Question au Gouvernement n° 3096 :
Reconnaissance de l'écocide dans le droit pénal

15e Législature

Question de : M. Christophe Bouillon
Seine-Maritime (5e circonscription) - Non inscrit

Question posée en séance, et publiée le 17 juin 2020


RECONNAISSANCE DE L'ÉCOCIDE DANS LE DROIT PÉNAL

M. le président. La parole est à M. Christophe Bouillon.

M. Christophe Bouillon. Comme le dirait Eddy Mitchell, c'est ma dernière séance (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SOC. –  M. Jimmy Pahun applaudit également), c'est-à-dire ma dernière question au Gouvernement, question que j'ai pensé transformer en un vœu dans l'espoir qu'il se réalise. J'ai fouillé dans ce qui m'a fait bouillonner, ces derniers temps, et s'est imposée à moi la reconnaissance de l'écocide dans le droit pénal – que j'ai défendue au nom de mon groupe il y a quelque temps.

L'équation est assez simple : qui dit écocide, dit criminalité environnementale, qui dit criminalité environnementale, dit destruction d'habitats naturels, qui dit destruction d'habitats naturels, dit animaux sauvages en déshérence et qui dit animaux sauvages en déshérence, dit risque d'épidémie voire de pandémie – vous voyez à quoi je fais référence. Aussi, quand allez-vous enfin reconnaître, dans notre droit, l'écocide ?

Un mot plus personnel, monsieur le président. Si je siège ici depuis treize ans, c'est à cause de ma mère. Lorsque j'étais lycéen, à l'occasion de mon premier engagement – rassurez-vous, monsieur le Premier ministre, rien de violent : c'était pour constituer un comité de soutien à Nelson Mandela –, ma mère m'a dit : « La politique, ce n'est pas pour nous. » Or, tout au long de ces années, j'ai tout fait pour ne pas lui donner raison, pour faire en sorte que le fils de marin et de femme de ménage que je suis ait sa place ici. Et si j'ai beaucoup donné, parfois au détriment de mes enfants, Oscar et Romane, c'est pour faire en sorte que eux ou ceux de leur génération ne se disent jamais que la politique, ce n'est pas pour eux.

Un dernier mot. Monsieur le Premier ministre, je crois savoir que vous êtes de ces hommes qui lisent et qui aiment le verbe. Nous avons sans doute un peu cela en commun ainsi que la Normandie. J'emprunterai mes mots au poète Federico García Lorca,…

M. Jimmy Pahun. Très Normand ! (Sourires.)

M. Christophe Bouillon. …abattu, vous le savez, par les miliciens parce que républicain, parce qu'homosexuel et sans doute parce que poète. Il disait : « Moi, je reviens chercher mes ailes. » Eh bien, oui, je reviendrai ici chercher mes ailes parce que je suis de ceux qui pensent que l'Assemblée est capable de nous élever. Elle l'a fait lorsque notre ancien collègue Patrick Roy nous a émus aux larmes. (Applaudissements sur de nombreux bancs.) Elle l'a fait lorsque nous avons entonné, tous ensemble, La Marseillaise, au moment des attentats. Elle l'a fait aussi, pour certains d'entre nous, lorsqu'elle a voté le mariage pour tous ou la PMA pour toutes. (Applaudissements sur divers bancs.)

Et je suis persuadé qu'elle nous élèvera encore. Vive la République ! (Applaudissements sur tous les bancs. – De nombreux députés se lèvent et applaudissent.)

M. le président. Recevez, cher collègue, nos félicitations et nos vœux de succès dans les mandats que vous allez exercer par ailleurs. Suivant votre amicale recommandation, nous essaierons pour notre part de continuer à nous élever. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Pierre Cordier. Il répond à tous ceux qui partent !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Je ne le dirais pas en temps normal, mais, nom de nom, vous avez bien fait de ne pas écouter votre mère. (Sourires et applaudissement sur les bancs du groupe SOC et sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.) Et permettez-moi de penser que, même si vous lui avez désobéi, elle doit être sacrément fière de vous. (Mêmes mouvements.)

Après treize années d'une action parlementaire complète, d'engagement constant, après avoir exercé la présidence d'une association représentant les villes de France, vous faites le choix de votre commune. J'ai déjà eu l'occasion de dire que c'était un choix très compréhensible et très respectable. Vous l'avez sans doute longuement mûri. Nous partageons, vous et moi, un attachement pour la Normandie et, vous le savez, chez moi, dans le pays de Caux, on a plutôt affaire à des taiseux. Or il est bon, parfois, que les taiseux s'expriment et, pendant treize ans, vous avez exprimé la voix de vos concitoyens, de ceux qui vous avaient fait confiance, qu'ils partagent vos choix ou qu'ils les partagent moins… Vos électeurs savaient bien, en effet, que vous aviez, au fond, la conviction que l'intérêt général, l'intérêt de la France commandait de suivre un chemin qui n'était peut-être pas complètement le leur, mais celui que vous croyiez utile non seulement de suivre mais, parfois, de défricher. Pour cela, monsieur le député, je tiens à vous dire ma très sincère affection. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.)

Vous m'interrogez sur le crime d'écocide. L'honnêteté m'oblige à répondre que je ne suis certainement pas le plus grand spécialiste juridique en la matière.

M. Matthieu Orphelin. Pour l'instant !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . Cela peut venir… Je compte sur le travail de vos collègues pour faire mon évangélisation, si j'ose dire. En attendant, je prends l'engagement de m'y mettre afin de pouvoir vous répondre très directement et très complètement par écrit. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe MODEM.)

Données clés

Auteur : M. Christophe Bouillon

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Environnement

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 17 juin 2020

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