Lutte contre la précarité alimentaire
Question de :
Mme Bénédicte Taurine
Ariège (1re circonscription) - La France insoumise
Question posée en séance, et publiée le 27 mai 2020
LUTTE CONTRE LA PRÉCARITÉ ALIMENTAIRE
M. le président. La parole est à Mme Bénédicte Taurine.
Mme Bénédicte Taurine. Ma question s'adresse à M. le ministre des solidarités et de la santé.
« J'en ai marre de voir les pauvres crever de faim dans le pays de la bouffe. » Ces mots sont ceux de Coluche en 1985, lorsqu'il crée les Restos du cœur. Depuis cette époque, la pauvreté a explosé. Elle touche aujourd'hui 9 millions de personnes dans la sixième puissance la plus riche du monde.
Avec la crise sanitaire, ce sont des millions de personnes, enfants, étudiants, autoentrepreneurs, retraités, qui se retrouvent dans une situation de précarité alimentaire, qui ne mangent plus à leur faim. À la culpabilité et à la honte de ne pas s'en sortir s'ajoute l'obligation d'avoir recours à l'aide alimentaire auprès d'associations débordées.
J'ai lu sur le site de votre ministère que la lutte contre la précarité alimentaire visait « à favoriser l’accès à une alimentation sûre, diversifiée, de bonne qualité et en quantité suffisante ». C'est bien de communiquer avec une jolie photo. Mais que faites-vous dans les faits, concrètement ? D'un côté vous donnez des milliards aux plus riches et aux entreprises, sans contrepartie sociale, de l'autre vous faites de la charité.
Vous vous félicitez de donner 150 euros à des familles et 100 euros supplémentaires par enfant, ce qui, au passage, équivaut à environ 1 euro par repas. Vous poussez l'indécence jusqu'à proposer des guides pratiques expliquant comment se nourrir avec un petit budget. Considérez-vous que, si des gens ne peuvent pas se nourrir avec quelques euros par jour, ce serait de leur faute et qu'il faudrait leur expliquer comment faire ? Est-ce là toute votre ambition politique : fournir un guide aux gens pour qu'ils se débrouillent pour survivre et compter sur des millions de bénévoles pour qu'ils arrivent à manger ? Quand mènerez-vous réellement une politique solidaire ? Quand ferez-vous en sorte que les richesses soient vraiment partagées ? Quand allez-vous encadrer les prix alimentaires ? C'est le rôle du Gouvernement de faire en sorte que chacune et chacun puissent vivre dignement dans notre pays ? (Applaudissements sur les bancs du groupe FI.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé.
Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé. Vous avez raison : la crise a eu un impact considérable sur des milliers de familles. Permettez-moi juste de vous rappeler quelques chiffres. En France, l'aide alimentaire est fournie par quatre grandes associations que tous les Français connaissent : les Restos du cœur, la Croix-Rouge, le Secours populaire, les banques alimentaires. Elles gèrent la politique d'aide alimentaire visant à répondre aux besoins de l'ensemble des citoyens pour le compte de l'État – car c'est bien l'État qui les finance à hauteur de 115 millions, une partie de cette somme étant fournie par les fonds européens. S'y ajoutent 350 millions versés grâce à la défiscalisation des dons de particuliers et d'entreprises, ainsi que 250 millions apportés par les collectivités territoriales…
M. Jean-Paul Dufrègne. C'est énorme !
M. Stéphane Peu. C'est deux fois plus que l'État !
Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État . …sans lesquelles cette aide de proximité au quotidien serait impossible.
Pendant la crise, j'ai accompagné chaque jour les associations pour coordonner l'ensemble de leurs activités afin qu'elles puissent agir sur l'ensemble du territoire, pour permettre à des citoyens de s'engager à leurs côtés dans le cadre d'une réserve civique afin d'assurer une présence constante.
Lorsque nous avons constaté, avec les associations, une augmentation de la demande, j'ai lancé un plan de soutien alimentaire de 39 millions, soit un tiers du budget annuel mis en plus sur la table à l'occasion de ces deux mois de crise, 25 millions étant destinés directement aux associations afin qu'elles puissent acheter plus de denrées et faire face aux frais supplémentaires liés à la gestion de la crise, 14 millions, dont 4 millions dans les territoires d'outre-mer, étant versés pour que 100 000 familles puissent bénéficier en priorité de 2,9 millions de chèques d'urgence alimentaire.
C'est bien tous ensemble que nous résoudrons ce problème. L'État doit aller encore plus loin, ne pas se substituer aux associations mais bien leur faciliter le travail car, en France, l'aide alimentaire, ça ne se discute pas. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)
Auteur : Mme Bénédicte Taurine
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Pauvreté
Ministère interrogé : Solidarités et santé (Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre)
Ministère répondant : Solidarités et santé (Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre)
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 27 mai 2020