Déploiement de l'hôpital militaire dans le Haut-Rhin et expérimentation du traitement à base de chloroquine
Question de :
M. Éric Straumann
Haut-Rhin (1re circonscription) - Les Républicains
Question posée en séance, et publiée le 25 mars 2020
DÉPLOIEMENT DE L'HÔPITAL MILITAIRE DANS LE HAUT-RHIN ET EXPÉRIMENTATION DU TRAITEMENT À BASE DE CHLOROQUINE
M. le président. Avant de céder la parole à notre collègue Éric Straumann, je tiens à lui dire combien la représentation nationale se sent proche de tous les Alsaciens, au cœur de la crise que nous vivons, et que nous exprimons notre profonde sympathie et notre affection (M. Philippe Vigier applaudit) à ceux de nos collègues qui souffrent. (Applaudissements sur tous les bancs.)
M. Éric Straumann. Je vous remercie, monsieur le président. Il est vrai que l'Alsace est très touchée. Notre département du Haut-Rhin, en particulier, est aujourd'hui un département martyr. Il représente 1 % de la population française, mais on y recense près de 20 % des décès dus au coronavirus. Je remercie le Gouvernement et l'armée d'avoir déployé un hôpital militaire de campagne à Mulhouse, ce qui permettra de soulager les urgences.
Pouvez-vous nous indiquer, monsieur le ministre des solidarités et de la santé, si d'autres hôpitaux de campagne sont prépositionnés pour être déployés ailleurs en France ?
Je tiens aussi à vous remercier d'avoir pris l'initiative de mettre en place un TGV sanitaire qui permettra de soulager les hôpitaux de Strasbourg, Colmar et Mulhouse. Je vous remercie également d'avoir autorisé hier soir l'usage de la chloroquine dans les services de réanimation. Ce traitement offre peut-être une chance supplémentaire de survie et les urgences de Mulhouse et de Colmar l'administrent depuis le début de la semaine.
Face à la gravité de la situation sanitaire du Haut-Rhin, je vous propose d'étendre l'expérimentation de la chloroquine dans les EHPAD du département. Nous avons des équipes médicales volontaires pour participer au protocole de recherche.
M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Monsieur Straumann, je vous prie de bien vouloir transmettre à l'ensemble des habitants de votre département, fortement mis à contribution, toute mon amitié, mes encouragements et mes remerciements parce que des solidarités incroyables s'y sont développées. Je vous remercie d'avoir souligné que l'État avait mis en place des moyens exceptionnels et inédits et je remercie aussi l'ensemble des territoires qui ont accepté de prendre en charge des malades graves, de réanimation, dans des hôpitaux parfois très éloignés de Strasbourg – je pense à Toulon aujourd'hui et, demain, à Angers et à Reims où le TGV sanitaire fera des arrêts pour, à chaque fois, qu'y soient hospitalisés des patients par dix. Je remercie enfin les pays qui nous entourent, le Luxembourg, la Suisse et l'Allemagne, qui ont accepté de prendre un certain nombre de de malades.
Votre question porte surtout sur l'hydroxychloroquine. J'ai reçu hier les recommandations du Haut Conseil de santé publique qui, se fondant sur la saisine de sept sociétés savantes faisant autorité, nous dit que nous n'avons pas, à ce stade, les preuves de l'efficacité de l'hydroxychloroquine – ou, d'ailleurs, d'autres traitements. Il est donc dangereux, en l'absence de preuves, de donner ces médicaments comme s'ils bénéficiaient d'une autorisation de mise sur le marché.
En revanche, le Haut Conseil de la santé publique a considéré que si des médecins décidaient collégialement, en leur âme et conscience, qu'ils pouvaient, en l'absence de traitement, administrer ce type de traitement à des malades dans un état grave, souffrant de complications pulmonaires sévères, il fallait les y autoriser. C'est ce que j'ai fait.
Je ne m'arrête pas là puisque j'encourage des études cliniques sur des patients en phase symptomatique ou présymptomatique plus précoce, dans différents territoires. Je m'entretenais ce matin encore à ce sujet avec des équipes de chercheurs. Nous ne voulons pas passer à côté de l'occasion d'identifier un traitement qui marcherait.
Monsieur Straumann, les cardiologues m'alertent également sur le fait que l'hydroxychloroquine peut entraîner des troubles cardiaques. Aux États-Unis, aujourd'hui, une personne qui en avait utilisé en automédication a été victime d'un arrêt cardiaque qui lui a été fatal.
Encore une fois, oui à l'innovation, oui à la recherche effrénée, sans limites, et par tous les moyens possibles, de traitement et de vaccin mais dans le respect des données de la science et dans celui de la sécurité et de la santé des patients. Les Français ont droit à la sécurité sanitaire comme cela a toujours été le cas, en tout temps et pour toute épidémie.
Aujourd'hui, donc, l'usage de la chloroquine en milieu hospitalier est réservé à des situations particulières ; demain, si des données cliniques nous permettent d'espérer aller au-delà, nous n'attendrons pas. Mais nous devons attendre ces informations cliniques sans lesquelles une autorisation de ma part, en tant que ministre de la santé, serait irresponsable.
M. Jean-Christophe Lagarde. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Éric Straumann.
M. Éric Straumann. Monsieur le ministre, je comprends parfaitement ces considérations scientifiques mais des équipes, sur place, sont prêtes à lancer des expérimentations. Je peux donner l'exemple précis d'un EHPAD dans lequel un médecin a pris l'initiative d'administrer ce traitement après avoir fait passer au patient un ECG, un électrocardiogramme. Tous les médecins savent qu'il existe un risque sur le plan cardiaque mais de nombreux EHPAD se trouvent dans une telle situation que ce traitement, aux résultats certes aléatoires, est une voie d'espoir.
Auteur : M. Éric Straumann
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Pharmacie et médicaments
Ministère interrogé : Solidarités et santé
Ministère répondant : Solidarités et santé
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 25 mars 2020