Question au Gouvernement n° 2862 :
Lutte contre l'épidémie de covid-19 et stratégie en matière de dépistage

15e Législature

Question de : M. Dominique Potier
Meurthe-et-Moselle (5e circonscription) - Socialistes et apparentés

Question posée en séance, et publiée le 15 avril 2020


LUTTE CONTRE L'ÉPIDÉMIE DE COVID-19 ET STRATÉGIE EN MATIÈRE DE DÉPISTAGE

M. le président. La parole est à M. Dominique Potier.

M. Dominique Potier. Monsieur le Premier ministre, fixer une date, cela revient à conjurer une damnation de fin du monde ou la damnation d'un monde sans fin. On voit bien, dès lors, toute la force d'une telle annonce, mais on voit bien aussi que, même formulée avec prudence comme l'a fait le Président de la République, elle soulève autant de questions qu'elle apporte de réponses.

Une des questions majeures qui se pose aujourd'hui est celle de notre responsabilité : la date du 11 mai est-elle trop précoce ? Pour certains acteurs, notamment du monde économique, elle apparaît trop tardive au vu de son coût économique important ; pour d'autres, préoccupés de la dignité humaine et de santé – préoccupations que nous partageons sur tous les bancs –, elle pourrait s'avérer trop précoce.

Paul Ricoeur disait qu'être responsable, c'est être responsable de ce qui est fragile, de ceux qui sont fragiles, et le groupe Socialistes et apparentés a été l'un des plus en pointe au sujet de ces enfants pour qui la vie s'est refermée et de ces aînés qui sont confrontés, dans la solitude, à la fin dernière.

Notre groupe est également soucieux de ce qui est fragile dans le rapport de la parole publique à la vérité. Pour lever toute ambiguïté, monsieur le Premier ministre, pouvez-vous nous dire si la doctrine d'un déconfinement à partir du 11 mai a été adoptée malgré l'absence de tests, parce que l'on est persuadé que les personnes asymptomatiques n'ont pas besoin d'être testées ? C'est une question extrêmement importante. On a longtemps dit qu'il était possible d'être à la fois asymptomatique et vecteur de la maladie. Dès lors, n'y a-t-il pas une contradiction fondamentale à vouloir rassembler, le 11 mai, toute la communauté éducative, non seulement les enseignants, les techniciens et les ATSEM – les agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles –, mais aussi des enfants, des adolescents ?

S'agissant des tests, nous n'aimerions pas que se répande encore plus la rumeur selon laquelle les doctrines se forment en fonction des carences et qu'elles s'adaptent au principe de réalité plus qu'à la recherche de la vérité. Pouvez-vous être transparent et clair à ce sujet : notre pays dispose-t-il des moyens de tester l'ensemble de la population française, afin que le 11 mai soit un rendez-vous avec la santé pour tous et qu'il s'agisse d'une santé durable ?

M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Je vous remercie pour votre question, monsieur Potier, car elle me permet d'évoquer la place particulière que tient le dépistage au moment où est envisagée la levée du confinement. Nous avons eu plusieurs fois l'occasion de discuter des enjeux de ces tests. Je voudrais que les éléments de la discussion soient parfaitement identifiés.

Les tests relèvent en réalité de deux grandes catégories : d'une part, ceux qui vous permettent de savoir, après un prélèvement par écouvillonnage et un diagnostic par PCR – réaction de polymérisation en chaîne – au moyen d'une plateforme technologique, si vous êtes porteur du virus et donc potentiellement malade, que vous soyez symptomatique ou non ; d'autre part, la sérologie, qui permet, à partir d'une analyse de sang, de déterminer si vous avez développé en vous des anticorps contre le virus, ce qui signifie que vous êtes immunisé après avoir été suffisamment exposé à celui-ci, que vous ayez été symptomatique ou non.

L'enjeu est double, et il est encore plus grand quand il s'agit de lever le confinement : il faut à la fois pouvoir répondre à des Français qui se demanderaient légitimement s'ils ont développé une immunité, faute d'avoir été testés par PCR alors qu'ils présentaient des symptômes, et être capable de tester immédiatement les personnes chez qui l'on suspecte des symptômes et les personnes contacts rapprochées – c'est exactement ce que nous avons fait aux stades 1 et 2 de l'épidémie –, afin d'isoler toute personne susceptible de transmettre la maladie.

Les deux tests répondent donc à des logiques différentes, mais que nous poursuivons chacune, semaine après semaine. D'une part, nous augmentons nos capacités PCR, grâce à l'installation de vingt plateformes haut débit et à l'achat de millions de tests en France et à l'étranger. D'autre part, nous nous procurons des équipements en sérologie qui viennent à peine d'arriver sur le marché mondial – ils n'existaient pas il y a quelques jours encore. Nous disposons désormais de moyens plus fiables de diagnostic quant à l'immunité des personnes.

Je le répète, il s'agit de deux tests distincts mais complémentaires, et nous sommes en train de renforcer nos capacités pour pouvoir tester massivement le moment venu et répondre ainsi à la demande légitime des Français.

Données clés

Auteur : M. Dominique Potier

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Santé

Ministère interrogé : Solidarités et santé

Ministère répondant : Solidarités et santé

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 15 avril 2020

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