Question au Gouvernement n° 2912 :
Apprivisionnement en matériel sanitaire

15e Législature

Question de : M. Bastien Lachaud
Seine-Saint-Denis (6e circonscription) - La France insoumise

Question posée en séance, et publiée le 30 avril 2020


APPROVISIONNEMENT EN MATÉRIEL SANITAIRE

M. le président. La parole est à M. Bastien Lachaud.

M. Bastien Lachaud. Le déconfinement se fera, le 11 mai, dans des conditions particulièrement hasardeuses. Pour limiter la contagion, le port du masque doit être généralisé et obligatoire dans les lieux publics. Mais alors, si les masques sont obligatoires, ils doivent, comme l'école, être gratuits et accessibles à tous, et c'est à l'État de le garantir. Personne ne doit être empêché de se protéger, de protéger les siens, de protéger les autres, de la contagion, pour des raisons financières. Vous devez décréter la gratuité des masques et organiser leur distribution.

Or vous refusez de le faire. Pourquoi ? Parce qu'Emmanuel Macron vous a imposé une date de déconfinement arbitraire, derrière laquelle vous courez. Parce que vous ne réquisitionnez pas les filières textiles et que vous êtes incapables de planifier la production. Parce que les chaînes d'approvisionnement et de distribution ne sont même pas encore déterminées – chaque ville fournira, ou non, des masques à ses habitants, inégalité terrible ! Parce que vous refusez de contrôler les prix « pour ne pas freiner l'innovation », selon vos termes, monsieur le ministre des solidarités et de la santé. Hier, dans une pharmacie, j'ai trouvé un masque en tissu à 13 euros : belle innovation !

Le Premier ministre a annoncé que les masques seraient obligatoires dans certains cas, mais sans garantir leur distribution. Les 5 millions de masques lavables à destination des plus démunis seront insuffisants, puisqu'on compte plus de 9 millions de pauvres dans notre pays. Vous créez donc une discrimination des plus vulnérables.

Si le prix du masque empêche des personnes de s'en procurer, celles-ci seront infectées. Les plus touchées seront les plus pauvres et les plus vulnérables aux formes graves de la maladie : ceux qui vivent dans des logements plus petits, plus peuplés et insalubres, ou bien dans des déserts médicaux, à la campagne ou à la ville. Il suffit de voir les ravages de la pandémie en Seine-Saint-Denis pour s'en convaincre. L'épidémie continuera de se répandre. Le déconfinement sera un échec, et nous devrons peut-être reconfiner, comme l'Allemagne s'apprête à le faire.

Ne permettez pas à l'épidémie de repartir ! Donnez à toutes et à tous les moyens de se protéger contre la contamination ! Décrétez la gratuité des masques pour l'ensemble de la population ! Organisez leur distribution !

M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Monsieur Lachaud, j'invite chacun d'entre nous à éviter de se transformer en prédicateur de l'apocalypse…

M. Bastien Lachaud. Je n'ai rien dit de tel !

M. Olivier Véran, ministre . …– même si, en prévoyant la reprise de l'épidémie et le reconfinement, j'imagine que vous vous êtes laissé aller à un effet de tribune dépassant votre pensée. Ce n'est pas le message que les Français attendent de leur représentation nationale. Ils ont besoin qu'on leur explique les mesures de déconfinement : où aura-t-il lieu ? pourquoi ? dans quels secteurs se déploiera-t-il ? quels seront les moyens qui leur seront donnés ? que peuvent-ils faire eux-mêmes pour éviter que l'épidémie ne se répande à nouveau ?

Nous ne le répéterons jamais assez, les moyens dont chacun dispose sont les gestes barrières : ils ne sont peut-être pas visibles et ne permettent pas de parler de réquisitions – on ne réquisitionne pas le savonnage des mains –, mais ils n'en sont pas moins fondamentaux.

M. Bastien Lachaud. Et les masques ?

M. Olivier Véran, ministre . Outre la distanciation physique, le lavage des mains et tous ces gestes qui fonctionnent pour limiter la circulation des épidémies – pas uniquement celle-là –, il y a l'équipement des Français en masques de protection normalisés à destination du grand public. Leur fabrication n'est pas simple, mais il n'a pas été nécessaire de procéder à des réquisitions puisque notre pays connaît une mobilisation générale, plus d'une centaine d'entreprises s'étant organisées pour en produire, sans oublier les importations.

Vous avez évoqué, à juste titre, le risque d'inégalités sociales. Le Premier ministre a annoncé hier, à cette tribune, que 5 millions de masques seraient, dès le premier stock, donnés par l'intermédiaire des préfets et des collectivités locales, aux CCAS, les centres communaux d'action sociale, en vue de leur distribution aux personnes vivant dans la précarité.

Vous parlez de la Seine-Saint-Denis : cela tombe bien, j'y étais samedi dernier pour rencontrer l'ensemble des associations mobilisées dans une maison associative.

M. Bastien Lachaud. Et moi, j'y étais hier !

M. Olivier Véran, ministre . Leurs représentants nous ont fait part de l'effort extraordinaire qu'ils réalisaient tous les jours, de leur capacité à s'organiser et à travailler ensemble pour distribuer des denrées alimentaires et apporter des aides financières.

Mme Sabine Rubin. Ce n'est rien d'autre que de la charité !

M. Olivier Véran, ministre . Ils ont remercié l'État, car l'aide exceptionnelle de solidarité, qui leur sera versée à partir du 15 mai, leur fournira un soutien financier indispensable.

Encore une fois, évitons les excès ! Nous pouvons échanger autrement qu'à coup d'effets de tribune. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)

Données clés

Auteur : M. Bastien Lachaud

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Santé

Ministère interrogé : Solidarités et santé

Ministère répondant : Solidarités et santé

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 30 avril 2020

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