Question au Gouvernement n° 2927 :
Situation humanitaire et migratoire en Libye

15e Législature

Question de : Mme Marietta Karamanli
Sarthe (2e circonscription) - Socialistes et apparentés

Question posée en séance, et publiée le 30 avril 2020


SITUATION HUMANITAIRE ET MIGRATOIRE EN LIBYE

M. le président. La parole est à Mme Marietta Karamanli.

Mme Marietta Karamanli. Monsieur le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, la Libye connaît une situation de crise aiguë depuis de nombreux mois. Il s'agit d'une guerre civile dans laquelle interviennent des combattants extérieurs et d'une crise politique qui oppose les groupes dirigeants. Les besoins vitaux de la population ne sont pas satisfaits, et le pays est désormais menacé par la pandémie du Covid-19.

On estime que 650 000 hommes, femmes et enfants sont prêts à fuir vers les côtes européennes. Les autorités de Malte ont fait savoir qu'elles n'avaient pas les moyens de faire face à une nouvelle vague de migration par la mer et appellent à une opération humanitaire urgente de l'Union européenne en Libye, ce qui supposerait d'apporter une aide alimentaire et des soins médicaux aux Libyens. Par ailleurs, le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés a fait état du premier renvoi de personnes dans un pays en guerre.

La situation est complexe, eu égard notamment au conflit interne à la Libye et aux conséquences possibles de l'inaction. Lors de sa réunion du 22 avril dernier, le Conseil des affaires étrangères de l'Union européenne a évoqué la question libyenne mais n'a pas pris de position.

Pouvez-vous nous donner des informations sur la situation exacte et la position de la France ? Quelles initiatives notre pays entend-il prendre, dans le cadre de l'Europe et des autres institutions internationales, pour mener une opération humanitaire en faveur des populations et des États limitrophes ? Il s'agit à la fois de politique étrangère et d'action humanitaire : ce sujet montre combien ce qui se passe ailleurs nous concerne tous.

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères. La crise libyenne, madame la députée, a changé de nature ; les ingérences étrangères, l'afflux de mercenaires et les violations de l'embargo participent à dégrader considérablement la situation. En ce moment même, les combats s'intensifient partout, en particulier en Tripolitaine, et les populations civiles en sont les premières victimes.

À cette situation s'ajoute un enlisement du processus politique élaboré à Berlin en janvier dernier, par l'ensemble des acteurs, y compris les chefs d'État et de gouvernement. Les présidents Poutine, Macron et Sissi, mais aussi Erdogan, ainsi que le secrétaire d'État Pompeo notamment : tout le monde était là pour trouver un accord. Or le processus politique ainsi défini n'est pas respecté : chacun, au contraire, prend des initiatives qui remettent en cause son démarrage même. Dans ce contexte, nous avons lancé il y a quelques jours, avec nos partenaires européens, un nouvel appel à une trêve humanitaire pendant le ramadan, relayant l'initiative en ce sens des Nations unies. Malheureusement, cette trêve n'est pas respectée alors qu'elle aurait encore plus d'importance en période de Covid-19.

La crise libyenne a des conséquences majeures sur les flux migratoires et sur la situation des migrants et des réfugiés présents en Libye. Nous avons soutenu l'initiative de Malte qui, je l'espère, sera suivie d'effet. Nous appuyons également en permanence l'action du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés et de l'Organisation internationale pour les migrations, qui font un travail remarquable auprès des réfugiés en Libye, même s'ils ont dû mettre en suspens les programmes de réinstallation et de retour volontaire, en raison de la crise du Covid-19. Nous complétons leur action en aidant à la réorientation du fonds fiduciaire d'urgence, pour qu'il soit plus facilement accessible aux populations de réfugiés dans le cadre de l'épidémie de Covid-19. La France a décidé de soutenir à hauteur de 700 000 euros l'action libyenne pour résoudre la crise sanitaire, en lien avec l'OMS – Organisation mondiale de la santé. Cependant, la véritable réponse est celle à apporter à la crise politique, permanente dans ce pays depuis de nombreuses années. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)

Données clés

Auteur : Mme Marietta Karamanli

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Politique extérieure

Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères

Ministère répondant : Europe et affaires étrangères

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 30 avril 2020

partager