Politique sociale du Gouvernement
Question de :
Mme Bénédicte Taurine
Ariège (1re circonscription) - La France insoumise
Question posée en séance, et publiée le 3 juin 2020
POLITIQUE SOCIALE DU GOUVERNEMENT
M. le président. La parole est à Mme Bénédicte Taurine.
Mme Bénédicte Taurine. La compagnie aérienne Ryanair menace de licencier des pilotes et des personnels navigants en France, à moins qu'ils ne consentent à baisser leur rémunération pendant cinq ans. Derichebourg aeronautics services, sous-traitant d'Airbus et de Dassault, envisage un plan social qui se traduirait par 700 suppressions de postes ; ce nombre pourrait être revu à la baisse si les salariés renonçaient, entre autres, à leur treizième mois de salaire.
C'est dans ce contexte que Libération dévoile le montant du bonus que le patron de la compagnie aérienne Air France-KLM va toucher pour l'année 2019 : 1,6 million.
M. Pierre Cordier. C'est pas mal !
Mme Bénédicte Taurine. Le ministre des finances néerlandais a indiqué que son gouvernement a voté contre ce bonus et a justifié ce vote par l'attribution d'aides financées par les contribuables. Pour le Gouvernement français, en revanche, c'est un peu différent : en effet, votre cabinet considère que c'est un droit acquis correspondant à une performance passée, qui n'a donc pas vocation à être remis en cause. Le Gouvernement l'a validé le 26 mai dernier.
Le covid-19 a bon dos : en réalité, c'est toujours aux mêmes que vous demandez de faire des efforts. Quel que soit le contexte, un grand patron peut conserver ses acquis s'il le veut, mais les salariés, eux, doivent y renoncer.
Dans les médias, Mme Pénicaud fait appel aux entreprises pour se serrer les coudes et signer des accords de performance collective, créés par les ordonnances travail en 2017. Elle dit que ce dispositif serait une solution alternative aux licenciements et aux plans sociaux. En quoi cela consiste en réalité ? Ce dispositif impose aux salariés de faire des efforts et d'accepter des baisses de salaires. S'ils ne le souhaitent pas et se battent avec les syndicats pour refuser ce chantage, ils se voient accusés d'avoir été responsables de la fermeture de leur entreprise.
Au moment où les associations nous indiquent une hausse de la pauvreté en France ; au moment où les gens sont dans la précarité alimentaire – et cela s'accentuera dans les mois à venir ; au moment où la rémunération des patrons du CAC40 a atteint en moyenne 277 fois le SMIC et que sa croissance est trois fois plus rapide que celle de la rémunération des salariés, quelle autre solution proposez-vous à la majorité des Françaises et des Français, mis à part de travailler plus pour gagner moins ? (Applaudissements sur les bancs du groupe FI.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie et des finances.
M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie et des finances. La seule solution que nous proposons aujourd'hui est celle de l'emploi. L'emploi face à une montée des licenciements, face à une multiplication des faillites dont on voit qu'elle menace tous les territoires. Cet emploi, avec les décisions prises par le Premier ministre et par le Président de la République, nous l'avons sauvé.
Nous l'avons sauvé grâce au chômage partiel…
M. Pierre Cordier. Sauvé à court terme.
M. Fabien Di Filippo. On verra en septembre !
M. Bruno Le Maire, ministre . …en permettant à des millions de Français, plutôt que de perdre leur emploi, d'avoir leur salaire pris en charge par l'État à 100 % jusqu'à quatre SMIC. C'est la première fois qu’un dispositif de protection des salariés et des emplois a été aussi généreux.
Nous avons décidé avec le Premier ministre de faire évoluer ce dispositif en demandant aux entrepreneurs de faire une part de l'effort, parce que l'activité reprend. L'indemnisation ne sera plus prise en charge à 100 % par l'État, mais à 85 % ; 15 % resteront à la charge des entrepreneurs.
Pour faire quoi ? Justement pour garder des moyens financiers, pour soutenir les entreprises les plus fragiles, pour continuer à aider ceux qui sont en difficulté, pour alimenter le fonds de solidarité pour les commerçants, les indépendants, les restaurateurs et tous ceux qui resteront fermés.
Nous continuerons à faire évoluer le dispositif de soutien massif à l'économie française avec une préoccupation principale : préserver l'emploi, offrir des perspectives, sans qu’il soit question de baisser ici ou là les rémunérations des uns ou des autres, mais avec l'obsession qu'il y ait de l'emploi pour tous. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)
Auteur : Mme Bénédicte Taurine
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique sociale
Ministère interrogé : Économie et finances
Ministère répondant : Économie et finances
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 3 juin 2020