. Julien Aubert.
M. Julien Aubert. Permettez-moi, monsieur le ministre, de vous proposer quelques contre-mesures concrètes. Le minimum serait de rappeler notre ambassadeur français à Ankara…
M. Christian Hutin. Très bien !
M. Julien Aubert. …et de suspendre notre participation aux exercices militaires dans les bases de l'OTAN en Turquie.
M. Christian Hutin. Très bien !
M. Julien Aubert. Nous pourrions déployer la marine française dans le cadre de l'accord bilatéral de partenariat franco-grec. Pour prévenir le risque de submersion migratoire, une suspension de l'espace Schengen et un rétablissement des contrôles aux frontières paraissent incontournables. Enfin, indépendamment de ces mesures circonstancielles, il me semble que la Turquie vient de commettre un acte qui la disqualifie du processus d'adhésion à l'Union européenne. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – M. Nicolas Dupont-Aignan applaudit également.)
Auteur : M. Julien Aubert
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Immigration
Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères
Ministère répondant : Europe et affaires étrangères
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 4 mars 2020