Question au Gouvernement n° 2999 :
Mesures liées à l'emploi des travailleurs agricoles saisonniers

15e Législature

Question de : M. Julien Aubert
Vaucluse (5e circonscription) - Les Républicains

Question posée en séance, et publiée le 20 mai 2020


MESURES LIÉES À L'EMPLOI DES TRAVAILLEURS AGRICOLES SAISONNIERS

M. le président. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Permettez-moi tout d'abord d'avoir une pensée émue pour notre collègue du Vaucluse Jean-François Cesarini, décédé d'une longue maladie durant le confinement, ainsi que pour ses proches.

Monsieur le Premier ministre, votre ministre de la santé expliquait le 13 mars qu'il n'y avait aucun intérêt à fermer les frontières, car cela ne ralentirait pas la propagation du coronavirus. Quelques jours plus tard, l'Europe décidait le contraire et nous emboîtions tardivement le pas. D'un point de vue économique, en revanche, l'effet de ces fermetures pourrait être létal pour des filières dépendantes de l'étranger, notamment, dans le Vaucluse, celle des cerises, qui emploie beaucoup de travailleurs saisonniers venus d'Espagne.

Le ministre de l'intérieur a déclaré que les ressortissants européens justifiant d'un motif économique impérieux et munis d'un contrat de travail, en particulier les saisonniers agricoles, bénéficieraient de dérogations dans les jours à venir. Dans les faits, la frontière est restée close pour des ressortissants extra-européens munis d'un titre de séjour, mais aussi pour des Espagnols. Jeudi dernier s'est tenue une réunion interministérielle ; hier, une réunion d'arbitrage ; nul ne sait ce qui en est sorti. Le monde agricole attend une décision, une instruction, une circulaire. Le temps économique n'est pas le temps administratif. Monsieur le Premier ministre, parmi vos nombreux pouvoirs ne figure pas celui de retarder la maturité des fruits.

M. Charles de Courson. Pas encore ! (Sourires.)

M. Julien Aubert. Nos cerises sont déjà très mûres et la pluie favorise la multiplication des parasites. Mon département a besoin de 10 000 saisonniers français ; on en a recruté 500, soit 5 %. Pendant ce temps, dans nos villes, les cerises espagnoles envahissent les étals. Je souhaiterais donc que vous précisiez votre réponse : les personnes autorisées à travailler seront-elles uniquement les ressortissants européens, ou tout étranger ayant un titre de séjour ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.)

M. Thibault Bazin. Très bonne question !

M. le président. Concernant le temps des cerises, la parole est à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. J'ai déjà en partie répondu à cette question, posée par Mme Pinel. Monsieur Aubert, le Vaucluse est un département que je regarde de très près ; le président de sa chambre d'agriculture, celui d'un syndicat agricole, nous ont alertés à ce sujet. Nous avons immédiatement porté de six mois à neuf mois la durée maximale du séjour des travailleurs étrangers, ce qui nous a permis d'éviter une solution de continuité. Dans le même temps, en relation avec Mme Pénicaud et ses services, nous cherchions comment faire revenir cette main-d'œuvre, moyennant un guide de bonnes pratiques et des règles très strictes.

Vous avez raison de dire que le temps administratif ne suit pas le cycle des saisons. En l'occurrence, c'est ce dernier qui importe. Le Premier ministre a rendu un arbitrage ; l'instruction sera publiée aujourd'hui ou demain. Je le répète, elle permettra de recruter des étrangers, avec un contrat de travail. La sécurité sanitaire demeure toutefois une condition essentielle, à laquelle on ne peut déroger. Un guide des bonnes pratiques adapté au travail saisonnier sera publié. Compte tenu des problèmes que cela peut poser, nous resterons très attentifs à l'hébergement des saisonniers étrangers : il n'est plus envisageable de les loger en dortoir, à proximité immédiate les uns des autres, comme cela se pratique souvent dans le Lot, dans le Vaucluse, dans la Drôme et ailleurs. Une nouvelle conception de cet hébergement sera nécessaire. Mais rassurez-vous, monsieur Aubert : la main-d'œuvre étrangère sera là dans les jours qui viennent, avec les garanties de sécurité permettant à l'agriculture française de se développer et d'écouler ses produits.

M. le président. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Premièrement, monsieur le ministre, il y a urgence : dans quinze jours, la saison des cerises sera finie. Deuxièmement, je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions pas effectuer des contrôles sanguins, des contrôles de température, au départ des saisonniers, dans leur pays, afin d'éviter les problèmes. Troisièmement, peut-être pourrait-on autoriser les Français qui touchent le RSA – revenu de solidarité active – à le conserver tout en travaillant dans les champs, de manière à les substituer à la main-d'œuvre étrangère et à restructurer notre agriculture pour l'avenir.

M. Thibault Bazin. C'est une très bonne idée !

Données clés

Auteur : M. Julien Aubert

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Agriculture

Ministère interrogé : Agriculture et alimentation

Ministère répondant : Agriculture et alimentation

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 20 mai 2020

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