Question au Gouvernement n° 2765 :
Reforme des retraites

15e Législature

Question de : Mme Valérie Beauvais
Marne (1re circonscription) - Les Républicains

Question posée en séance, et publiée le 4 mars 2020


RÉFORME DES RETRAITES

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Beauvais.

Mme Valérie Beauvais. Monsieur le Premier ministre : « Plus de quatre-vingts 49.3 ont été utilisés sous la Ve République. Il faut arrêter d'être fasciné par l'impuissance collective. » Ces mots ont été tweetés le 4 mai 2017 par Emmanuel Macron. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LR.) Près de trois ans plus tard, il a visiblement changé d'avis et vous aussi…

M. Sylvain Maillard. Mais non !

Mme Valérie Beauvais. …puisque vous avez imposé l'article 49, alinéa 3 de la Constitution alors que votre gouvernement dispose d'une très large majorité.

M. Sylvain Maillard. Précisément !

Mme Valérie Beauvais. Que vous l'ayez déclenché en catimini, un samedi après-midi, en profitant de manière très cynique d'un conseil des ministres censé traiter de la seule question du coronavirus, n'a donc qu'un seul objectif, priver le Parlement et les Français d'un vrai débat sur la question des retraites.

Cela signifie que cette réforme qui déterminera l'avenir de millions de Français pendant des décennies ne sera pas votée par l'Assemblée nationale, ni en commission spéciale, ni en séance publique. Cela signifie que des questions complexes et potentiellement redoutables, comme la fixation de la valeur du point, la mise en place d'une super-décote, la prise en compte de la pénibilité, n'auront jamais pu être évoquées. Au fond, vous avez encouragé l'obstruction, puis activé l'article 49, alinéa 3 de la Constitution pour éviter d'expliquer votre réforme, et pour en masquer les lacunes. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – M. Joël Aviragnet et M. Alain David applaudissent également.)

M. Michel Herbillon. Elle a raison !

Mme Valérie Beauvais. Et ne nous faites pas croire que vous avez généreusement accepté d'intégrer dans le texte sur lequel vous avez engagé la responsabilité du Gouvernement des propositions de l'opposition ! Nous avons fait les comptes : vous n'avez repris, en tout et pour tout, que cinq amendements venant des seuls Républicains, et ces cinq amendements étaient soit purement rédactionnels, soit très symboliques – dans les deux cas, ils sont sans incidence sur votre réforme.

M. Damien Abad. Eh oui !

Mme Valérie Beauvais. Pourtant, nous avons choisi, nous, Les Républicains, d'incarner une opposition responsable en refusant l'obstruction et en défendant un projet de réforme financé, crédible et juste. Nous vous avons proposé une alternative à l'application de l'article 49, alinéa 3 de la Constitution…

M. Maxime Minot. Excellent !

Mme Valérie Beauvais.  …en vous demandant, dans une proposition de résolution, de déposer un nouveau texte, retravaillé, qui serait examiné en temps programmé pour éviter tout nouveau risque d'obstruction. Pourquoi avoir refusé ces propositions destinées à sortir de l'enlisement par le haut ? Pourquoi avez-vous tout fait pour imposer ce recours à l'article 49, alinéa 3 de la Constitution… ? (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des retraites.

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État chargé des retraites. Madame Valérie Beauvais, j'ai participé, sans doute comme vous, à plus de soixante-quinze heures de débat dans l'hémicycle au cours de trente-deux séances, après avoir assisté à vingt-six réunions de la commission spéciale durant plus de soixante-dix heures. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

M. Pierre Cordier. C'est votre job, et puis sur une réforme pareille c'est bien normal !

M. Fabien Di Filippo. Vu comment la réforme a été préparée, ce n'est manifestement pas assez !

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État . Comme vous, peut-être, j'ai constaté que nous consacrions plus de temps à débattre d'amendements de suppression que d'éléments de fond. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

M. Pierre Cordier. Menteur : nous n'y sommes pour rien !

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État. Comme vous, peut-être, j'ai constaté qu'il nous avait fallu presque une semaine pour examiner l'article 1er du projet de loi, article consacré à des principes généraux, principes que l'on retrouve dans tous les projets de loi visant à réformer les retraites préalablement examinés par votre assemblée, qu'il s'agisse de celui de 2010 ou de 2014. (Mêmes mouvements.)

M. Fabien Di Filippo. Nous sommes là pour débattre, cela n'a rien d'exceptionnel !

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État . Vous m'interrogiez sur l'intégration de vos amendements dans le texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité. Il ne vous a pas échappé, madame la députée, que nos projets politiques étaient différents…

M. Pierre Cordier. Ça, c'est sûr !

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État . …et que nous défendons, pour notre part, un projet d'universalité et de liberté que vous ne soutenez pas. (Mêmes mouvements.)

M. Patrick Hetzel. C'est un mensonge éhonté : ce n'est pas un projet universel !

M. Damien Abad et M. Jean-Marie Sermier . Et le financement ?

M. Thibault Bazin. Répondez sur le fond ! Vous fuyez le débat !

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État. Vous ne pouvez donc pas être surprise que les amendements de votre groupe n'aient pas été repris aussi largement que ceux de la majorité. Ils ont sans doute dans votre lecture politique une cohérence qu'ils n'ont pas dans le cadre de notre projet. Ce n'est pas vous faire injure que vous dire que les amendements des membres du groupe Les Républicains n'étaient pas forcément ceux que nous voulions intégrer au projet de loi.

M. Damien Abad. Alors, ne dites pas le contraire à la presse !

M. Thibault Bazin. Soyez fiers d'être des amateurs !

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État . Enfin, vous le savez, le parcours de ce projet de loi se poursuit : il sera examiné par le Sénat après avoir été largement enrichi par les travaux des députés, comme je l'ai indiqué il y a un instant en répondant à Mme Nathalie Elimas. (Vives exclamations sur les bancs du groupe LR.)

M. Pierre Cordier. Menteur !

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État. Il ira au Sénat puis il reviendra en deuxième lecture. J'espère que nous retrouverons alors à l'Assemblée des oppositions qui auront envie de débattre projet contre projet plutôt de défendre amendement de suppression sur amendement de suppression. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)

Données clés

Auteur : Mme Valérie Beauvais

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Retraites : généralités

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 4 mars 2020

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